Apis

sous sa forme de taureau

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE

ÉPOQUE TARDIVE OU ÉPOQUE PTOLÉMAÏQUE > XXVI– XXXIdynastie > 656 - 30 AVANT J.-C.

[voir chronologie]

BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)

H. : 5,2 cm ; L. : 2,6 cm ; Pr. : 7,2 cm 

Co. 798

Comment

State of preservation

L’œuvre est en bon état de conservation.

Bien que le métal soit oxydé et ait pris une teinte uniformément vert-de-gris, les détails du modelé du corps de l’animal sont lisibles. La tête est érodée, les cornes en particulier. Deux petits trous percent l’ergot de la patte antérieure droite et le jarret de la patte postérieure droite.

Description

Apis, le taureau divinisé, est figuré dans l’attitude classique de la marche, les pattes gauches en avant. La petite statuette fait corps avec une base métallique fine, qui prend la forme d’un T.  La statuette était très vraisemblablement destinée à être encastrée dans un socle plus important.

 

Malgré l’érosion des volumes, le modelé du corps de l’animal est globalement naturaliste et finement rendu. En témoignent des détails anatomiques comme le cou, épais. Il est strié sous la gorge et jusqu’au poitrail de six vaguelettes, dessinant un large pan de peau pendant. C’est également le cas des pattes, légèrement trop courtes pour être parfaitement réalistes, mais dont on distingue bien l’omoplate en légère saillie, l’ergot et le sabot. La cambrure du dos est naturelle et la queue se distingue clairement de la croupe galbée ; seul le toupillon est rattaché au jarret arrière droit par souci de solidité. Les parties génitales de l’animal confirment sa nature de taureau. Deux cornes très érodées surmontent le front et encadrent le chignon (pour le vocabulaire anatomique des bovidés, voir). D’après les traces conservées, un disque solaire -peut-être orné d’un uraeus dressé- devait combler l’espace entre les deux cornes ; l’emplacement est aujourd’hui trop érodé pour le confirmer.

 

La tête approximativement triangulaire possède un chanfrein très aplati ; sur le front, une petite zone de métal a pris une teinte brune. Ce détail laisse supposer la présence originelle d’une incrustation claire, comme celle qui orne le front de nombreuses œuvres similaires (voir, par exemple, au British Museum de Londres les statuettes Inv. N° EA 58963 et Inv. N° 1898,02.25.1). Cette tache blanche constitue l’un des signes distinctifs qui permet aux prêtres de désigner la nouvelle incarnation d’Apis au sein de tout le cheptel égyptien, à la mort de son prédécesseur. Hérodote a livré une liste de ces critères, le décrivant comme « un taureau né d’une vache qui ne peut plus par la suite avoir d’autre veau. Les Egyptiens disent qu’un éclair descend du ciel sur la bête qui, ainsi fécondée, met au monde un Apis. Le taureau qui reçoit le nom d’Apis présent les signes suivants : il est noir, avec un triangle blanc sur le front, une marque en forme d’aigle sur le dos, les poils de la queue doubles et une marque en forme de scarabée sous la langue » (L’Enquête, III, 28, trad. A. Barguet). Bien qu’Hérodote le décrive comme tel, les Apis représentés sur les très nombreuses stèles découvertes par Mariette au Sérapeum possèdent une robe blanche tachetée de noir.

Si la figuration d’Apis sous la forme d’un taureau marchant est de loin la plus répandue, on trouve aussi des représentations anthropozoomorphes, sous la forme d’un homme à tête de taureau tenant le sceptre ouas et la croix ankh, ou encore d’une momie humaine à tête de bovidé. C’est à partir de la Basse-Époque que de nouveaux attributs sont intégrés à l’iconographie du taureau, notamment un scarabée ailé sur son garrot, un vautour aux ailes déployées sur sa croupe et un « tapis » frangé sur son dos (voir, par exemple, la statuette Co. 685).

 

Attesté dès le règne de l’Horus Aha à la première dynastie, le culte du taureau Apis est aussi ancien que l’est la civilisation égyptienne. De par cette longévité, il s’enrichit de nombreuses associations avec d’autres dieux. Vénéré particulièrement à Memphis, il est naturellement associé à Ptah, dieu local, dont il devient le « héraut » à partir du règne d’Amenhotep III à la XVIIIe dynastie. Lié à l’origine à la fécondité et par conséquent à la fonction royale, il ajoute à ses marques reconnaissables un disque solaire entre ses cornes, orné d’un ou de deux uraei symbolisant son affiliation au dieu Rê. Cette association au dieu solaire se retrouve chez un autre bovidé, le taureau Mnévis d’Héliopolis, possédant également un disque solaire entre les cornes. En l’absence d’inscription qui identifierait clairement le dieu figuré, ces deux taureaux sont bien souvent confondus. Apis obtient également des prérogatives funéraires en se fondant avec Osiris : cette nouvelle entité syncrétique Osirapis deviendra, à l’époque des Ptolémée et avec son assimilation à Hadès, le dieu Sérapis particulièrement vénéré dans le monde hellénistique (pour un exemple de ce syncrétisme, voir la statuette d’un Osisis-Apis présumé, conservée au musée du Louvre et où le triangle d’or incrusté sur le front de la divinité inciterait à y voir une forme d’Apis (Inv. N° E 3736 in GOMBERT-MEURICE Florence, « Statuette d’Osiris-Apis ? [cat. 310] » in Des animaux et des pharaons 2014, p. 282).

 

Alain Charron, entre autres, distingue deux formes majeures du culte animal en Égypte et particulièrement après le Nouvel Empire : à l’inverse des milliers d’animaux dits sacrés mais élevés uniquement dans le but d’être momifiés et de servir d’ex-voto (les « multiples »), Apis fait au contraire partie des « uniques », c’est-à-dire « une bête choisie parmi ses congénères de la même espèce pour être l’hypostase de la divinité de la cité » (cf. La mort n’est pas une fin 2002, p. 176). L’animal bénéficiait d’un statut à part. Soigneusement traité, il portait couronne, un culte propre lui était rendu, et il bénéficiait de funérailles dignes d’un dieu. Il était né d’une vache, elle-même considérée comme manifestation d’Isis (cf. CASSIER 2012, p. 15-20). Toutefois, ces uniques n’étaient pas des dieux à part entière mais des ouhem. Ce mot, traduit généralement par « héraut », faisait de l’animal un intermédiaire entre les hommes et les dieux. Il avait un rôle de médiateur, chargé de transmettre au dieu les prières des dévots et il assurait parfois la fonction d’oracle.

 

À sa mort, l’Apis recevait tous les hommages généralement réservés aux hommes, y compris une momification dans les règles ; puis, après avoir respecté la période d’accomplissement des rites funéraires de 70 jours, on recherchait sa nouvelle incarnation parmi les troupeaux d’Égypte. Jusqu’au règne de Ramsès II, chaque Apis était inhumé dans une tombe indépendante à Saqqâra ; puis, son culte prenant ensuite une importance considérable, notamment à la Basse-Epoque, un immense réseau de couloirs souterrains (aujourd’hui appelé le Sérapéum) est aménagé pour accueillir les momies des Apis. C’est également à cette période que se multiplient les statuettes en bronze le représentant.  À la mort du dieu bovidé, de nombreuses statuettes en bronze étaient commandées, moulées puis présentées en offrandes sur les lieux de culte afin de demander au dieu d’accorder ses bienfaits et sa protection au commanditaire. La figurine Co. 798 relève donc du domaine de la dévotion personnelle.

Related pieces

Les collections du musée Rodin conservent plusieurs statuettes du dieu Apis représenté sous la forme d’un taureau, Co. 807, Co. 1234, Co. 2369, Co. 2395 et Co. 5629. Les œuvres Co. 807 et Co. 2395 sont similaires à Co. 798 de par les formes anatomiques générales imposantes et le traitement du cou décoré de stries verticales. 

Inscription

Anépigraphe. 

Historic

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

BOREUX 1913 : Meudon, pavillon de l'Alma, vitrine 6, 318, "Petit taureau en bronze debout sur une base plate de forme [dessin]. Long. 7 cent. Haut. 5 cent. Estimé dix francs."

Donation Rodin à l'État français 1916.

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Thot assis

sous sa forme de babouin

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE

ÉPOQUE TARDIVE OU ÉPOQUE PTOLÉMAÏQUE > XXVIe - XXXIe dynastie > 672-30 AVANT J.-C.

[voir chronologie]

BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)

H. : 5,1 cm ; L. : 1,9 cm ; Pr. : 2 cm 

Co. 795

Comment

State of preservation

L’œuvre présente un état de conservation correct. 

Le métal est oxydé sur les parties basses de la statuette. Bien qu’érodés, les détails de la fourrure sont encore perceptibles. Le tenon métallique, visible sous la petite base, est en partie sectionné. 

Description

La figurine Co. 795 représente le dieu Thot sous une de ses formes zoomorphes, ici en babouin. L’animal est assis, genoux ramassés vers le ventre. Sa queue est repliée vers la droite. Ses mains sont posées à plat sur ses genoux. Placée sur une petite base sensiblement carrée, un tenon de section carré, aujourd’hui sectionné à son extrémité, permettait d’insérer l’œuvre dans un élément plus vaste, aujourd’hui disparu.

 

Le primate est couronné d’un disque lunaire reposant dans la concavité d’un croissant de Lune placé horizontalement. Cette composition met en avant les différentes phases de la Lune qui rythment le cycle de la vie. Une bande frangée trapézoïdale se dégage de l’arrière du disque lunaire en descendant entre les oreilles sur la crinière. 

La face de l’animal est aujourd’hui patinée par le temps. On remarque cependant deux légers creusements rendant les cavités oculaires couronnés d’une visière (bourrelet osseux qui surmonte l’œil). Le museau est allongé et glabre. Les narines y ont été modelées à l’avant. Un long sillon horizontal vient dessiner l’ouverture de la gueule et par la même occasion les mâchoires. Les oreilles sont réalisées de face et agrémentées de lignes horizontales figurant les touches de poils. Une épaisse crinière vient recouvrir les pattes avant de l’animal. Seuls les doigts se dégagent du camail (élargissement du pelage en forme de cape). On retrouve ce type d’arrangement sur les statues-cubes où les bras sont également confondus dans la masse de l’objet avec seulement les mains qui s’en dégagent. Le camail est décoré avec élégance grâce à un motif en forme de gouttes. L’œuvre conservée au Musée du Louvre E14206, présente le même type de décoration. Cette crinière stylisée descend bas dans le dos du primate jusqu’à l’amorce de la queue qui s’échappe du côté gauche en longeant la patte. Les membres inférieurs ont également été décorés jusqu’aux genoux afin de rendre la pilosité naturelle du babouin. Les pointes de pieds se fondent dans la petite base métallique, bien que l’on note encore le soin apporté à séparer les doigts. Entre ses pattes inférieures se distinguent les parties génitales. Cette insistance sur son pénis répond à la culture égyptienne, où la vitalité sexuelle attribuée au babouin lui attribue un rôle apotropaïque (YOYOTTE Jean, VERNUS Pascal, Bestiaire des Pharaons, Paris, 2005, p. 622).

 

Dans une collection constituée à une époque proche de celle d’Auguste Rodin, une figurine en très bon état de conservation permet de comprendre le décor initial de la statuette Co. 795, aujourd’hui fort émoussé. Acquise par Carl Jacobsen, probablement en Égypte dans les années 1890, l’image du babouin est de plus juchée sur une estrade équipée de marches à l’avant (Glyptotek Ny Carlsberg de Copenhague ÆIN 255, voir JØRGENSEN Mogens, Catalogue Egypt V. Egyptian Bronzes : Ny Carlsberg Glyptotek, [Copenahgue], Ny Carlsberg Glypotek, 2009, cat. 76.2 p. 218-219).

 

L’effigie est petite (5,1 cm) mais précisément décorée. L’application à rendre les détails anatomiques et décoratifs à l’arrière de l’œuvre suppose qu’elle pouvait être vue sur toutes ses faces, notamment en étant placée sur une enseigne de la même manière que la statuette conservée au Museo Egizio de Turin, S.93

 

L’espèce représentée serait un babouin « doguera » ou babouin « olive », le Papio anubis doguera, plus grand que l’espèce prépondérante (le Papio hamadryas) dont le pelage, moins épais, laisse ses oreilles découvertes. Sur les deux espèces, voir OSBORN Dale J., OSBORNOVÁ Jana, The Mammals of Ancient Egypt, The Natural History of Egypt, Vol. IV, Warminster, 1998, p. 32-37 (Papio hamadryas) et 38-30 (Papio anubis). Le nom français de « babouin » dériverait du nom du dieu égyptien Baba, ou Bébon. Baba, dieu de la force virile, est cité dès les Textes des Pyramides (CORTEGGIANI Jean-Pierre, L’Égypte ancienne et ses dieux : dictionnaire illustré, Paris, 2007, p. 72-74). Singe coloré, son phallus surdimensionné servait de verrou pour les « portes du ciel », c’est-à-dire les vantaux des tabernacles où les statues divines étaient exposées (voir ÉTIENNE Marc (dir.), Les Portes du Ciel, Visions du monde dans l’Égypte ancienne, Musée du Louvre, 6 mars-29 juin 2009,Paris, 2009).

 

Cette statuette est très vraisemblablement une effigie de Thot. L’image qu’elle présente de l’hypostase du dieu est classique. La morphologie du babouin est réaliste, sa position accroupie correspond également aux autres figurines et statuettes du dieu. Divinité ancienne, Thot est le dieu de la connaissance, des écritures, qui fixe le destin et calcule le temps. Thot consigne par écrit tout ce qui est important dans la vie et dans la mort et assiste à la pesée du cœur du défunt. Grand juge divin, il est étroitement associé à la Lune.

Si le premier animal emblématique du dieu est l’ibis (oiseau dont le pas saccadé aurait été mis en relation par les anciens égyptiens avec le calcul, la mesure et la connaissance précise, qualités attribuées au dieu Thot), le second est le babouin. Cette association au babouin à pour origine la ville d’Hermopolis, où Thot a supplanté l’ancien dieu-singe Hedjour. Les représentations de babouins ont été retrouvées en grand nombre dans les sanctuaires dédiés à Thot. Les nécropoles de babouins momifiés, notamment dans la région thébaine, illustrent les liens étroits et sacrés unissant le primate au dieu de la connaissance. Thot représenté sous sa forme de babouin ne possède que très rarement un corps d’homme, contrairement à la forme ibis de Thot qui le présente souvent ibiocéphale (cf. la figurine du Musée Rodin Co. 2332).

L’association de Thot avec le soleil tiendrait au fait que les égyptiens avaient remarqué les postures et mimiques des babouins, réunis en groupes bruyants au lever du soleil afin de rappeler les limites de leur territoire. Voir, par exemple, la surprenant gestuelle des quatre babouins adorant le soleil levant, provenant du socle de l’obélisque oriental de Ramsès II à Louxor (face sud-ouest), conservée au Musée du Louvre N381 (DAVID Élisabeth, BOVOT Jean-Luc, in H. GUICHARD (éd.), Des animaux et des pharaons. Le règne animal dans l’Égypte ancienne, catalogue d’exposition du musée du Louvre-Lens, 5 décembre 2014-9 mars 2015, Paris, Lens, 2014, notice 365, p. 330-331).

 

On peut envisager une fonction votive à la figurine Co. 795, placée dans un sanctuaire dédié au dieu. On peut aussi lui attribuer une fonction plus apotropaïque et lui concevoir une provenance domestique ou funéraire.

Related pieces

Les collections du musée Rodin conservent une autre statuette en bronze représentant un babouin, Co. 5606. En revanche, cet objet n’est pas couronné d’un disque solaire. L’œuvre Co. 2311 figure également un babouin en pierre noire de type grauwacke. 

Inscription

Anépigraphe. 

Historic

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

BOREUX 1913 : Meudon/atelier Tweed/vitrine 9, 376, "Cynocéphale coiffé du disque, assis sur une base. Haut 5 cnt. ½. 20 frs."

Donation à l’État français en 1916.

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Thot passant

sous sa forme d'ibis

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE

ÉPOQUE TARDIVE OU ÉPOQUE PTOLÉMAÏQUE > XXVIe - XXXIe dynastie > 672 - 30 AVANT J.-C.

[voir chronologie]

BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)

H. : 7,3 cm ; L. : 4,2 cm ; P. : 13 cm 

Co. 776

Comment

State of preservation

L’œuvre est en mauvais état de conservation. 

Le métal est oxydé et présente des piqûres au niveau de la tête et des ailes. Plusieurs fissures, partant d’une petite cavité circulaire au centre de l’aile gauche sont visibles. Deux autres perforations circulaires, beaucoup plus larges, percent aussi le dos de l’oiseau. La tête rapportée est aujourd’hui maintenue au corps par la corrosion du métal. 

Les pattes, également rapportées, manquent. Une barre métallique a été ajoutée dans l’espace qui accueillait la patte droite afin de maintenir l’œuvre sur un socle en bois de palissandre. Le dessous de la patte gauche, originellement creux, est comblé de corrosion et d’une partie de la patte rapportée manquante. La pointe du bec est brisée. 

La base du cou est plus large que la partie du corps qui l’accueille. Il est possible que cette tête appartienne à une autre statuette d’ibis. Vu l’état de conservation identique des deux parties, leur assemblage s’est probablement fait à une époque antique. 

Description

La statuette représente un ibis, dressé sur ses pattes. En position de marche, cet ibis passant avance la patte gauche. La statuette est composée de deux parties distinctes, le corps et la tête rapportée, plus large. Les formes générales de l’oiseau sont réalistes.

 

Le bec de l’ibis présente un allongement et une courbure naturels. Un sillon figure l’ouverture. Finement ciselé,  il suit avec précision l’arrondi. Les arcades sourcilières, traitées en relief, se prolongent en arêtes vers la pointe du bec. Les contours des yeux, également en relief, entourent les pupilles. Celles-ci, rondes et pleines, sont légèrement disproportionnées. Le sommet de la tête est galbé alors que le dessous du bec est plat. Il couronne une gorge épaisse et un cou quelque peu court. Le dos de l’oiseau est très arrondi, de même que le ventre qui remonte sensiblement vers la queue. Les ailes, légèrement en relief, se démarquent principalement du reste du corps grâce au sillon qui dessine leur contour. On remarque qu’elles apparaissent assez éloignées du cou. La queue est indiquée par un décor de trois plumes, visible entre ces deux ailes. Il se compose de nombreuses fines lignes incisées, parallèlement les unes aux autres. Elles sont séparées en trois champs verticaux de largeur et de longueur similaires. Ces champs apparaissent en pointe au milieu du dos créant ainsi un motif en dent de scie, et se poursuivent jusqu’à la pointe de la queue. Ce décor a été incisé à la main après la fonte de l’objet. Il est assez fréquent d’observer un décor de plumes sur la queue des figures d’ibis, voir par exemple les œuvres du Museo Egizio de Turin C.1015 et C.1011. Ces représentations de plumage semblent toutes réalisées très librement, le travail de finition étant  sans doute laissé à l’appréciation de l’artisan. 

La poitrine et le ventre de cet ibis ne présentent aucun détail décoratif. Les cuisses suivent une position naturelle, mais semblent rendues un peu courtes sur la statuette Co. 776. 

 

Il existait deux sortes d’ibis en Égypte, l’« ibis blanc » (ibis aethiopica sive religiosa) et l’« ibis noir » (ibis falcinellus), auxquels Hérodote consacre son chapitre 76. Le premier affiche un plumage entièrement blanc et un bec rose, alors que le second a le cou, la tête, le bec, les pattes et la queue noirs. L’œuvre Co. 776 présente un décor de plume à l’extrémité de la queue ce qui suggère qu’il s’agit ici d’un ibis noir. 

L’ibis était considéré comme un ami des hommes car il détruisait les chenilles et les sauterelles qui menaçaient les récoltent, mais aussi d’après Hérodote, les serpents ailés venus d’Arabie et les scorpions. Il est étroitement et uniquement associé au dieu Thot, dieu lunaire, maître des « paroles divines » et seigneur d’Hermopolis. Thot, forme divinisée de Djéhouty identifié à Hermès par les Grecs, est le plus important des dieux lunaires. Il possède une personnalité complexe comprenant de nombreuses facettes. Il est à la fois la personnification de la Lune, mais aussi son protecteur, son gardien et parfois son adversaire. L’association à l’ibis se fait ici par la forme de son bec qui évoque le croissant de Lune, ainsi que par son plumage bicolore. Dans le Livre de la Vache céleste, Rê en fait son vizir et son substitut en déclarant : « Tu seras à ma place, mon remplaçant. On dira de toi : Thot, le remplaçant de Rê ». En tant que gardien et protecteur de la Lune, elle-même assimilée à l’œil d’Horus, Thot est « Celui-qui-compte-les-parties-[de-l’œil] » dans ses phases croissante et décroissante. Il possède ainsi des dons de calculateur et de mesureur. Les Égyptiens ayant avancé que le pas de l’ibis faisait exactement une coudée, il est alors utilisé comme étalon type et Thot devient « maître de la coudée ». On retrouve souvent des statuettes en bronze d’ibis couchés pour que les pattes représentent le signe du bras qui était utilisé pour écrire une coudée. Les collections du musée Rodin conservent un exemple l’illustrant, Co. 5977.

De par l’observation rigoureuse et minutieuse des phases de la Lune, Thot devient le « savant » par excellence qui fait de lui le maître des écrits et du calame et le patron des scribes. Il établit le cadastre général de l’Égypte, inscrit le nom des rois sur l’arbre iched, légitimant leur accession au trône, et enregistre les résultats de la pesée du cœur. Enfin, il est juge et arbitre entre les dieux, notamment en prenant le rôle de médiateur dans le conflit qui oppose Seth et Horus. 

 

Les innombrables représentations de Thot se limitent à trois types différents. Le plus souvent, le dieu est ibiocéphale. Il peut être également zoomorphe en prenant l’aspect d’un ibis ou d’un babouin assis, second animal sacré du dieu. Il est rare de le rencontrer entièrement anthropomorphe, ou cynocéphale bien que quelques exemples peuvent être cités, notamment dans la sixième heure du Livre de l’Amdouat, face à Nectanébo Ier dans les catacombes de Touna el-Gebel, ou sur la façade du tombeau de Pétosiris sur ce même site. 

Touna el-Gebel est connu pour être le centre culturel de Thot où la cosmogonie hermopolitaine s’est mise en place. On y trouve un ibiotapheion, immense nécropole animale où ibis et babouins y étaient momifiés et inhumés dans des jarres en terre cuite ou dans des cercueils en bois ou en calcaire. L’œuvre Co. 776 représentant une figure de reliquaire, il est possible qu’elle provienne de ce site. 

 

Les reliquaires de l’Antiquité égyptienne sont des objets archéologiques assez bien connus, les cimetières d’animaux sacrés étant nombreux sur le territoire égyptien. Ils comprenaient deux types d’animaux, les « uniques » et les « multiples ». La première catégorie regroupe des animaux choisis, parmi ses congénères et par les prêtres grâce à une statue divine qu’ils manipulaient, pour représenter de son vivant une divinité particulière. Les « uniques » les plus connus sont les taureaux Mnévis et Apis dont la plus ancienne attestation d’inhumation date du règne d’Amenhotep III. Ici, avec l’œuvre Co. 776 il s’agit du reliquaire d’un « multiple ». Ces « multiples » n’étaient pas choisis pour leur caractère sacré mais c’est par les rites de leur mise à mort, leur momification et les prières récitées à cet instant que leur était conféréun caractère divin. Les animaux les plus représentés sont les serpents, les chats, les chiens, les ibis et les crocodiles. Ils n’avaient pas de pouvoir à part entière, c’était le dieu qu’ils représentaient à leur mort qui était encensé. Ils devenaient alors un ba de la divinité, acquéraient un rôle de médiateur et devenaient capables de transmettre les doléances de la population. Les reliquaires étaient créés sur demande des dévots et les prêtres se chargeaient d’y insérer l’animal entièrement momifié, soit une partie de sa momie, voire même un paquetage imitant la forme de l’animal. Ces « meurtres » étaient pratiqués cachés du regard de la population car la loi égyptienne condamnait à mort toute personne ayant tué même accidentellement un animal. Quoiqu’il en soit, ils étaient courants afin de subvenir aux besoins des commanditaires. Au fil du temps, les commandes devenant de plus en plus nombreuses, certaines bêtes étaient ainsi élevées dans le seul but de servir à leur mort d’objet de dévotion.

 

Les figures d’ibis sont des objets relativement nombreux. En voici quelques exemples :

Musée du Louvre, Paris : E2411.

Metropolitan Museum of Art, New York : 04.2.462.

Brooklyn Museum, New York : 86.226.19

Related pieces

Les collections du musée Rodin conservent plusieurs statuettes d’ibis en bronze, Co. 211, Co. 2380, Co. 2425 et Co. 5785. Malheureusement, aucune de ces œuvres n’est complète. 

Inscription

Anépigraphe.

Historic

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

BOREUX 1913 : Meudon / pavillon de l'Alma / vitrine 15, 445, "Ibis en bronze, les pattes manquent. Long. 13 cent. Estimé cinquante francs..Ibis en bronze, les pattes manquent. Long. 13 cent. Estimé cinquante francs."

Donation à l’État français en 1916.

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Thot passant

sous sa forme d'ibis

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE

BASSE ÉPOQUE > XXVI- XXXe dynastie > 656 - 332 AVANT J.-C.

[voir chronologie]

BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)

H. : 9 cm ; L. : 3,5 cm ; Pr. : 8,6 cm 

Co. 211

Comment

State of preservation

L’œuvre est en mauvais état de conservation. Le métal est très oxydé mais peu corrodé. L’ibis est acéphale. Les pattes d’origine ont disparu et sont remplacés par des pattes modernes (date du raccord inconnu). Du pied droit d’origine, les doigts et griffes sont conservés, collés à la base rectangulaire en bois sur laquelle la figure d’ibis a été placée. L’animal est parsemé de piqûres importantes et profondes particulièrement sous la queue de l’oiseau, conséquences d’un décapage chimique. 

La tête de l’animal a aujourd’hui disparu. On note des concrétions au niveau de la cassure du cou.

Description

L’œuvre représente un ibis acéphale debout et marchant, la patte gauche en avant. Les formes générales de l’oiseau sont naturelles. Le cou, partiellement conservé, amorce une courbure réaliste. La gorge et la poitrine bombées figurent un oiseau repu. Elles se prolongent sur un ventre particulièrement plat. Le dessous de la queue l’est également. En revanche, le dos de l’animal présente un tracé plus naturaliste. La base du cou à l’avant des épaules est clairement marquée, de même que le contour des ailes en relief. Un décapage chimique, qui aurait été effectué lors d’une restauration non datée, a effacé tout détail d’un plumage qui semblerait avoir recouvert l’œuvre. Les ailes finissent en pointe arrondie sur la queue. Les cuisses d’origine de l’oiseau sont courtes comparativement aux longues pattes, rapportées à une époque indéterminée. On note les restes des doigts et griffes d’origine sur la base en bois. Le pied droit est mieux conservé que le gauche. Il se compose de trois longs doigts, aujourd’hui très détériorés. 

La figure a été placée sur une base en bois contemporaine, légèrement décalée sur la droite par rapport à l’axe vertical. 

 

Il existait deux sortes d’ibis en Égypte, l’« ibis blanc » (ibis aethiopica sive religiosa) et l’« ibis noir » (ibis falcinellus), auxquels Hérodote consacre son chapitre 76 du livre II de son Enquête (voir Hérodote, Histoires, Livre II : Euterpe, in coll. Les Belles Lettres). Le premier affiche un plumage entièrement blanc et un bec rose, alors que le second a le cou, la tête, le bec, les pattes et la queue noirs. Il est impossible de déterminer l’espèce de l’ibis Co. 211. Néanmoins, l’absence d’un décor de plume sur la queue, comme sur l’ibis Co. 776, suggère qu’il s’agit ici d’un ibis blanc. 

 

L’ibis était considéré comme un ami des hommes car il détruisait les chenilles et les sauterelles qui menaçaient les récoltent, mais aussi d’après Hérodote, les serpents ailés venus d’Arabie et les scorpions. Il est étroitement et uniquement associé au dieu Thot, dieu lunaire, maître des « paroles divines » et seigneur d’Hermopolis. Thot, forme divinisée de Djéhouty identifié à Hermès par les Grecs, est le plus important des dieux lunaires. Il possède une personnalité complexe comprenant de nombreuses facettes. Il est à la fois la personnification de la Lune, mais aussi son protecteur, son gardien et parfois son adversaire. L’association à l’ibis se fait ici par la forme de son bec qui évoque le croissant de Lune, ainsi que par son plumage bicolore. Dans le Livre de la Vache céleste, Rê en fait son vizir et son substitut en déclarant : « Tu seras à ma place, mon remplaçant. On dira de toi : Thot, le remplaçant de Rê ». En tant que gardien et protecteur de la Lune, elle-même assimilée à l’œil d’Horus, Thot est « Celui-qui-compte-les-parties-[de-l’œil] » dans ses phases croissante et décroissante. Il possède ainsi des dons de calculateur et de mesureur. Les égyptiens ayant avancé que le pas de l’ibis faisait exactement une coudée, il est alors utilisé comme étalon type et Thot devient « maître de la coudée ». On retrouve souvent des statuettes en bronze d’ibis couchés pour que les pattes représentent le signe du bras qui était utilisé pour écrire une coudée. Les collections du musée Rodin conservent un exemple l’illustrant, Co. 5977.

De par l’observation rigoureuse et minutieuse des phases de la Lune, Thot devient le « savant » par excellence qui fait de lui le maître des écrits et du calame et le patron des scribes. Il établit le cadastre général de l’Égypte, inscrit le nom des rois sur l’arbre iched, légitimant leur accession au trône, et enregistre les résultats de la pesée du cœur. Enfin, il est juge et arbitre entre les dieux, notamment en prenant le rôle de médiateur dans le conflit qui oppose Seth et Horus. 

 

Les innombrables représentations de Thot se limitent à trois types différents. Le plus souvent, le dieu est ibiocéphale. Il peut être également zoomorphe en prenant l’aspect d’un ibis ou d’un babouin assis, second animal sacré du dieu. Il est rare de le rencontrer entièrement anthropomorphe, ou cynocéphale bien que quelques exemples peuvent être cités, notamment dans la sixième heure du Livre de l’Amdouat, face à Nectanébo Ier dans les catacombes de Touna el-Gebel, ou sur la façade du tombeau de Pétosiris sur ce même site. 

Touna el-Gebel est connu pour être le centre culturel de Thot où la cosmogonie hermopolitaine s’est mise en place. On y trouve un ibiotapheion, immense nécropole animale où ibis et babouins y étaient momifiés et inhumés dans des jarres en terre cuite ou dans des cercueils en bois ou en calcaire. L’œuvre Co. 211 représentant une figure de reliquaire, il est possible qu’elle provienne de ce site. 

 

Les reliquaires sont des objets archéologiques assez bien connus, les cimetières d’animaux sacrés étant nombreux sur le territoire égyptien. Ils comprenaient deux types d’animaux, les « uniques » et les « multiples ». La première catégorie regroupe des animaux choisis, parmi ses congénères et par les prêtres grâce à une statue divine qu’ils manipulaient, pour représenter de son vivant une divinité particulière. Les « uniques » les plus connus sont les taureaux Mnévis et Apis dont la plus ancienne attestation d’inhumation date du règne d’Amenhotep III. Ici, avec l’œuvre Co. 211 il s’agit du reliquaire d’un « multiple ». Ces « multiples » n’étaient pas choisis pour leur caractère sacré mais c’est par les rites de leur mise à mort, leur momification et les prières récitées à cet instant que leur était conféré un caractère divin. Les animaux les plus représentés sont les serpents, les chats, les chiens, les ibis et les crocodiles. Ils n’avaient pas de pouvoir à part entière, c’était le dieu qu’ils représentaient à leur mort qui était encensé. Ils devenaient alors un ba de la divinité, acquéraient un rôle de médiateur et devenaient capables de transmettre les doléances de la population. Les reliquaires étaient créés sur demande des dévots et les prêtres se chargeaient d’y insérer l’animal entièrement momifié, soit une partie de sa momie, voire même un paquetage imitant la forme de l’animal. Ces « meurtres » étaient pratiqués cachés du regard de la population car la loi égyptienne condamnait à mort toute personne ayant tué même accidentellement un animal. Quoiqu’il en soit, ils étaient courants afin de subvenir aux besoins des commanditaires. Au fil du temps, les commandes devenant de plus en plus nombreuses, certaines bêtes étaient ainsi élevées dans le seul but de servir à leur mort d’objet de dévotion.

 

Les figures d’ibis sont des objets relativement nombreux. En voici quelques exemples :

Musée du Louvre, Paris : inv. n° E2411.

Museo egizio de Turin : inv. n° C.1015 et C.1011.

Metropolitan Museum of Art, New York : inv. n° 04.2.462.

Brooklyn Museum : inv. n° 86.226.19

 

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Les collections du musée Rodin conservent plusieurs statuettes d’ibis en bronze, Co. 776Co. 2380Co. 2425 qui ne figure que la tête de l’oiseau, et Co. 5785. Malheureusement, aucune de ces œuvres n’est complète. 

Inscription

Anépigraphe. 

Historic

Acquis par Rodin entre 1893 et 1904.

BOREUX 1913 : Meudon,  atelier  de peinture, vitrine 11, 400, "Ibis en bronze, il manque la tête, les pattes ont été refaites. Long. 8 cent. ½. Estimé vingts frs."

Donation à l’État français en 1916.

Historic comment

L'objet était exposé en 1913 dans la vitrine 11 de l'atelier de peinture, à Meudon.

Rodin aimait le montrer à ses visiteurs : « Voici un ibis, un de ces petits bronzes dont l'Égypte a donné de si merveilleux échantillons : il n'y a pas une plume, mais il y a l'ensemble de toutes ces plumes dans ce corps nerveux monté sur ces deux grandes pattes, et cependant regardez comme il marche, regardez comme il va voler! Ah! Ces gens là étaient vrais!... (RODIN Janvier-février 1904, p. 16). Propos qu'il élargira plus tard dans un autre article : « Voici un ibis, un de ces petits bronzes dont l'Égypte a donné de si merveilleux échantillons : il n'y a pas une plume, mais il y a l'ensemble de toutes les plumes dans ce corps nerveux monté sur ces deux grandes pattes, et pourtant regardez comme il marche, regardez comme il va voler ! Ah ces gens-là étaient vrais !... De façon différente, certainement, mais ils l'étaient tous : les Étrusques sont plus sombres, les Grecs ont donné plus de douceur dans l'ombre, les Égyptiens et les Assyriens sont plus sauvages : ih ! les figures assyriennes ! Elles sont effrayantes comme des tigres » (RODIN octobre 1909,p. 497-498). Le sculpteur fit photographier l'objet de manière isolée (musée rodin, Ph. 2707).

L'oiseau a conservé son socle en bois ancien, probablement antérieur à l'achat par Rodin et portant sur une étiquette l'inscription suivante : « Ibis / Oiseau consacré au dieu Thot » et sur une autre le numéro « 195». La première fut probablement collée par un ancien propriétaire de l'objet, apportant sur ce cartel sa connaissance égyptologique. La seconde pourrait être le numéro d'ordre d'une vente aux enchères ou du registre de l'antiquaire.

 

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Buste de Sérapis

Pendentif

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE

ÉPOQUE TARDIVE OU ÉPOQUE PTOLÉMAÏQUE > XXVI– XXXIedynastie > 656 - 30 AVANT J.-C.

[voir chronologie]

BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)

H. : 5,8 cm ; L. : 4 cm ; P. : 2,4 cm 

Co. 1369

Comment

State of preservation

L’œuvre présente un mauvais état de conservation. 

L'ensemble est très oxydé et corrodé. La surface a pris une teinte verte et est aujourd’hui rugueuse. Les détails du visage, de la chevelure, de la barbe et de la couronne sont patinés. 

Description

La figurine représente le buste de Sérapis. Le dieu est couronné du calathos, un couvre-chef en forme de corbeille décorée de rameaux d’olivier ou d’épis de blé. Il s’agit d’un attribut des divinités gréco-romaines adoptant la forme d’un boisseau, symbole d’abondance et de fertilité (voir MALAISE Michel, « Le calathos de Sérapis », Studien zur Altägyptischen Kultur 38, 2009, p. 173-193, consultable en ligne). Le calathos est ici de forme trapézoïdale ; son bord supérieur est légèrement ourlé. Bien qu'épaisses, les boucles de la chevelure et de la barbe -bifide- du dieu se laissent à peine observer aujourd'hui. Une bélière a été installée à l'arrière de la figurine ; il s'agit d'un pendentif, ou éventuellement d'une applique. 

 

Le visage du dieu est long et rectangulaire. Le contour des yeux est profondément creusé, peut-être étaient-ils incrustés. Le nez est court mais large ; il surmonte une moustache tombante, très fournie. La bouche est rendue par une simple fente arquée que suit le tracé de la moustache. La lèvre inférieure, la plus visible entre la moustache et la barbe, a été modelée. Plus aucun détail du grand drapé plissé qui recouvrait la divinité n’est aujourd’hui discernable. On remarque que l'objet n’est pas travaillé en détail à l’arrière, ce qui suggère qu’il ne devait être vu que de face. Cette partie arrière est creuse et a été comblée d'une matière plâtreuse blanche à l'époque moderne. Le négatif d'une vis, placée au centre, atteste d'un montage sur un socle.

 

Sérapis est un dieu grec pourvu d’un nom égyptien. Depuis le règne d’Amenhotep III, un culte était rendu au taureau Apis à Memphis. Une importante communauté grecque s'installa par la suite dans cette région. Appelé Osiris-Apis après la mort de l’animal, le nom se transforma en Osirapis, puis en Sérapis. L'apparition de ce dieu se situe sous le règne de Ptolémée Ier qui souhaita doter sa capitale -Alexandrie- d’un dieu poliade, auquel furent attribués un aspect chtonien et des vertus guérisseuses et de fertilité. Sérapis est un dieu composite, réunissant les caracéristiques de plusieurs divinités égyptiennes et hellénistiques : Osirapis pour la mythologie égyptienne, Zeus, Hélios, Dionysos, Hadès et Asklépios pour la théogonie grecque. Son lieu de culte principal se situe à Alexandrie où un temple, le Sérapéum, fut construit dès le début de la dynastie des Ptolémée dans le quartier indigène de Rhakôtis. Il a été détruit en 389 après J.-C. sous le règne de l’empereur Théodose. Le culte de Sérapis se répandit largement dans le monde gréco-romain. En témoigne l'inscription mentionnant l'existence d'un temple dédié, retrouvée sur le site romain d'Eburacum, actuelle ville de York en Angleterre (WILKINSON Richard H., The Complete Gods and Goddesses of Ancient Egypt, Londres, 2003, « Serapis » p. 128).

 

Quoique sa parèdre Isis soit une divinité purement égyptienne, Sérapis conserva une identité grecque. Son iconographie en témoigne : les cheveux bouclés, la barbe bifide, la toge plissée, le déhanché et les traits du visage sont typiques de la culture hellénistique. Couronné du calathos, il tient parfois une corne d’abondance, remplie de fleurs et de fruits représentant ainsi richesse et fertilité. 

 

De par sa taille, sa forme et la bélière à l’arrière du calathos, Co. 1369 était très probablement porté en pendentif par un croyant, objet sacré marqueur de sa dévotion, ou était l'insigne d'un prêtre. Sans connaissance de sa provenance, il peut également être envisagé comme une applique de mobilier.

 

 

Sérapis étant une divinité populaire et présente sur l’ensemble du territoire romain, un certain nombre de représentations nous sont aujourd’hui connues. En revanche, il s’agit plus généralement de figuration en terre cuite, en pierre ou en métal précieux, notamment les bagues en or et argent. En voici quelques exemples :

Penn Museum, Philadelphie : E2520 (terre cuite), 29-71-560 (terre cuite), 81-22-3 (marbre), E11633 (terre cuite). 

British Museum, Londres : 1824,0469.1.

Museo egizio di Torino, Turin : Provv. 0167 (terre cuite).

MMA, New York : 53.191.2 (or et argent), 49.159.1 (bague en or et argent).

Walter Art Museum, Baltimore : 54.1624 (bague en bronze), 57.1524 (médaillon en or).   

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Les collections du musée Rodin conservent les œuvres Co. 1434 et Co. 1462 qui sont également des figurations de Sérapis sous forme de bustes utilisés probablement comme pendentif. L’œuvre Co. 1230 est aussi la représentation du dieu Sérapis mais debout portant une corne d’abondance.

Inscription

Anépigraphe. 

Historic

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

 

Donation à l’État français en 1916.

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Harpocrate

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE

ÉPOQUE ROMAINE > 30 avant J.-C. – 395 après J.-C. 

[voir chronologie]

BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)

H. : 11,3 cm ; L. : 4,7 cm ; P. : 2,5 cm 

Co. 1455

Comment

State of preservation

L’œuvre est en mauvais état de conservation. Le métal est très oxydé, les détails sont patinés par le temps. Le pied droit, les orteils du pied gauche et l’extrémité de la main gauche ont disparu dans une cassure. De la terre de fouille semble incrustée dans les plis, en particulier à l’arrière du personnage. Des stigmates d’un ancien montage à base de plâtre sont visibles an niveau des pieds. Cette matière plâtreuse apparaît en éclaboussure à la partie arrière de la corne d’abondance.

Description

La statuette figure la divinité Harpocrate. Il se tient debout, le pied gauche légèrement en avant créant un déhanché vers la droite. Son bras droit est replié vers son visage pour pouvoir poser l’index sur ses lèvres, signe de jeunesse selon l’iconographie égyptienne. Une corne d’abondance, dans laquelle fruits et fleurs représentent l’opulence de la vie, repose sur le bras gauche. Sa main retient l’extrémité pointue de cette corne. S’appuyant le long du bras du dieu, cette corne d’abondance s’étire jusqu’au niveau du visage.

Harpocrate est coiffé d’une chevelure bouclée de style romain, laquelle est surmontée de la couronne de Haute et Basse-Égypte, le pschent. Cette couronne, unique attribut égyptien de cette statuette, est de dimensions particulièrement modestes, comme posée à l’avant du crâne du personnage. Harpocrate est entièrement nu. Son cou est paré d’un collier finissant par un imposant médaillon, aux détails aujourd’hui indiscernables. Il serait vraisemblablement comparable au collier de la statuette Co. 1211

Le visage d’Harpocrate est ovale. Ses grands yeux encadrent un large nez qui surmonte une bouche presque entièrement fondue dans le métal. L’état de conservation actuel de l’œuvre ne permet pas de donner plus de précisions quant aux traits du visage. Pour ce qui est du corps, le cou est court et se mêle avec la masse du buste. Les épaules, étroites et tombantes, se poursuivent sur des bras lourds. Le buste est large. Les subtilités de modelé, notamment au niveau des pectoraux, du bas-ventre et du nombril, ne sont plus visibles. La taille n’est pas marquée contrairement aux fessiers ronds et aux parties génitales enfantines, rendues sous forme de boursouflures. Les jambes potelées sont légèrement tordues. Le genou gauche, axé vers l’intérieur pour ajouter à l’effet du déhanchement, adopte une position peu naturelle. Les deux pieds ont disparu et leur emplacement est enduit d’une matière plâtreuse moderne, stigmates d’une installation sur un système de présentation.

 

Harpocrate est une divinité bien connue dans l’art égyptien. Son nom égyptien Horpakhered, « Horus l’Enfant », a été transcrit par les grecs en Harpocrate. Sa première attestation date de la XXIe dynastie et sa première représentation de l’an 22 de Chéchanq III sur une stèle commémorant une donation pour le « flûtiste d’Harpocrate » (cf. FORGEAU Annie, Horus-Fils-d’Isis, La Jeunesse d’un dieu, BdE 150, Le Caire, 2010, p. 308).

Harpocrate est, à l’époque de sa création, Khonsou-l’enfant, fils d’Amon et de Mout et fait partie de la triade divine thébaine. Il devient ensuite un dieu à part entière, c’est-à-dire Horus l’Enfant, fils d’une union posthume entre Osiris et Isis. Enfant royal, son front est décoré d’un uraeus. Le dieu Seth, son oncle, cherchant à le tuer afin d’acquérir le pouvoir dont il doit hériter de son père, Harpocrate est élevé dans les marais de Khemnis, à l’abri de Seth. De par son histoire, il obtient une double symbolique, il est à la fois le nouveau soleil du matin et l’héritier divin qui doit succéder à son père, ce qui fait de lui le représentant et la représentation idéale du roi. Les pouvoirs divins qui lui sont attribués évoluent rapidement. En effet, d’après sa mythologie, sa mère Isis l’aurait guéri d’une piqûre de scorpion. Il obtient ainsi des capacités guérisseuses et protectrices face aux animaux dangereux comme le montre les stèles dites d’« Horus sur les Crocodiles ». Sur ce type de stèle, on peut voir Horus enfant maitrisant de chaque main un animal considéré comme dangereux, tels que les lions, les serpents ou les scorpions. On peut également mentionner Nepri, dieu du grain et de la moisson, qui peut être représenté nu avec un doigt à la bouche. Harpocrate, qui possède la même iconographie, devient alors un dieu de la fertilité lié à Min et aux cultes agraires.

L’iconographie égyptienne d’Harpocrate, dieu populaire à la fin des temps égyptiens, est simple et reconnaissable. Il s’agit d’un enfant nu portant la mèche de l’enfance du côté droit du crâne et généralement l’index à la bouche. Il peut être debout, assis sur un trône, sur une fleur de lotus ou sur les genoux d’une déesse qui l’allaite. Ses coiffes varient selon la divinité qu’il représente et c’est pourquoi, en plus de son iconographie infantile, il est l’image de tous les fils des triades divines et est ainsi naturellement distingué comme protecteur des enfants. De par son aspect juvénile caractéristique, nudité et attitude naïve du doigt sur la bouche, bonnet enserrant le crâne avec mèche de l’enfance, proportions des parties génitales, et enfin rondeur des joues et du ventre, Harpocrate devint l’image de tous les dieux enfants d’un panthéon égyptien de plus en plus sophistiqué. Les très nombreuses statuettes en terre cuite ou en bronze datant de l’époque hellénistique et romaine attestent de la popularité de son culte dont l’apogée se situe durant le IIe siècle de notre ère. Ici, avec l’œuvre Co. 1455, Harpocrate arbore une iconographie romaine. En effet, la corne d’abondance, réservée au dieu Hâpi en Égypte ancienne, ainsi que les boucles de cheveux et le déhanché sont clairement attribuables à l’époque romaine. 

 

Enfin, notons que les auteurs classiques ont mal interprété le geste du doigt sur la bouche et l’ont compris comme étant « un symbole de discrétion et de silence », interprétation reprise par la suite par les ésotériques. En aucun cas cette attitude fait mention d’un quelconque respect des dieux par le silence. Ce geste de placer le doigt sur la bouche pour marquer le silence est un geste de notre époque et de notre culture et ne peut pas être appliqué aux égyptiens anciens. L’attitude d’Harpocrate est simplement l’image de l’enfance comme l’est la mèche tressée sur le côté du crâne. 

 

Les statuettes d'Harpocrate présentant une iconographie romain sont relativement répandues. On peut citer quelques exemples dans les collections des musées, notamment au Musée du Louvre (Br335, Br1064), au British Museum (1772,0302.164, 1772,0302.163, EA36077, 1814,0704.937, 1896,0724.1), au Penn Museum de Philadelphie (30-62-3), ou encore au Brooklyn Museum (47.87).

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Les collections du musée Rodin conservent une autre statuette en bronze du dieu Harpocrate sous une iconographie romaine, Co. 1211

Inscription

Anépigraphe. 

Historic

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

BOREUX 1913 : Meudon / pavillon de l'Alma / vitrine 8, 355, "Harpocrate debout, coiffé de l'atef, les pieds manquent. Haut. 12 cent. Estimé vingt francs."

Donation à l’État français en 1916.

Historic comment

L'objet fut exposé dans une vitrine du pavillon de l'Alma à Meudon, là où Charles Boreux le décrivit à l’été 1913 dans l’inventaire qu’il fit en vue de la donation à l’État français.

 

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Amon marchant

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE

ÉPOQUE TARDIVE OU ÉPOQUE PTOLÉMAÏQUE > XXVIe– XXXIdynastie > 656-30 AVANT J.-C.

[VOIR CHRONOLOGIE]

BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)

H. : 7,2 cm ; L. : 1,5 cm ; P. : 1,7 cm  

Co. 1461

Comment

State of preservation

L’œuvre est en mauvais état de conservation. 

Le métal est très oxydé et corrodé. Il manque le bras droit, le haut de la couronne et tous les détails anatomiques et iconographiques sont aujourd’hui illisibles car très patinés. 

Description

Cette statuette en bronze figure le dieu Amon, les bras le long du corps, dans la position de la marche apparente, c’est-à-dire la jambe gauche en avant. Il se tient debout sur une petite base d’où émerge en-dessous un tenon métallique permettant à l’origine de placer la statuette dans un socle plus grand. 

Amon est coiffé de sa couronne habituelle. Elle se compose d’un mortier cylindrique au bord supérieur légèrement évasé, surmonté de deux hautes plumes droites. On note encore aujourd’hui, sur le devant des plumes et à leur base, le profil d’un disque solaire. La barbe postiche divine qui prolongeait son menton a presque entièrement disparue. Aucun autre détail n’est discernable sur cette œuvre. Il est possible de comprendre qu’Amon est vêtu d’un pagne chendjit court et que ses deux mains sont posées à plat le long des cuisses. 

 

Amon est un dieu dynastique, seigneur de Karnak à Thèbes et de nombreux autres sanctuaires. De tous les dieux du panthéon égyptien, Amon fut certainement celui qui acquit une renommée sans contexte en obtenant le rang très prestigieux de dieu dynastique. C’est à partir du Moyen Empire, sous le règne d’Amenemhat Ier, fondateur de la XIIedynastie, qu’Amon devient le roi des dieux et donc « Amon, roi des dieux, maître des trônes du Double Pays ». 

Les égyptiens tirèrent partie de son nom, qui signifie « le caché », pour élaborer une théologie digne d’un dieu dynastique. Il emprunte donc certains éléments de cultes voisins, notamment ceux des dieux héliopolitains. En effet, dans un passage des Hymnes d’Amondu Papyrus de Leyde, il est écrit : « Son nom est caché en tant qu’Amon, il est Rê par le visage ; son corps est Ptah » (I 350). On fit de lui un dieu primordial et éternel, responsable de toute création et on le plaça à la tête d’une grande ennéade, l’ogdoade d’Hermopolis, son double féminin Amonet et lui régnant dans la tradition hermopolitaine. 

Amon était aussi associé à la fertilité de par ses prérogatives fondatrices du monde. Il adopte alors la forme ithyphallique de Min et prend le nom d’Amon-Min-Kamoutef. Il porte sous cette forme un vêtement momiforme d’où s’échappe son phallus érigé, figurant la virilité créatrice, et peut parfois avoir la peau noire (voir la figurine en bois musée Rodin Co. 2451). 

En tant qu’Amon-Rê, seigneur des temples de Karnak, que tous les rois depuis le Moyen Empire ont cherché à embellir et agrandir, il est représenté avec la peau bleue, couronné d’un mortier surmonté de deux hautes plumes droites. Il peut être aussi criocéphale ou de façon plus rare prendre la forme de ses animaux sacrés, le bélier aux cornes recourbées et l’oie du Nil. Avec Mout, sa parèdre, et Khonsou leur enfant, ils forment la triade thébaine qui se compte parmi les plus importantes de la théologie égyptienne. À l’est de son grand temple de Karnak, il possédait un sanctuaire d’« Amon-qui-écoute-les-prières » où il répondait aux suppliques et rendait des oracles comme en témoignent les « stèles à oreilles » que lui adressaient ses fidèles. 

Malgré ces formes les plus communes, Amon peut se manifester sous bien d’autres figurations. Il est parfois léontocéphale, sous la forme d’un faucon ou d’un criosphinx. 

Son culte, qui avait été placé au premier rang par les rois koushites, déclina quelque peu après le sac de Thèbes par les Assyriens, bien qu’à l’époque gréco-romaine il soit toujours identifié à Zeus. 

 

Il est possible de suggérer à la statuette Co. 1461 un rôle d’offrande et d’intercesseur avec le dieu, déposée par un dévot dans l’un des nombreux centres de culte d’Amon afin d’obtenir ses faveurs. Les pieds de la statuette ont été enchâssés à une époque proche de son arrivée dans la collection dans une matière céramique rosâtre, repeinte en couleur bronze noir.

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Les collections du musée Rodin conservent l’œuvre Co. 5611 qui présente la même iconographie et les mêmes dimensions que Co. 1461. 

Inscription

Anépigraphe. 

Historic

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

BOREUX 1913 : Meudon / atelier Tweed / vitrine 9, 377, "Amon debout. Le haut de la coiffure et le bras droit manquent. Haut. 7 cent. Sans valeur."

Donation Rodin à l'État français 1916.

Historic comment

Du vivant de Rodin, l'objet était exposé dans une vitrine de l'atelier Tweed à Meudon.

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Egypte > Provenance inconnue

Basse Époque

[VOIR CHRONOLOGIE]

H. 4,7 CM : L. 1,3 CM : P. 0,9 CM 

Pierre noire

Co. 2405

Comment

State of preservation

L'œuvre est en mauvais état de conservation. La figurine est cassée au niveau des genoux et la partie haute de la couronne est manquante. A l’arrière de son crâne, on observe les vestiges d’une bélière, elle aussi cassée. La face antérieure de la figurine est nettement plus patinée que la face postérieure.

 

Description

Cette figurine anthropomorphe à tête de faucon représente un dieu en position de marche, jambe gauche en avant. Bras reposant le long du corps, ses poings, serrés, sont collés aux cuisses. Une perruque longue, tripartite et aux mèches précisément matérialisées, recouvre sa tête. La figurine est coiffée du némès sur lequel repose un haut pschent, couronne matérialisant l’union de la Haute et de la Basse Égypte. A l’arrière du crâne, les vestiges d’une bélière, cassée, subsistent. Bien que le métal soit très patiné à l’avant de la figurine, les traits de la tête sont visiblement ceux d’un rapace. La silhouette du dieu est athlétique (corps droit, torse élancé, bras musclés, hanches fines, nombril soigneusement creusé sur un ventre ferme) et son pas décidé. Il est vêtu d’un pagne soigneusement plissé, retenu par une ceinture simple. Le rendu oblique des plis verticaux du tissu répond au mouvement de la marche du dieu. 

 

Représentation à l’effigie d’un dieu faucon, la figurine Co. 2405 correspond le plus probablement à une forme d’Horus. Horus, dont le nom égyptien Herou signifie « le lointain, le distant », est une des divinités principales de la cosmogonie égyptienne. Il apparait dans la documentation dès l’époque Prédynastique en tant que divinité solaire et patron de la ville de Nekhen, nom égyptien de Hierakonpolis qui signifiait en grec « la ville du faucon ». C’est de cette ville de Nekhen que les premiers rois d’Egypte, unificateurs du pays, étaient originaires. Horus dieu de Nekhen, et appelé parfois Horus l’Ancien, devint de fait le patron du royaume et, par extension, de la monarchie égyptienne. Horus se retrouve dans les mythes osiriens, en tant que fils du couple divin Isis et Osiris, conçu après que sa mère ait réuni le corps coupé en morceaux de son époux par son Seth, frère jaloux d’Osiris. Elevé par sa mère à l’abri de son oncle, Horus livre un combat acharné contre Seth qu’il finit par remporter. Horus incarne dès lors le fils qui lave l’honneur de son père et devient la figure emblématique de l’héritier royal et donc du roi égyptien. Au Ier millénaire avant notre ère, Horus bénéficiera des prestigieux cultes d’Osiris (voir COULON, 2005, p.1-23 et COULON, 2011, p.21-24) et d’Isis auxquels il sera associé. Si Horus enfant, ou Harpocrate, fait l’objet d’un culte à part entière, l’aspect adulte d’Horus, incarné par un homme hiéracocéphale couronné comme sur la figurine Co. 2405, est étroitement associé à ses deux parents. On retrouve un certain nombre de ses représentations dans des compositions où les trois divinités apparaissent en triade, à l’instar de la triade osirienne E4291 conservée au musée du Louvre. On remarque que le dieu y est représenté dans la position de la marche et paré des attributs de la royauté. L’Horus adulte, incarnation de la royauté, souligne également aux époques tardives la passion endurée par Osiris.

 

La figurine Co. 2405 s’inscrit donc dans les pratiques religieuses du Ier millénaire avant notre ère. Correspondant à un type d’objet souvent retrouvé dans des sanctuaires,  elle répondait très probablement aux fonctions attendues d’un ex-voto.

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Inscription

Anépigraphe. 

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Harsiésis assis

Egypte > Provenance inconnue

Basse Époque > XXVIE - XXXIe dysnatie > 656 - 332 avant J. C.

[VOIR CHRONOLOGIE]

H. 3,5 CM : L. 0,9 CM : P. 1,1 CM 

Bronze

Co. 2404

Comment

State of preservation

L'œuvre est en mauvais état de conservation. Le métal est très oxydé et patiné. Des concrétions de terre de fouilles remplissent toutes les cavités de la figurine. L’aspect général empêche de distinguer les détails anatomiques ainsi que les détails du couvre-chef de la figurine. L'oeuvre est cassée sur l’angle droit de la couronne. La bélière, moulée à l’arrière de la coiffe, est brisée.

 

Description

Cette figurine représentant un dieu enfant assis, les bras tombant le long du corps, les pieds reposant sur une petite base. L’enfant est nu, jambes jointes et son appareil génital, bien visible, est celui d’un enfant. Ses deux mains sont collées de chaque côté des jambes. Il est coiffé d’un némès sur lequel repose une couronne de type hem-hem ou atef. Les deux pans du némès reposent sur son torse et la natte de tissu torsadée dans son dos, entre ses omoplates. Les traits du visage sont illisibles. Il est possible de restituer qu’il s’agit de l’image d’un enfant allaité, car le corps du jeune dieu est nettement incliné vers l’arrière, à l’instar des groupes statuaires où Isis soutient la tête du nourrisson. Au revers, les omoplates sont nettement saillantes et les fessiers soigneusement moulés. Le numéro d’inventaire actuel est inscrit à l’encre blanche, au revers, sur la base et les mollets.

 

Hors contexte archéologique et sans inscription, il est toujours difficile de déterminer l’identité d’un dieu-enfant, mais de part la couronne qui surmonte sa tête, la figurine Co. 2404 représenterait Harsiésis, forme particulière du dieu Horus (sur la forme d’Horus-fils-d’Isis (Harsiésis), voir CORTEGGIANI 2007, p. 177-178 et FORGEAU 2010). Si quelques dieux enfants sont connus dès les premiers siècles de l’Antiquité égyptienne, comme Ihy, Khonsou ou bien Nefertoum, leur importance augmente de façon significative dès le début de la Troisième période intermédiaire. Cette popularité est due aux forces qu’ils incarnent telles que la fécondité, la maternité, la succession filiale, la joie, la protection des membres de la famille. Elle s’est concrétisée dans une nouveauté architecturale, apparue à la Basse Epoque et devenue progressivement une des annexes des sanctuaires principaux, le mammisi. Le mammisi est une copie en pierre des bâtiments civils réservés aux naissances. Il symbolise la place fondamentale qu’occupent désormais les triades divines composées d’un dieu père, d’une déesse mère et d’un dieu enfant. Ce mammisi transpose dans le monde divin l’idéologie royale qui impose que le roi ait été engendré par Amon, assurant ainsi la légitimité divine du souverain. Dans tous les mammisis, le géniteur divin est toujours Amon, permettant ainsi que se perpétue la lignée royale.
 

La figurine Co. 2404 s’inscrit dans les traditions de la piété populaire de la fin de l’Antiquité égyptienne. Deux éléments laissent à penser qu’il s’agit plutôt d’une amulette représentant un dieu enfant allaité seul. D’une part, les vestiges d’une bélière subsistent à l’arrière de la couronne, suggérant que la figurine Co. 2404 était destinée à être suspendue seule. D’autre part, les rondeurs des fessiers de l’enfant ont été très soigneusement moulées, ce qui exclurait la fixation de l’enfant sur les genoux de sa mère. Un troisième indice vient appuyer cette hypothèse : les pieds de l’enfant ne sont pas ballants, ce qui est le cas de la plupart des compositions comportant Horus installé sur les genoux d’Isis (voir, pour comparaison le Co. 209). Les pieds de la figurine Co. 2404 reposent au contraire sur une petite base, or, en Egypte ancienne, l’image d’une divinité était toujours solidement posée sur le sol (voir, pour comparaison la statuette en bronze de la déesse Neith Co. 797). Ce type de figurine ayant été souvent retrouvé dans des sanctuaires, le petit bronze Co. 2404 correspondrait plus probablement à un ex-voto, vraisemblablement représentant le dieu Harsiésis.

Inscription

Anépigraphe. 

Historic

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

Donation Rodin à l’ État français en 1916.

 

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Nefertoum marchant

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE

TROISIÈME PÉRIODE INTERMÉDIAIRE OU ÉPOQUE TARDIVE > XXI– XXXdynastie > 1059 - 332 AVANT J.-C.

[voir chronologie]

BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)

H. : 9,3 cm ; L. : 1,9 cm ; P. : 2,9 cm 

Co. 5782

Comment

State of preservation

L’œuvre est en mauvais état de conservation.

Le métal oxydé a patiné les détails anatomiques. Toute la surface de la statuette est rugueuse, particulièrement la partie basse à partir du ventre. L’espace qui séparait les bras et le buste est aujourd’hui bouché de corrosion. 

Description

L’œuvre représente le dieu Nefertoum debout sur une petite base fine et rectangulaire, dans la position de la marche apparente, c’est-à-dire le pied gauche en avant. Un tenon sous la base permettait l’insertion de l’œuvre dans un système de soclage plus grand. Les bras du dieu sont positionnés le long du corps, les avant-bras serrés sur ses hanches, les mains aux doigts repliés serrant probablement le mekes. Nefertoum est coiffé d’une perruque tripartite imposante, striée verticalement. La coupe de cette perruque est précise, s’arrêtant au même niveau que la barbe postiche sur la face avant, et sur les omoplates sur la face arrière. La perruque, qui laisse à découvert les oreilles, est ornée d’un large uraeus frontal et est surmontée d’une couronne complexe. Celle-ci se compose d’une grande fleur de lotus, dont seul le sommet des pétales est encore discernable, maintenue droite sur le crâne du dieu par deux contrepoids du collier menat la serrant sur ses côtés. Si les détails de ces contrepoids sont illisibles, un parallèle de cette statuette, conservé au musée de Mariemont, permet d’en reconstituer l’image et la fonction, liées à la déesse Bastet dont Nefertoum est parfois le fils (Inv. AC.347.B, cf. Claire DERRIKS, « Nefertoum passant », in Cl. Derricks, L. Delvaux (éd.), Antiquités égyptiennes au Musée Royal de Mariemont, Morlanwelz, 2009, p. 162-163). Le lotus est couronné de deux hautes plumes séparées verticalement par un sillon, qui semblent rapportées vu l’état de corrosion à leur base. À l’arrière du lotus, une bélière est conservée. Elle permettait de suspendre la statuette, accrochée sur une surface ou bien placée en collier autour du cou d’un prêtre ou d’un dévot. Enfin, Nefertoum est habillé d’un pagne chendjit simple et court dont le croisement des pans de tissus est encore visible sur le devant des cuisses. Si le dieu était paré de bijoux, aucune trace de ces ornements n’est aujourd’hui perceptible.

Nefertoum est figuré avec un visage ovale aux joues pleines. L’état de conservation de l’œuvre ne permet pas de donner de description précise de la face, seul le creusement des yeux qui annonce le profil du nez est encore observable. De plus, les oreilles, bien en place de part et d’autre des joues, sont petites et rondes. Les épaules du dieu, horizontales et larges, sont carrées. Elles se poursuivent sur des bras de longueur naturelle. Le pli du coude y a été dessiné. Ces bras encadrent un buste taillé en V sur lequel nous pouvons voir le modelé des pectoraux, la fente stomacale et le nombril. La taille est marquée au-dessus de hanches, elles aussi de largeur naturelle. Les muscles fessiers sont légèrement en relief. Les jambes sont relativement courtes et présentent des genoux resserrés, mettant en avant le galbe des cuisses et des mollets. Les pieds, traités selon l’iconographie égyptienne, sont longs et plats. De simples stries séparent les orteils. 

 

Le traitement du corps, notamment les joues pleines, les épaules carrées, la taille marquée, la présence du pli du coude, le dessin des pectoraux et le sillon stomacal, suggère une manufacture inspirée du Nouvel Empire. Cette statuette Co. 5782 pourrait donc dater de la période suivante, c’est-à-dire de la Troisième Période intermédiaire, durant laquelle les influences iconographiques ramessides étaient toujours en vogue. 

 

Nefertoum est associé à plusieurs mythes égyptiens de la création du monde. Il est le dieu juvénile émergeant de la fleur de lotus bleu (Nymphaea cerulea) jaillissant des eaux primordiales d’où le soleil surgira. 

Dans le chapitre 266 du "Textes des Pyramides", il est appelé « le lotus au nez de Rê ». Nefertoum a alors un lien étroit avec Rê, dieu solaire, à tel point qu’à une époque tardive, il sera parfois associé à Horus, fils de Rê. Le lotus le lie également aux parfums et onguents, devenant ainsi dieu des parfums bien qu’il s’agisse d’une prérogative secondaire. Dès les "Textes de sarcophages", il fait partie de la triade memphite avec son père Ptah et sa mère Sekhmet. À Bouto, il est fils de la déesse-cobra Outa ou de Bastet. C’est pourquoi il est parfois représenté avec une tête de lion, rappelant son association avec Sekhmet, ou sur le dos d’un lion (voir notamment au Metropolitan Museum of Art un lion faisant partie d’une amulette de Nefertoum, 04.2.374, et Nefertoum sur une amulette de lion, 17.194.2442.

Dans le chapitre 125 du "Livre des morts", il est chargé de punir les damnés en faisant partie du conseil des juges. Là encore, son affiliation avec la déesse féline et féroce est rappelée par son caractère répressif et potentiellement nuisible. Des amulettes étaient ainsi données aux nouveaux nés pour les protéger de Nefertoum. À l’inverse, certaines amulettes offraient sa protection. La statuette Co. 5782 agirait donc dans ce sens. 

 

Bien que Nefertoum soit une divinité des monuments royaux et divins, et qu’il ne possède pas de lieu de culte propre, les statuettes à son effigie étaient courantes. Au Museo egizio de Turin, deux œuvres datent de l’Époque Tardive, Cat. 206 et Cat. 215. Au Musée du Louvre, une très belle œuvre date de la Troisième Période intermédiaire, E 10665. Le British Museum conserve de nombreux exemples, notamment du dieu serrant contre sa poitrine un sceptre kheprech, EA64480 ou EA22921. De très beaux exemples sont également conservés au Metropolitan Museum of Art à New York, avec ou sans le kheprech, respectivement 10.175.131 et 04.2.455

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Les collections du musée Rodin ne conservent que cet exemple de statuette en bronze du dieu Nefertoum. 

Inscription

Anépigraphe. 

Historic

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

 

Donation à l’État français en 1916.

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