Divine adoratrice ?

Tête provenant d'une statue

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE > Probablement Thèbes

TROISIÈME PÉRIODE INTERMÉDIAIRE > XXIe– XXVIedynastie > 1069 - 656 AVANT J.-C.

[voir chronologie]

BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)

H. : 5,6 cm ; L. : 4 cm ; Pr. : 3,1 cm 

Co. 2434

Comment

State of preservation

L’œuvre présente un très mauvais état de conservation. 

D’une statuette de femme, seule la tête est conservée, surmontée d’une couronne rapportée de type mortier. D’après la cassure, la tête semble avoir été arrachée du corps. Tout le fragment est extrêmement oxydé, les détails patinés. Au côté gauche de la tête, un impact a attaqué le métal. La couronne est également patinée. Des cassures sont visibles à son sommet, ainsi que des concrétions de métal sur son pourtour. 

Related pieces

Le fragment Co. 2434 est à replacer dans une statuette de femme. Il ne reste aujourd’hui que la tête, surmontée d’une couronne. La tête est brisée à la base du cou, laissant apparaître l’amorce du trapèze droit. 

 

Le visage de la femme est rond, aux traits pleins. Elle est coiffée d’une perruque épaisse, en forme de boule. Composée de longues mèches tressées finement, celle-ci encadre le visage. La frange descend bas sur le front. Contrairement à ce que l’on peut retrouver sur des statuettes féminines de ces époques, notamment la statue n° 210 du Musée archéologique national d’Athènes représentant Takousit, sur laquelle les pointes de la perruque suivent la forme du visage jusqu’à se fondre sur les mâchoires, ici avec l’œuvre Co. 2434, la perruque s’arrête net en-dessous des oreilles et à la base du crâne formant un angle droit, de la même manière que la perruque de la statuette conservée au British Museum EA43373 ou la statue de Karomama du Musée du Louvre N 500

 

Une couronne surmonte la coiffe. Elle est faite d’un métal différent de la tête et ne semble pas avoir créé pour cette statuette en particulier. De forme ovale et de hauteur relativement élevée, son pourtour est décoré d’une succession de carrés en creux vraisemblablement destinés à accueillir des incrustations précieuses. La base de la couronne est ornée de petites lignes verticales. Enfin, une languette de métal vient finir le sommet de la couronne, qui pourrait être le vestige d’un uraeus. La couronne est maintenue à la tête grâce à une barre métallique traversant deux bélières sur le sommet du crâne. Sur l’œuvre du British Museum EA37162, une couronne surmonte également une figure féminine présentant le même type de perruque solidaire de la tête et non rapportée. L’œuvre du Penn Museum de Philadelphie E14310 présente également une couronne cylindrique. Il est également possible d’y voir le vestige d’un disque solaire prolongeant, voir par exemple les figurines n° 347 conservée à Londres au University College et 36076 du British Museum (cf. ROEDER Günter, Ägyptische Bronzefiguren, Berlin, 1956, p. 320, § 404, Abb. 413-414).

Ce style de perruque tressée bouffante est caractéristique de l’époque post-amarnienne. On l’a retrouve le plus souvent sur des œuvres de la Troisième Période intermédiaire et de l’Époque Tardive portées par les Divines Adoratrices d’Amon, également appelées Divines Épouses. Les exemples présentés plus haut sont tous des figurations de ce type de prêtresse et datent de ces deux périodes. 

 

Dès le début du Ier millénaire, à la fin des règnes des Ramessides, période troublée politiquement, on voit apparaître de nombreuses modifications dans le domaine religieux, notamment l’évolution de l’importance et du pouvoir du clergé d’Amon. L’apparition de Grands Prêtres d’Amon, connus également sous le nom de Prophètes, s’accompagne de l’émergence d’un clergé féminin, les Divines Adoratrices, ou Épouses. Ce titre désigne une prêtresse qui entretient le dieu dans sa puissance, sa fertilité et dont la participation est requise dans les principaux rites de purification, d’offrande et d’envoutement pratiqués. De par ce service cultuel apaisant la divinité, elles assurent la fertilité du Nil et le maintien de l’ordre cosmique. Bien que la majorité des Divines Adoratrices officiait à Thèbes en tant qu’épouse d’Amon, elles pouvaient être associées à toutes femmes de dieu telles qu’Isis, Hathor, Ouaset ou encore Opet.

À la XVIIIdynastie, ce titre est déjà utilisé mais qualifie les dames qui devaient suppléer aux reines et aux princesses dans leurs obligations rituelles. Jusqu’à la fin du Nouvel Empire, il n’est donné qu’aux femmes de sang royal, la dernière connue ayant reçu ce titre est une fille de Ramsès VI, Isi. 

À la XXIdynastie, sous le règne de Maâtkarê, l’avènement d’une nouvelle prêtresse s’accomplit par un couronnement (voir par exemple le relief dans la chapelle d’Osiris Héqadjet à Karnak de la Divine Adoratrice Chépénoupet Irecoiffée de deux doubles couronnes) et la fixation d’une titulature dans un cartouche, ce qui leur confère une supériorité et un attribut théologique sans précédent. C’est aussi à cette période qu’un troisième privilège royal leur est accordé, la présence d’un uraeus frontal sur leurs oushebti. Ces éléments autrefois réservés uniquement au roi, placent la Divine Épouse comme égale du souverain. Elle est ainsi représentée face aux dieux sur les reliefs des temples pour y accomplir la quasi-totalité des prérogatives royales liturgiques. Cette fonction se transmet alors par héritage, les filles deviennent prêtresse après leur mère (cf. GOMBERT-MEURICE Florence, PAYRAUDEAU Frédéric (dir.), Servir les dieux d’Égypte. Divines adoratrices, chanteuses et prêtres d’Amon à Thèbes, Catalogue d’exposition, Musée de Grenoble, 25 octobre 2018 – 27 janvier 2019, Paris, 2018, p. 272, fig. 1). On voit ainsi apparaître une dynastie de prêtresses entièrement consacrées au dieu par leur vie et leur célibat. Elles possèdent une cour et des biens matériels conséquents et au fil du temps jouent un rôle de plus en plus important dans les affaires diplomatiques et politiques. 

 

L’œuvre Co. 2434 serait une figuration d’une Divine Adoratrice, ou plus simplement d’une chanteuse d’Amon, c’est-à-dire une des membres de la cour de la prêtresse en fonction. 

Inscription

Anépigraphe. 

Historic

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

BOREUX 1913 : Meudon / pavillon de l'Alma / vitrines 23 et 24, 531, "Lot de petits bronzes sans intérêt ou très suspects. Trois pattes d'oisaeux (Ibis ?), un bras humain replié, une égide, une situle, une tête à perruque ronde surmontée d'une douille, un Khonsou et un dieu hiéracocéphale en tout 9 pièces. Sans valeur."

Donation à l’État français en 1916.

< Back to collection

Isis ailée

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE

ÉPOQUE TARDIVE OU ÉPOQUE PTOLÉMAÏQUE

[VOIR CHRONOLOGIE]

BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)

H. : 9,4 cm ; L. : 3,8 cm ; Pr. : 2,5 cm 

Co. 2430

Comment

State of preservation

L’œuvre est en très mauvais état de conservation.

Extrêmement oxydée et corrodée, les détails sont aujourd’hui illisibles. Les pieds et une grande partie des bras, notamment le bras gauche, sont de plus manquants. Les ailes sont aussi très détériorées. De larges plaques de matière ont disparu, particulièrement sur le devant des jambes et sur le côté gauche du visage. 

Description

L’œuvre Co. 2430 figurait sans doute la déesse Isis, debout, les jambes jointes, les bras légèrement levés vers l’avant et détachés du corps. Deux longs pans de matière semblent correspondre à des ailes étendues le long des bras, comme sur l'oeuvre Brooklyn Museum inv.no. 36.567E par exemple. On peut d’ailleurs encore deviner leurs attaches dans le dos et l’amorce des ailes le long des fessiers puis des jambes.

 

La déesse était coiffée d’une perruque tripartite, ornée d’un uraeus frontal et surmontée d’un modius. Cellui-ci était peut-être, à l’origine, couronné d’un disque solaire flanqué de cornes de vache. Ces attributs font traditionellement partie de ceux de la déesse et sont présents sur d’autres figurines d’Isis ailées, telles que celles du Musée du Louvre (inv.no. E.4322) ou du British Museum (inv.no. EA11135). La déesse semble avoir été vêtue d’une longue robe moulante descendant jusqu’aux chevilles, aujourd’hui manquantes. Le visage et le modelé du corps sont extrêmement détériorés : mis à part la silhouette de la poitrine, plus aucun détail n’est discernable. Enfin, une large bande de métal paraît avoir été arrachée devant les jambes. Cette perte de matière pourrait être le témoignage de la présence initiale d’une autre figurine pressée contre Isis et protégée par ses ailes. 

Les représentations d'Isis en bronze sont très fréquentes aux époques tardives, en particulier celles d'Isis allaitante. La statuette Co. 2430 appartient très probablement au groupe des Isis ptérophores protégeant de ses ailes une autre divinité debout ou assise. Il s'agit le plus souvent d'Osiris momifié, comme pour l'oeuvre Louvre E.3722, ou les statuettes EA60991 et EA12588 du British Museum. Isis aurait ainsi pu être accompagnée de son fils Horus ou Harpocrate (l’Horus-enfant) ou de son mari Osiris, avec lesquels elle forme la triade d’Abydos.

Sœur-épouse d’Osiris et déesse magicienne puissante, Isis est, très tôt dans l’histoire égyptienne célébrée comme déesse-mère par excellence. Son fils Horus est en effet issu de l’union posthume avec Osiris, démembré par son frère Seth. À partir de la Basse-Époque, son culte individuel gagne en puissance et la démarque peu à peu du mythe osirien et de ses aspects funéraires. Dans la dévotion populaire, elle est de plus en plus étroitement associée à Hathor, déesse-vache nourricière à qui elle est souvent associée. Elle reprend ainsi les attributs d’Hathor, notamment les cornes de vache flanquant le disque solaire que l’on retrouve sur la couronne de la statuette Co. 214, et devient le symbole de la féminité par excellence, ce qui justifie son association avec Aphrodite après la conquête grecque. Vénérée durant toute la période pharaonique, son culte connaît un développement sans précédent à partir de la période ptolémaïque (BRICAULT 2013 ; pour une présentation générale d’Isis, voir DUNAND Françoise 2000). Les rois hellénistiques lui font notamment ériger un grand temple à Philae où sont soulignés son aspect cosmique et sa supériorité sur les autres dieux. 

 

Related pieces

Les collections du musée Rodin ne conservent aucune autre œuvre de ce type. 

Inscription

Anépigraphe. 

Historic

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

 

Donation à l’État français en 1916.

< Back to collection

Reliquaire

Patte de Thot sous sa forme d'ibis

PROVENANCE INCONNUE

ÉPOQUE INCONNUE

BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)

H. : 0,8 cm ; L. : 4,3 cm ; P. : 7,4 cm 

Co. 6262

Comment

State of preservation

L’œuvre présente un état de conservation correct. 

Le métal est légèrement corrodé entre les doigts et autour de l’ouverture circulaire qui traverse la patte. La conservation du trou central et du reste de l’œuvre n’est pas identique ce qui suggère que l’ouverture s’est faite à une époque postérieure au moulage de la patte. La régularité des bords suppose l’utilisation d’une perceuse. 

Description

L’œuvre Co. 6262 figure une patte d’ibis. Quatre longs doigts pointus la composent. Bien que les griffes ne soient pas dessinées, les articulations sont rendues le long des doigts grâce à un jeu d’épaisseur du métal. Le dessous de la patte est complètement plat et ne présente aucune trace d’arrachement ou d’abrasion. Un percement circulaire, aux bords nets, traverse la patte en son centre. L’état de conservation de ce percement n’étant pas identique au reste de l’objet, il est probable qu’il a été réalisé à une époque postérieure au moulage de la patte. La régularité des bords suppose l’utilisation d’une perceuse. Il permettait d’insérer la patte dans un ensemble plus important, ou de le fixer sur un socle. 

Le fait qu’il s’agisse d’une patte modelée sans le tarse, l’absence de détail anatomique, notamment des griffes dont les égyptiens étaient pourtant friands, le manque de finition (traces de raclage et de lissage appuyés) et la coloration très sombre du bronze couplée à un état de corrosion peu avancé, suggèrent que cette œuvre serait une production postérieure à la civilisation pharaonique. 

Related pieces

Le musée Rodin conserve plusieurs pattes en bronze appartenant à des figures de faucons ou d’ibis, Co. 5977, Co. 5994, Co. 5995, Co. 5996 et Co. 5997. Ces œuvres présentent un modelé clairement égyptien, contrairement à la patte Co. 6262. 

Inscription

Anépigraphe. 

Historic

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

 

Donation à l’État français en 1916.

< Back to collection

Thot assis

sous sa forme de babouin

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE

ÉPOQUE TARDIVE OU ÉPOQUE PTOLÉMAÏQUE > XXVIe - XXXIe dynastie > 672 - 30 AVANT J.-C.

[voir chronologie]

BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)

H. : 2,5 cm ; L. : 1,6 cm ; Pr. : 1,6 cm 

Co. 5606

Comment

State of preservation

L’œuvre est en bon état de conservation. La figurine présente une surface composée de carbonates de cuivre vert pâle avec d’importantes plages de sulfates. La surface est assez lisse. De petites traces de terre d’enfouissement sont encore visibles dans les creux. Des chlorures sont disséminés sur la surface mais ne semblent plus être en activité. 

Description

La figurine Co. 5606 représente le dieu Thot sous une de ses formes zoomorphes, ici en babouin. L’animal est assis sur une petite base carrée, genoux ramassés vers son ventre. Sa queue est repliée vers la gauche. Les doigts de ses mains sont posés sur ses genoux. Un tenon est présent sous la base. Il permettait d’insérer l’œuvre dans un élément plus vaste, aujourd’hui disparu.

 

La face de l’animal est aujourd’hui très abîmée par le temps. On remarque cependant les deux creusements profonds qui rendent les cavités oculaires ; ils sont couronnés d’une visière (bourrelet osseux qui surmonte l’œil). Il est possible que les yeux aient été originellement incrustés d’une pierre. Le museau est allongé et glabre. Les narines y ont été modelées à l’avant. Un sillon horizontal vient dessiner l’ouverture de la gueule. Les oreilles, qui devaient être réalisées de face, ne sont aujourd’hui plus visibles et seuls subsistent les deux imposantes touches de poils qui, de chaque côté du front aplati, terminent la face. Une épaisse crinière vient recouvrir les pattes avant de l’animal. Les mains stylisées se dégagent du camail (élargissement du pelage en forme de cape). Elles sont traitées en une masse compacte où les pouces sont individualisés. Contrairement à la figurine du Musée Rodin Co. 795, le camail (élargissement du pelage en forme de cape) n’est pas décoré. Cette crinière descend jusqu’au milieu du dos du primate, couronnant l’amorce de la queue qui s’échappe du côté gauche en longeant la patte. Les membres inférieurs, dénués également de décoration, sont en revanche clairement modelés. Les pointes de pieds se fondent dans la petite base métallique. Entre ses pattes inférieures se distinguent les parties génitales allongées. Cette insistance sur son pénis répond à la culture égyptienne, où la vitalité sexuelle attribuée au babouin lui attribue un rôle apotropaïque (YOYOTTE Jean, VERNUS Pascal, Bestiaire des Pharaons, Paris, 2005, p. 622). 

 

L’application à rendre l’anatomie à l’arrière de l’œuvre suppose qu’elle pouvait être vue de derrière, notamment en étant placée sur une enseigne de la même manière que la statuette conservée au Museo Egizio de Turin, S.93

 

L’espèce représentée serait un babouin « doguera » ou babouin « olive », le Papio anubis doguera, plus grand que l’espèce prépondérante (le Papio hamadryas) dont le pelage, moins épais, laisse ses oreilles découvertes. Sur les deux espèces, voir OSBORN Dale J., OSBORNOVÁ Jana, The Mammals of Ancient Egypt, The Natural History of Egypt, Vol. IV, Warminster, 1998, p. 32-37 (Papio hamadryas) et 38-30 (Papio anubis). Le nom français de « babouin » dériverait du nom du dieu égyptien Baba, ou Bébon. Baba, dieu de la force virile, est cité dès les Textes des Pyramides (CORTEGGIANI Jean-Pierre, L’Égypte ancienne et ses dieux : dictionnaire illustré, Paris, 2007, p. 72-74). Singe coloré, son phallus surdimensionné servait de verrou pour les « portes du ciel », c’est-à-dire les vantaux des tabernacles où les statues divines étaient exposées (voir ÉTIENNE Marc (dir.), Les Portes du Ciel, Visions du monde dans l’Égypte ancienne, Musée du Louvre, 6 mars-29 juin 2009, Paris, 2009).

 

Cette statuette est très vraisemblablement une effigie de Thot. L’image qu’elle présente de l’hypostase du dieu est classique. La morphologie du babouin est réaliste, sa position accroupie correspond également aux autres figurines et statuettes du dieu. Divinité ancienne, Thot est le dieu de la connaissance, des écritures, qui fixe le destin et calcule le temps. Thot consigne par écrit tout ce qui est important dans la vie et dans la mort et assiste à la pesée du cœur du défunt. Grand juge divin, il est étroitement associé à la Lune.

Si le premier animal emblématique du dieu est l’ibis (oiseau dont le pas saccadé aurait été mis en relation par les anciens égyptiens avec le calcul, la mesure et la connaissance précise, qualités attribuées au dieu Thot), le second est le babouin. Cette association au babouin à pour origine la ville d’Hermopolis, où Thot a supplanté l’ancien dieu-singe Hedjour. Les représentations de babouins ont été retrouvées en grand nombre dans les sanctuaires dédiés à Thot. Les nécropoles de babouins momifiés, notamment dans la région thébaine, illustrent les liens étroits et sacrés unissant le primate au dieu de la connaissance. Thot représenté sous sa forme de babouin ne possède que très rarement un corps d’homme, contrairement à la forme ibis de Thot qui le présente souvent ibiocéphale (cf. la figurine du Musée Rodin Co. 2332).

L’association de Thot avec le soleil tiendrait au fait que les égyptiens avaient remarqué les postures et mimiques des babouins, réunis en groupes bruyants au lever du soleil afin de rappeler les limites de leur territoire. Voir, par exemple, la surprenant gestuelle des quatre babouins adorant le soleil levant, provenant du socle de l’obélisque oriental de Ramsès II à Louxor (face sud-ouest), conservée au Musée du Louvre N381 (DAVID Élisabeth, BOVOT Jean-Luc, in H. GUICHARD (éd.), Des animaux et des pharaons. Le règne animal dans l’Égypte ancienne, catalogue d’exposition du musée du Louvre-Lens, 5 décembre 2014-9 mars 2015, Paris, Lens, 2014, notice 365, p. 330-331).

 

On peut envisager une fonction votive à la figurine Co. 5606, placée dans un sanctuaire dédié au dieu. On peut aussi lui attribuer une fonction plus apotropaïque et lui concevoir une provenance domestique ou funéraire, notamment grâce à un reliquaire (pour plus d’informations concernant les figures de reliquaire, voir par exemple l’œuvre du Musée Rodin Co. 2428).

Related pieces

Les collections du musée Rodin conservent une autre statuette en bronze représentant un babouin, Co. 795. En revanche, cet objet est couronné d’un disque lunaire. L’œuvre Co. 2311 figure également un babouin en pierre noire de type grauwacke. 

Inscription

Anépigraphe. 

Historic

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

Donation à l’État français en 1916.

< Back to collection

Taureau sacré

Apis ?

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE

ÉPOQUE TARDIVE OU ÉPOQUE PTOLÉMAÏQUE > XXVIe - XXXIe dynastie > 672 - 30 AVANT J.-C.

[VOIR CHRONOLOGIE]

BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)

H. : 4,1 cm ; L. : 2 cm ; Pr. : 5 cm 

Co. 2369

Comment

State of preservation

L’œuvre présente un bon état de conservation. Bien que le métal soit oxydé, particulièrement sous le ventre de l’animal, les détails décoratifs sont toujours visibles. Il manque uniquement la moitié du disque solaire et l’oreille droite. La fine plaque sur laquelle le taureau se tient est bosselée. 

Description

L’œuvre figure un taureau dans la position de la marche apparente, les pattes gauches en avant. Le boviné est couronné d’un large disque solaire orné de deux uraei dressés, maintenu sur la tête par un tenon métallique. Cette iconographie assez habituelle pour ce type de statuette, qui se retrouve par exemple sur celle du Walter Art Museum de Baltimore (inv.no. 54.538). La statuette est ici fixée sur une fine plaque rectangulaire qui était elle-même montée sur un socle plus grand aujourd’hui disparu, très certainement un reliquaire, à l’exemple de celui, conservé au musée Rodin, qui abritait une momie de faucon (Co. 793). 

 

Le corps de l’animal est traité de façon relativement naturaliste : quoique le modelé n’en soit pas aussi fin que celui de la statuette Co. 798 par exemple. Malgré l’érosion des volumes, on distingue encore certains détails anatomiques, en particulier les parties génitales, la mandibule légèrement en saillie, ainsi que les différentes parties de la patte. Le jarret et l’ergot sont marqués sur chacun des membres et le sabot fendu est clairement dissocié de la patte grâce à un ressaut de métal figurant le paturon (pour le vocabulaire anatomique des bovinés, voir). La large nuque se prolonge en un garrot légèrement bombé, en symétrie avec le plexus fortement emphatisé, de même que la touffe de poils qui agrémente toujours le ventre des bovidés dans l’art égyptien. Le dos se prolonge ensuite presque à l’horizontale jusqu’à la croupe, d’où s’échappe la longue queue dont le toupillon est rattaché au jarret arrière droit par souci de solidité.

 

 

La tête est de forme triangulaire, avec un chanfrein très aplati. Le museau carré, pointant vers le bas, est agrémenté de deux petites cavités circulaires rendant les naseaux, mais l’ouverture de la gueule n’est pas figurée. Comme sur de très nombreuses statuettes en bronze de taureaux sacrés, un élément décoratif de forme triangulaire est visible sur la tête de l’animal (ROEDER 1956, §411b-f, par exemple BM EA58963 ou BM EA1898,02.25.1). Cette tache blanche constitue l’un des signes distinctifs qui permet aux prêtres de désigner la nouvelle incarnation d’Apis au sein de tout le cheptel égyptien, à la mort de son prédécesseur. Hérodote a livré une liste de ces critères, le décrivant comme « un taureau né d’une vache qui ne peut plus par la suite avoir d’autre veau. Les Égyptiens disent qu’un éclair descend du ciel sur la bête qui, ainsi fécondée, met au monde un Apis. Le taureau qui reçoit le nom d’Apis présent les signes suivants : il est noir, avec un triangle blanc sur le front, une marque en forme d’aigle sur le dos, les poils de la queue doubles et une marque en forme de scarabée sous la langue » (L’Enquête, III, 28, trad. A. Barguet). Cependant, les très nombreuses stèles découvertes au Sérapeum de Saqqara le figurent plutôt avec une robe blanche tachetée de noir, ce qui est peut-être à mettre sur le compte de la fiabilité parfois fluctuante des observations d’Hérodote sur l’Égypte de son temps. Par ailleurs, si la figuration d’Apis sous la forme d’un taureau marchant est de loin la plus répandue, on trouve aussi des représentations anthropozoomorphes, sous la forme d’un homme à tête de taureau tenant le sceptre ouas et la croix ankh, ou encore d’une momie humaine à tête de boviné. 

C’est à partir de la Basse Époque que de nouveaux attributs sont intégrés à l’iconographie du taureau, notamment un scarabée ailé sur son garrot, un vautour aux ailes déployées sur sa croupe : c’est le cas de l’œuvre Co. 2369, sur laquelle ils ont été incisés après la fonte de l’objet, et encore bien visibles malgré son état d’érosion. Sur le dos de l’animal sont également figurés deux tapis frangés, ornés de losanges, maintenus l’un à l’autre au niveau de la colonne vertébrale. Des détails similaires sont également visibles sur les figurines du Musée d’archéologie méditerranéenne de Marseille (no. inv. 621) ou inv.no. EA58963 du British Museum.

Le culte du taureau Apis serait attesté dès le second souverain de l’histoire de l’Égypte, le roi Hor-Aha de la Ière dynastie, rédigées seulement à la Ve dynastie. Quoi qu’il en soit, sa très grande longévité a permis à ce culte de s’enrichir de nombreuses associations avec d’autres dieux. Particulièrement vénéré à Memphis, il est naturellement lié à Ptah, dieu local majeur, dont il devient même le « héraut » à partir du règne d’Amenhotep III de la XVIIIe dynastie. Du fait de l’existence d’un autre boviné sacré, le taureau Mnévis d’Héliopolis affilié au culte de Rê, il est aussi figuré avec un disque solaire entre les cornes. Les deux animaux partagent donc une iconographie similaire et il est difficile de les distinguer en l’absence d’inscription. Enfin, Apis obtient également des prérogatives funéraires en se fondant avec Osiris : cette nouvelle entité syncrétique Osirapis deviendra, à l’époque des Ptolémée et avec son assimilation à Hadès, le dieu Sérapis particulièrement vénéré dans le monde hellénistique.

 

 
La statuette est de manufacture assez rudimentaire, témoignant d’un moulage à la chaine. En effet, à partir de l’époque tardive, les petits bronzes sont diffusés dans toute la méditerranée depuis les principaux centres religieux égyptiens. Les inscriptions hiéroglyphiques présentes sur quelques unes des statuettes de taureau signalent que différentes divinités pouvaient être figurées ainsi, tel le dieu Apis – ou certaines de ses formes comme Horus-Apis ou Osiris-Apis –, mais aussi le taureau Mnevis ou Osiris-Mnevis (AUBERT, AUBERT 2001, p. 287). Dès lors, en l’absence d’inscription, il demeure difficile d’associer une divinité à cet objet.
Le taureau est un animal vénéré en Égypte depuis le prédynastique, et symbolise la force divine et la fécondité. Pour ces raisons, il fut rapidement associé à la crue du Nil et à Osiris. Considérés comme les apparences de certaines divinités, plusieurs taureaux sacrés sont connus dans le pays, comme le taureau blanc de Min, le Mnevis de Rê à Héliopolis, mais aussi Hormerty en Chedenou, le grand Kemour noir à Athribis, et Bouchis à Hermopolis et Médamoud. Le plus connu demeure sans nul doute le taureau Apis, représentant le dieu Ptah, et animal régulièrement représenté dans l’art égyptien des époques tardives.

On distingue deux formes majeures du culte animal en Égypte et particulièrement après le Nouvel Empire : à l’inverse des milliers d’animaux dits sacrés mais élevés uniquement dans le but d’être momifiés et de servir d’ex-voto (les « multiples »), Apis fait au contraire partie des « uniques », c’est-à-dire « une bête choisie parmi ses congénères de la même espèce pour être l’hypostase de la divinité de la cité » (CHARRON 2002, p. 176). Il possède donc un culte propre et est entretenu et bien traité sa vie durant : né d’une vache elle-même considérée comme manifestation d’Isis (CASSIER 2012, p. 15-20), Apis vit entouré de son harem et de sa mère dans un enclos sacré, le sekos, dans l’enceinte du temple de Ptah à Memphis. Toutefois, même les « uniques » ne sont pas des dieux à part entière, mais des ouhem : ce mot, généralement traduit par « héraut », fait de l’animal un intermédiaire entre les hommes et les dieux. Le ouhemassume donc un rôle de médiateur, chargé de transmettre au dieu les prières des dévots, et remplissant parfois même un rôle d’oracle.

Related pieces

Le musée Rodin conserve plusieurs autres statuettes de taureau, Co. 798Co. 807Co. 1234Co. 2395 et Co. 5629. L’œuvre Co. 2369 est cependant la seule qui comportent les décors supplémentaires du scarabée ailé et du « tapis » à franges. 

Inscription

Anépigraphe. 

Historic

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

BOREUX 1913 : Meudon, pavillon de l'Alma, vitrine 20, 505, "Petit taureau Hapi en bronze monté sur une base plate, munie d'un tenon. Le haut du disque manque. Hauteur (sans le tenon) quatre cent. Estimé vingt cinq francs."

Donation Rodin à l'État français 1916.

Historic comment

L'objet fut exposé dans une vitrine du pavillon de l'Alma à Meudon, là où Charles Boreux le décrivit à l’été 1913 dans l’inventaire qu’il fit en vue de la donation à l’État français.

 

< Back to collection

Uraeus double

élément de couronne

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE

TROISIÈME PÉRIODE INTERMÉDAIRE OU ÉPOQUE TARDIVE > XXIe– XXXedynastie > 1059 - 332 AVANT J.-C.

[voir chronologie]

BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)

H. : 4,9 cm ; L. : 3 cm ; P. : 1,2 cm 

Co. 1502

Comment

State of preservation

L’objet présente un mauvais état de conservation.

Le métal est oxydé et corrodé dans les parties creuses, à l’origine incrustées. La surface du métal a pris une teinte rougeâtre, particulièrement à l’arrière des serpents. Le tenon placé à l’arrière des disques solaires est brisé. 

Description

L’œuvre Co. 1502 figure deux cobras dressés et disqués, appelés en Égypte ancienne des uraei. Les deux serpents sont reliés l’un à l’autre au niveau des disques solaires et du capuchon dilaté qui entoure le cou ; le tout est conforté en partie dorsale basse par un renfort métallique horizontal. Le tenon ménagé à l’arrière des disques solaires indique la fonction de ce double uræus. Élément richement orné, il était rapporté sur une coiffe royale ou divine. 

Certaines caractéristiques du corps des serpents Co. 1502 ont été détaillées, notamment le cou qui est strié de lignes horizontales, la tête sur laquelle les côtés sont creusés en triangle créant des yeux étirés et un nez en pointe. Mais aussi l’arrière de la tête où l’on voit deux bourrelets de métal rejoignant la pointe de la queue. Celle-ci, très fine, est collée au corps et se termine au milieu des disques solaires. L’ondulation naturelle des corps des reptiles a été mise en valeur, la manufacture est de qualité. 

Le capuchon de chaque cobra est compartimenté en six espaces. Ceux-ci sont creux, ce qui permettait d’y insérer une incrustation de pierre ou de pâte de verre. Les disques solaires surmontant les deux têtes des reptiles étaient également incrustés. 

 

Ce type d’uræus précieusement décoré n’est pas rare en Égypte ancienne et pour un exemple de cobra dressé, participant à un assemblage de couronne-atef en bronze avec traces de dorure à la feuille et d’incrustations de pâte de verre coloré en rouge et vert, voir l’uræus du Musée du Louve N 4250 1 (cf. GUICHARD Hélène (dir.), Des animaux et des pharaons. Le règne animal dans l’Égypte ancienne, Catalogue d’exposition, Lens, Musée du Louvre-Lens, 5 décembre 2014 - 9 mars 2015, Paris, Lens, 2014, p. 144-145). Pour comparaison, voir également au Brooklyn Museum, 08.480.6216.580.18116.735 ; au Metropolitan Museum of Art de New York, 50.198.341.160.110 ; au British Museum, EA57331EA11612; ou encore au Penn Museum de Philadelphie, E120

 

Uraeusuraeiau pluriel, désigne les serpents de l’espèce Naja haje haje Linn. que l’on voit se dresser à l’avant des couronnes des rois, des dieux et parfois des reines. Ce terme est une forme latinisée d’un mot grec dérivant de iâret, nom égyptien du cobra. Ces reptiles, toujours figurés capuchon dilaté, prêts à l’attaque, sont toujours des cobras femelles en contexte égyptien. Protectrices, elles représentent un aspect mécontent de « l’Œil de Rê ». Les textes divins anciens racontent comment l’œil de Rê rentrant d’une mission punitive fut mécontent de voir qu’il avait été remplacé. Pour calmer sa colère, Rê le transforma en serpent et le plaça sur son front avec pour mission de le protéger contre ses ennemis en crachant contre eux son venin (cf. CORTEGGIANI Jean-Pierre, L’Égypte ancienne et ses dieux : dictionnaire illustré, Paris, 2007, p. 563-565). Les serpents sont bien sûr dangereux à cause de leur venin mais aussi en raison du feu symbolique qu’ils crachent dans l’Au-delà. Dans un texte mythologique, Rê est mordu par un serpent qu’Isis a façonné pour le piéger, il décrit sa souffrance ainsi : « le venin brulait véritablement, il était plus puissant que les flammes ou que le feu ». L’animal venimeux est alors une menace pour celui qui est visé et une protection pour celui qui le porte. Cette protection sera très vite utilisée par presque tous les dieux puis les rois et parfois les reines. 

Le terme iâret étant féminin, l’uraeusest naturellement associé à toutes les divinités féminines et peut ainsi servir de déterminatif à n’importe quel nom de déesse. Outre son rôle protecteur des couronnes, l’uraeus agrémenté d’ailes peut également protéger les cartouches des rois et des reines, mais aussi tout type de mobilier : trône, naos, bijoux… 

 

L’uræusdu musée Rodin Co. 1502 est double, ce qui est plus rare. Placé sur une couronne divine, il est l’un des attributs du dieu Montou, dieu attesté au moins dès les Textes des Pyramides et devenu progressivement le dieu guerrier de la région thébaine (ibid., p. 341-343). Cette coiffe lui est spécifique, voir par exemple l’œuvre AF588 conservée au Musée du Louvre (cf. GOMBERT-MEURICE Florence, PAYRAUDEAU Frédéric (dir.), Servir les dieux d’Égypte. Divines adoratrices, chanteuses et prêtres d’Amon à Thèbes, Catalogue d’exposition, Musée de Grenoble, 25 octobre 2018 - 27 janvier 2019, Paris, 2018, n° 91, p. 176-177). Au Musée de Berlin sont également détenues les œuvres 13 194 (cf. ROEDER Günter, Ägyptische Bronzefiguren, Berlin, 1956, p. 393, § 527f, pl. 55 [p]) et 14 069 (ibid., p. 391, § 523B b, pl. 55 [r]) figurant tous deux un double uraeus bien que le second soit composite (tête humaine et tête de faucon). 

 

La datation de l’œuvre Co. 1502 est comprise entre la Troisième Période intermédiaire et la Basse-Époque. Le métal ayant pris une teinte rougeâtre, il s’agit probablement d’un alliage dit « bronze noir », particulièrement utilisé au Nouvel Empire et durant les périodes directement postérieures. La maîtrise des alliages utilisant de l’or et de l’argent donnait à l’objet une surface brillante très noire. 

Related pieces

Les collections du musée Rodin ne conservent aucune autre œuvre similaire à Co. 1502.

Inscription

Anépigraphe. 

Historic

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

 

Donation à l’État français en 1916.

< Back to collection

Apis

sous sa forme de taureau

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE

ÉPOQUE TARDIVE OU ÉPOQUE PTOLÉMAÏQUE > XXVIe - XXXIe dynastie > 672 - 30 AVANT J.-C.

[voir chronologie]

BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)

H. : 3,7 cm ; L. : 1,5 cm ; Pr. : 4,7 cm 

Co. 1234

Comment

State of preservation

La figurine présente un mauvais état de conservation. 

La surface est très oxydée, particulièrement sur la tête et autour du cou, et les détails sont patinés. Un début de corrosion est visible sur le dessus de la petite base et sous le ventre de l’animal. Cette corrosion est aujourd’hui stabilisée. L’oreille droite, l’extrémité des cornes et la partie arrière de la plaque sont manquantes. On note enfin quelques griffures sur le flanc gauche. 

Description

La statuette figure un taureau Apis. Il se tient sur une plaque rectangulaire dans la position de la marche apparente, c’est-à-dire les pattes antérieures et postérieures gauche en avant. Le taureau et la base ont été moulés d’un seul tenant. Cette petite base était destinée à être fixée sur un autre socle, disparu aujourd’hui.

 

La face de l’animal est triangulaire. Les cornes, particulièrement érodées, se détachent à peine du chignon (pour le vocabulaire général anatomique des bovidés, voir le site internet suivant). Elles surmontent des oreilles arrondies. Plus à l’avant, les arcades sourcilières se démarquent par une excroissance du métal. Le profil des cavités oculaires proprement dites est aujourd’hui trop usé pour être visible. Le museau est long, à l’extrémité arrondie. Seule l’ouverture de la gueule y est encore discernable. L’encolure du taureau est étroite, plusieurs stries verticales rendant les plis du cou comme on peut le voir sur d’autres œuvres conservées au musée Rodin, Co. 798Co. 807Co. 2395 et probablement aussi Co. 5629. La gorge se poursuit sur un poitrail relativement émacié. Le ventre est simplement figuré mais les parties génitales matérialisées afin d’attribuer l’œuvre à un sexe précis. Le dos de l’animal est tout aussi simplement rendu. La queue épaisse se dégage de la croupe. Suivant le mouvement naturel de la marche, la queue est balancée vers la patte postérieure droite, à laquelle elle est collée. Notons cependant que la corrosion a comblé l’espace originellement creux entre la cuisse et la queue. Les quatre pattes sont traitées avec lourdeur. La figuration de l’ergot sépare la patte du sabot. Les pattes arrière présentent un détail ignoré sur les pattes avant, le genou particulièrement haut ici. 

 

Les statuettes d’Apis en bronze ont été produites abondamment et parfois même en série, notamment à la Basse-Époque. La statuette du musée Rodin présente une manufacture assez rudimentaire, indice probable d’un moulage en série. Les détails caractéristiques à une représentation de taureau Apis sont néanmoins rendus, notamment le pan de peau sous le poitrail, les parties génitales et les plis du cou. Ces marques particulières permettent l’identification immédiate de la figure représentée, celle d’un taureau Apis. La statuette est assez statique bien que l’artisan ait essayé de rendre le mouvement. La plupart du temps, Apis est représenté sous la forme d’un taureau marchant, un disque solaire entre ses cornes. Mais d’autres figurations de ce dieu ont pu être utilisées. Par exemple, un homme à tête de taureau tenant le sceptre ouaset la croix ankh, ou encore une momie humaine à tête de bovidé. C’est à partir de la Basse-Époque que de nouveaux attributs viennent compléter l’iconographie du taureau, notamment un scarabée ailé sur son garrot, un vautour ailé sur sa croupe et une couverture ornée de franges protégeant son dos. Pour une description des caractéristiques d’un taureau Apis, voir la notice de Luc Delvaux du bronze Musée royal de Mariemont Inv. B.485, acheté par Raoul Warocqué en 1912 à Albert Daninos Pacha (DELVAUX Luc, « Apis », in Cl. Derricks, L. Delvaux (éd.), Antiquités Égyptiennes au Musée royal de Mariemont, Morlanwelz, 2009, p. 185-186).

 

Attesté dès le règne de l’Horus Aha à la première dynastie, le culte du taureau Apis est aussi ancien que l’est la civilisation égyptienne. De par cette longévité, il s’enrichit de nombreuses associations avec d’autres dieux. Vénéré particulièrement à Memphis, il est naturellement associé à Ptah, dieu local, dont il devient le « héraut » à partir du règne d’Amenhotep III à la XVIIIdynastie. Lié à l’origine à la fécondité et par conséquent à la fonction royale, il ajoute à ses marques reconnaissables un disque solaire entre ses cornes, orné d’un ou de deux uraeisymbolisant son affiliation au dieu Rê. Cette association au dieu solaire se retrouve chez un autre bovidé, le taureau Mnévis d’Héliopolis, possédant également un disque solaire entre les cornes. Ces deux taureaux sont souvent confondus en l’absence d’inscriptions qui identifieraient clairement le dieu figuré. Apis obtient aussi des prérogatives funéraires en se fondant avec Osiris et devient Osirapis, qui bien plus tard donnera le dieu Sérapis. 

 

Apis faisait partie des « uniques », c’est-à-dire « une bête choisie parmi ses congénères de la même espèce pour être l’hypostase de la divinité de la cité. » (cf. CHARRON Alain (dir.), La mort n’est pas une fin, Pratiques funéraires en Égypte d’Alexandre à Cléopâtre, Catalogue d’exposition, 28 septembre 2002-5 janvier 2003, Musée de l’Arles antique, Arles, 2002, p. 176). Ce qualificatif lui offrait de nombreux avantages, notamment le fait d’être couronné, de posséder un culte propre, d’être entretenu et bien traité, ainsi que d’avoir des funérailles dignes d’un dieu.Toutefois, les uniques n’étaient pas des dieux à part entière mais étaient des ouhem. Ce mot traduit généralement par « héraut » faisait de l’animal un intermédiaire entre les hommes et les dieux. Il avait un rôle de médiateur, chargé de transmettre au dieu les prières des dévots et parfois possédait un rôle d’oracle. 

 

« Cet Apis-Épaphos est un taureau né d’une vache qui ne peut plus par la suite avoir d’autre veau. Les Égyptiens disent qu’un éclair descend du ciel sur la bête qui, ainsi fécondée, met au monde un Apis. Le taureau qui reçoit les nom d’Apis présente les signes suivants : il est noir, avec un triangle blanc sur le front, une marque en forme d’aigle sur le dos, les poils de la queue double et une marque en forme de scarabée sous la langue. » Bien qu’Hérodote (L’Enquête, III, 28, trad. A Barguet) le décrive comme tel, les très nombreuses stèles découvertes par Mariette au Sérapeum le figure à la robe blanche tachetée de noir. 

Né d’une vache elle-même considérée comme manifestation d’Isis (voir CASSIER Charlène, « Vaches sacrées dans l’ancienne Égypte. Quelles vaches ? Quels rôles ? », Égypte, Afrique et Orient 66, 2012, p. 15-20), Apis vit entouré de son harem et de sa mère dans un enclos sacré, le sekos, dans l’enceinte du temple de Ptah à Memphis. À sa mort, il recevait tous les hommages généralement réservés aux hommes et était enterré dans des tombes indépendantes à Saqqarah jusqu’au règne de Ramsès II. Puis, son culte prenant une importance considérable, notamment à la Basse Époque, période à laquelle on retrouve d’innombrables statuettes en bronze le représentant, un immense réseau de couloirs souterrains, aujourd’hui appelé le Sérapeum, est aménagé dans la nécropole memphite. Immédiatement après la période respectueuse d’accomplissement des rites funéraires de 70 jours, un nouvel héraut était recherché parmi les troupeaux d’Égypte. 

 

À la mort du taureau, de nombreuses statuettes en bronze étaient commandées, moulées et présentées en offrandes, en particulier sur les lieux de culte du Sérapeum, afin de demander au dieu d’accorder ses bienfaits et sa protection au commanditaire. La figurine Co. 1234 serait donc un témoignage de dévotion personnelle. Elle était peut être aussi intégrée dans un groupe divin, comme celui de la Glyptothèque Ny Carlsberg de Copenhague dont la collection égyptienne a été constituée à une époque et dans un contexte proche de celle d’Auguste Rodin. Si l’assemblage a été très vraisemblablement réalisé pour le marché de l’art, les statuettes sont d’origine. Dans ce groupe reconstitué, une déesse ailée (Isis ?) protège des ses ailes étendues un taureau Apis devant trois orants agenouillés (Ny Carlsberg Glyptotek de Copenhague, ÆIN 1464, acheté par Carl Jacobsen à Paris en 1912, voir JØRGENSEN Mogens, Catalogue EgyptV. Egyptian Bronzes Ny Carlsberg Glyptotek, s. l., Ny Carlsberg Glyptotek, 2009, cat. 67, p. 200-201). 

Related pieces

Les collections du musée Rodin conservent plusieurs statuettes du taureau Apis, Co. 798, Co. 807, Co. 2369, Co. 2395 et Co. 5629. Les œuvres Co. 2369 et Co. 5629 sont à rapprocher de Co. 1234 par le style et la finesse de l’objet.

Inscription

Anépigraphe. 

Historic

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

BOREUX 1913 : Meudon, pavillon de l'Alma, vitrines 23 et 24, 523, "Petit taureau sur base rectangulaire plate, le disque manque, bronze. Haut. 4 cent. Long. 4 cent. 1/2. Estimé dix francs."

Donation Rodin à l'État français 1916.

Historic comment

L'objet était exposé du vivant de Rodin dans une vitrine du pavillon  de l'Alma à Meudon.

< Back to collection

Apis

sous sa forme de taureau

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE

ÉPOQUE TARDIVE OU ÉPOQUE PTOLÉMAÏQUE > XXVIe - XXXIe dynastie > 656 - 30 AVANT J.-C.

[voir chronologie]

BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)

H. : 6,4 cm ; L. : 3 cm ; P. : 10,5 cm 

Co. 807

Comment

State of preservation

Le métal est oxydé. La corrosion est particulièrement visible au niveau des pattes, sous le ventre de l’animal et à la naissance de la queue. La patte antérieure gauche et les deux pattes postérieures sont sectionnées à mi-hauteur. Bien que le modelé général du corps reste discernable, les détails sont aujourd’hui effacés. Quelques griffures sont visibles sur le cou. 

Description

L’œuvre Co. 807 figure le dieu Apis sous sa forme bovine. Contrairement à d’autres statuettes conservées au musée Rodin, notamment Co. 798Co. 1234Co. 2369 et Co. 5629, ici le taureau se tient droit sur ses pattes et n’est donc pas dans la position de la marche apparente (pour un Apis adoptant la même position, voir la statuette musée du Louvre Inv. N° N 5073, provenant des fouilles d’Auguste Mariette à Saqqâra, cf. TIMBART Noëlle, « Statuette d’Apis (cat. N° 311 b) », in Des aninaux et des pharaons, 2014, p. 283). 

 

Les proportions générales du bovidé sont massives, rendant ainsi la puissance physique du taureau. Les parties génitales de l’animal confirment sa nature de taureau. La cambrure du dos est naturelle et la queue se détache de la croupe de façon naturelle ; le toupillon est rattaché au jarret arrière droit par souci de solidité. Malgré l’érosion des volumes et l’état de conservation, on distingue encore certains détails anatomiques, comme l’omoplate en légère saillie ou les hanches. Le cou épais est strié, sous la gorge et jusqu’au poitrail, de courtes incisions rendant de manière stylisée un large pan de peau pendant, même si l’on n’en distingue plus que cinq aujourd’hui. La qualité d’exécution de certains détails va de pair avec la lourdeur de l’objet qui suggère une fonte pleine et un certain coût de réalisation, lié à la plus grande quantité de métal utilisée. Néanmoins, le modelé est moins fin que sur d’autres statuettes similaires comme la Co. 798 : les pattes notamment sont traitées beaucoup plus simplement. Seul le genou est figuré, alors que le modelé du jarret, du canon ou du sabot n’est pas marqué (pour le vocabulaire anatomique des bovidés, voir). La touffe de poils qui agrémente toujours le ventre des bovidés dans l’art égyptien est ici très emphatisée. 

 

La tête est de forme triangulaire avec le front aplati. Deux petites cornes s’échappent surmontent directement les oreilles quasi carrées. On remarque l’absence de disque solaire pourtant caractéristique de ce type d’œuvre. Les yeux sont rendus par un simple creusement, bien que rehaussés d’un renflement de métal dessinant les arcades sourcilières. Le museau est quant à lui rudimentaire ou très érodé – seulement arrondi, sans indication des narines ni de l’ouverture de la gueule. Son traitement est à rapprocher de la figurine Co. 799 également conservée au musée Rodin : les deux œuvres pourraient provenir du même atelier ou avoir été moulées à la même période. 

 

Le culte du taureau Apis est attesté dès le deuxième souverain de l’histoire de l’Égypte, le roi Aha, même si cet événement est en réalité rapporté par des annales bien postérieures, rédigées seulement à la Ve dynastie. De par cette longévité, il s’enrichit de nombreuses associations avec d’autres dieux. Vénéré particulièrement à Memphis, il est associé à Ptah, dieu local majeur, dont il devient le « héraut » à partir du règne d’Amenhotep III de la XVIIIe dynastie. Du fait de l’existence d’un autre bovidé sacré, le taureau Mnévis d’Héliopolis affilié au culte de Rê, il est aussi figuré avec un disque solaire entre les cornes. Les deux animaux partagent donc une iconographie similaire et il est difficile de les distinguer en l’absence d’inscription. Apis obtient également des prérogatives funéraires en se fondant avec Osiris : cette nouvelle entité syncrétique Osirapis deviendra, à l’époque des Ptolémée et avec son assimilation à Hadès, le dieu Sérapis particulièrement vénéré dans le monde hellénistique.

 

Hérodote a livré une liste des critères qui devaient permettre aux prêtres de désigner la nouvelle incarnation de l’Apis à la mort de son prédécesseur, le décrivant comme « un taureau né d’une vache qui ne peut plus par la suite avoir d’autre veau. Les Egyptiens disent qu’un éclair descend du ciel sur la bête qui, ainsi fécondée, met au monde un Apis. Le taureau qui reçoit le nom d’Apis présent les signes suivants : il est noir, avec un triangle blanc sur le front, une marque en forme d’aigle sur le dos, les poils de la queue doubles et une marque en forme de scarabée sous la langue » (L’Enquête, III, 28, trad. A. Barguet). Bien qu’Hérodote le décrive comme tel, les Apis représentés sur les très nombreuses stèles découvertes par Mariette au Sérapeum possèdent une robe blanche tachetée de noir. 

Par ailleurs, si la figuration d’Apis sous la forme d’un taureau marchant est de loin la plus répandue, on trouve aussi des représentations anthropozoomorphes, sous la forme d’un homme à tête de taureau tenant le sceptre ouas et la croix ankh, ou encore d’une momie humaine à tête de bovidé. C’est à partir de la Basse-Époque que de nouveaux attributs sont intégrés à l’iconographie du taureau, notamment un scarabée ailé sur son garrot, un vautour aux ailes déployées sur sa croupe et un « tapis » frangé sur son dos (voir l’Apis en bronze Co. 685).

 

On distingue deux formes majeures du culte animal en Égypte et particulièrement après le Nouvel Empire : à l’inverse des milliers d’animaux dits sacrés mais élevés uniquement dans le but d’être momifiés et de servir d’ex-voto (les « multiples »), Apis fait au contraire partie des « uniques », c’est-à-dire « une bête choisie parmi ses congénères de la même espèce pour être l’hypostase de la divinité de la cité » (cf. Alain CHARRON, La mort n’est pas une fin, 2002, p. 176). L’animal bénéficiait d’un statut à part. Soigneusement traité, il portait couronne, un culte propre lui était rendu, et il bénéficiait de funérailles dignes d’un dieu. Il était né d’une vache, elle-même considérée comme manifestation d’Isis (cf. CASSIER 2012, p. 15-20). Toutefois, ces uniques n’étaient pas des dieux à part entière mais des ouhem. Ce mot, traduit généralement par « héraut », faisait de l’animal un intermédiaire entre les hommes et les dieux. Il avait un rôle de médiateur, chargé de transmettre au dieu les prières des dévots et il assurait parfois la fonction d’oracle. 

 

À sa mort, l’Apis recevait tous les hommages généralement réservés aux hommes, y compris une momification dans les règles ; puis, après avoir respecté la période d’accomplissement des rites funéraires de 70 jours, on recherchait sa nouvelle incarnation parmi les troupeaux d’Egypte. Jusqu’au règne de Ramsès II, chaque Apis était inhumé dans une tombe indépendante à Saqqâra ; puis, son culte prenant ensuite une importance considérable, notamment à la Basse-Epoque, un immense réseau de couloirs souterrains (aujourd’hui appelé le Sérapéum) est aménagé pour accueillir les momies des Apis. C’est également à cette période que se multiplient les statuettes en bronze le représentant.  À la mort du dieu bovidé, de nombreuses statuettes en bronze étaient commandées, moulées puis présentées en offrandes sur les lieux de culte afin de demander au dieu d’accorder ses bienfaits et sa protection au commanditaire. La figurine Co. 685 relève donc du domaine de la dévotion personnelle.

Related pieces

Les collections du musée Rodin conservent plusieurs statuettes du taureau Apis, Co. 798Co. 1234Co. 2369Co. 2395 et Co. 5629. L’œuvre Co. 2395 est similaire à Co. 807 de part son attitude générale, c’est-à-dire que les taureaux ne sont pas dans la position de la marche apparente. 

Inscription

Anépigraphe. 

Historic

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

Donation à l’État français en 1916.

< Back to collection

Sobek ?

sous sa forme de crocodile

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE

ÉPOQUE TARDIVE OU ÉPOQUE PTOLÉMAÏQUE > XXVIe - XXXIe dynastie > 672 - 30 AVANT J.-C.

[voir chronologie]

BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)

H. : 1,3 cm ; L. : 4,3 cm ; P. : 9,7 cm 

Co. 805

Comment

State of preservation

Le métal est très oxydé, particulièrement au niveau du ventre du crocodile. Les deux pattes gauches et la pointe de la queue sont manquantes. Le tenon métallique sous l’œuvre est également brisé. On note la trace d’un petit impact sur le dos du reptile.

Description

L’œuvre figure un crocodile, animal sacré du dieu Sobek. Le reptile est grossièrement réalisé. Son corps, trop large pour être naturaliste, est très aplani, particulièrement au niveau de la face inférieure qui est presque concave. Les pattes qui se dégagent de chaque côté du corps n’ont pas été détaillées. Le cou est large et annonce une tête au museau court, deux cavités circulaires rendant les narines. Une large ouverture marque la gueule, qui rejoint les yeux de chaque côté de la tête. Réalisés dans un large creusement circulaire, ils étaient très vraisemblablement incrustés, incrustation aujourd’hui disparue. Un léger renflement du métal dessine les arcades sourcilières. Le creux des oreilles est présent. La queue, sectionnée à son extrémité, se recourbe vers le côté droit. L’ensemble du corps de l’animal, à l’exception de la tête, est orné d’un quadrillage d’écailles. Ce quadrillage, réalisé par de fins sillons, est irrégulier, et librement réalisées, ils ont été faites après moulage. La face inférieure, recouverte de corrosion, semble n’avoir reçu aucun traitement de finition. Un petit tenon circulaire est présent au centre du ventre du reptile. Il permettait à l’origine de présenter l’œuvre sur un socle plus grand, notamment un reliquaire comportant une ou plusieurs divinités. Une statuette de crocodile assez similaire par ses dimensions et le tenon vertical présent sous le ventre est conservée au Musée royal de Mariemont (B.492, DELVAUX Luc, « Crocodile », in Cl. Derricks, L. Delvaux (éd.), Antiquités égyptiennes au Musée Royal de Mariemont, Morlanwelz, 2009, p. 188).

 

Le crocodile est l’animal sacré du dieu Sobek. 

Principalement vénéré sous le nom de Sobek, il est une figure importante du panthéon égyptien. Il a même été assimilé à la divinité suprême Rê en devenant Sobek-Rê. L’une des possibilités expliquant cette association est à chercher dans l’halo lumineux qui entoure le crocodile sortant des eaux, à l’image du dieu soleil surgissant chaque matin  des eaux primordiales (KAYSER Nathalie, Recherches sur le dieu Sobek de la Ière à la XVIIIème dynastie, DEA Paris IV-Sorbonne, 1986). Naturellement associé au Nil et à sa crue, Sobek est un dieu fertile et a ainsi pour titres « maître de la semence, qui enlève les épouses à leurs maris quand il le veut, selon son désir » ou encore dans le spell 991 du "Textes des sarcophages", d’« éjaculateur ».Il faut attendre le règne de Domitien pour que Sobek forme une triade avec Hathor et Khonsou, triade visible sur le pylône du temple de Kôm Ombo. Auparavant, il est un dieu créateur « sorti du Noun », « le crocodile qui s’est mis au monde le premier » et qui a créé le monde. Sobek est un dieu redoutable, à l’image du reptile lui-même. L’hymne écrit sur le pylône de Kôm Ombo se poursuit en mettant en avant ses capacités meurtrières et sa puissance : « les crocs pointus, les dents acérés, la pupille terrible, le corps puissant », « sa queue lacère comme un couteau », il « fracasses les os » et les « croque comme de la viande ». Sobek était particulièrement vénéré dans les zones marécageuses, notamment le delta du Nil mais aussi et surtout au Fayoum qui, après sa prospérité du Moyen Empire devra attendre l’époque ptolémaïque pour retrouver un nouvel essor. Une ville portera également le nom de Crocodilopolis où l’on y rencontrait de nombreuses nouvelles entités divines inspirées du nom de Sobek devenu Souchos en grec. 

Bien que certaines images du dieu le rendent sous des traits entièrement anthropomorphes, notamment dans une scène de la salle hypostyle du temple de Kôm Ombo, ou encore criocéphale à Medinet Habou, Sobek est majoritairement représenté zoomorphe ou du moins crocodilocéphale. Il peut ne porter aucune couronne, comme c’est le cas pour l’œuvre Co. 805, mais est parfois couronné d’un disque solaire, voir notamment les œuvres conservées au Musée du Louvre et au British Museum respectivement E22888 et EA43046, ou bien d’une couronne plus complexe telle que la couronne atef (voir E10915 du Musée du Louvre). 

 

Le crocodile en tant qu’animal sacré abritant le dieu Sobek a été momifié et vénéré grâce à des reliquaires.

Les reliquaires de l’Antiquité égyptienne sont des objets archéologiques bien connus, les cimetières d’animaux sacrés étant nombreux sur le territoire égyptien. Ils comprenaient deux types d’animaux, les « uniques » et les « multiples » (cf. CHARRON Alain (dir.), La mort n’est pas une fin, Pratiques funéraires en Égypte d’Alexandre à Cléopâtre, Catalogue d’exposition 28 septembre 2002-5 janvier 2003, Musée de l’Arles antique, Arles, 2002, p. 176). La première catégorie regroupe des animaux choisis, parmi ses congénères et par les prêtres grâce à une statue divine qu’ils manipulaient, pour représenter de son vivant une divinité particulière. Les « uniques » les plus connus sont les taureaux Mnévis et Apis dont la plus ancienne attestation d’inhumation date du règne d’Amenhotep III. Ici, l’œuvre Co. 805 pourrait être une figure de reliquaire d’un « multiple ». Ces « multiples » n’étaient pas choisis pour leur caractère sacré mais c’est par les rites de leur mise à mort, leur momification et les prières récitées à cet instant que leur était conféré un caractère divin. Les animaux les plus représentés sont les serpents, les chats, les chiens, les ibis, les crocodiles, les musaraignes, les rapaces, les scarabées, les serpents. Ils n’avaient pas de pouvoir à part entière, c’était le dieu qu’ils représentaient à leur mort qui était vénéré. Ils devenaient alors un ba de la divinité, acquéraient un rôle de médiateur et devenaient capables de transmettre les doléances de la population. Les reliquaires étaient créés sur demande des dévots et les prêtres se chargeaient d’y insérer l’animal entièrement momifié, soit une partie de sa momie, voire même un paquetage imitant la forme de l’animal. Ces « meurtres » étaient pratiqués cachés du regard de la population car la loi égyptienne condamnait à mort toute personne ayant tué même accidentellement un animal. Quoiqu’il en soit, ils étaient courants afin de subvenir aux besoins des commanditaires. Au fil du temps, les commandes devenant de plus en plus nombreuses, certaines bêtes étaient ainsi élevées dans le seul but de servir à leur mort d’objet de dévotion.

 

De nombreuses localités en Égypte ont livré des momies de crocodiles, Kôm Ombo, El Kab, Esna, Gebelein, ou encore Thèbes. Toutes ces villes pouvant servir de provenance pour l’objet Co. 805.

Related pieces

Cette effigie en bronze de crocodile Co. 805 est unique dans les collections du musée Rodin.

Inscription

Anépigraphe. 

Historic

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

BOREUX 1913 : Meudon / atelier Tweed  /vitrine 9, 364 "Crocodile rampant (la queue est cassé). Bronze, long. 98 millim. Estimé cinq frs. "

Donation à l’État français en 1916.

Historic comment

L'objet était exposé du vivant de Rodin dans l'atelier Tweed à Meudon.

< Back to collection

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE

ÉPOQUE TARDIVE OU ÉPOQUE PTOLÉMAÏQUE > XXVI– XXXIdynastie > 656 - 30 AVANT J.-C.

[voir chronologie]

BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)

H. : 14,5 cm ; L. : 9,1 cm ; Pr. : 25,9 cm 

Co. 208

Comment

State of preservation

L’œuvre est en mauvais état de conservation. 

Le métal oxydé présente une surface brun-rougeâtre composée d’oxydes et des emplacements vert vif composés de carbonates (malachite). La surface est assez lisse bien que des crevasses sur le pouce témoignent d’un nettoyage chimique souvent à l’origine de corrosions par la suite. Des rayures sur sa surface, visibles particulièrement du côté droit du coup de pied,  indiquent que la corrosion a été arasée lors du nettoyage. Des chlorures sont disséminés sur la surface de l’intérieur de la cheville. Au niveau du talon, la perte de matière laisse voir la couche inférieure du métal. La cassure de la cheville n’est pas nette ce qui suggère que le pied était solidaire de la jambe et donc qu’ils ont été moulés ensemble.  

Description

L’œuvre Co. 208 figure un pied droit. Les dimensions de celui-ci suggèrent que la statue à qui ce pied appartenait à l’origine devait approcher de la taille humaine. 

La cheville brisée introduit deux malléoles légèrement modelées et un coup de pied oblique et naturel. Les orteils sont clairement démarqués les uns des autres sur le dessus. On note en revanche, que le revers des orteils a été laissé brut. Les ongles sont figurés. À la naissance des orteils, sur le revers, une plaque rectangulaire est encore visible. Il s’agit du vestige d’un tenon sectionné qui servait à maintenir l’œuvre dans un socle aujourd’hui disparu. Bien que le dessous du pied soit plat, il n’est pas plein puisqu’une large ouverture le perce tout en laissant un petit rebord irrégulier par souci de stabilité. 

 

Durant l’Antiquité, il existait trois façons de représenter un pied, suivant les canons de beauté de la culture égyptienne, romaine et grecque. Le pied égyptien possède un gros orteil avancé. Les orteils suivants se présentent en dégradé. Le pied romain est plus carré. Le pouce, le second orteil et parfois le troisième ont la même longueur. Enfin, le pied grec met en avant le second orteil par rapport au pouce. Ici, avec l’œuvre Co. 208, il pourrait s’agir d’un pied égyptien ou romain. En effet, il y a bien un dégradé des orteils, en revanche, le pouce et le second orteil ont la même longueur à quelques millimètres près. Ceci est particulièrement visible du dessous. 

Quoiqu’il en soit, les dimensions importantes du pied indiquent qu’il s’agissait à l’origine d’une statue de roi ou de dieu pour qui la statuaire en bronze à taille humaine était réservée. La cheville droite indique également que le personnage se tenait les pieds joints, assis ou debout. S’il avait été représenté dans la position de la marche apparente ou avec un déhanchement, la cheville présenterait un pli ou une torsion. Le fait que le dessous du pied soit largement ouvert et qu’il n’y ait d’un seul tenon laisse envisager plus facilement une statue assise où la stabilité du personnage ne serait pas entièrement dépendante des pieds. 

Related pieces

L’œuvre Co. 208 est unique dans les collections du musée Rodin. 

Inscription

Anépigraphe. 

Historic

Acquis par Rodin auprès de l'antiquaire Oxan Aslanian en août 1911.

BOREUX 1913 : 551 bis. "Pied droit en bronze. Long 24 centimètres. Haut 14 centimètres. 2500 frs. "

Donation à l’État français en 1916.

< Back to collection

Pages