Ouchebti momiforme

Égypte > provenance inconnue 

Probablement Nouvel Empire, XVIIème ou début de la XVIIIème dynastie > 1650-1550 avant J.-C. > 1550-1295 avant J.-C.  

[voir chronologie]

Bois (Figuier sycomore) 

H. 19,5 cm  ; L. 7 cm  ; Pr. 5,4 cm 

Co. 2389  

Commentaire

Etat de conservation

L’objet est en mauvais état de conservation. On devine les traces d’une attaque ancienne de champignons jaune clair, qui a fragilisé les fibres en épaisseur. L’œuvre est parcourue de nombreuses fentes, plus ou moins profondes. On remarque également un petit manque sur le devant, sous la barbe postiche, et les reliefs sont de manière générale extrêmement émoussés. Toute la partie inférieure a disparu. Malgré une intervention qui a redonné au bois une certaine cohésion, celui-ci demeure très altéré, asséché et craquelé  ; la figurine reste fragile.  

Description

Pour autant que l’usure du bois permette d’en examiner les détails, ce chaouabti momiforme placé debout, jambes jointes, a le corps et les bras enserrés dans un suaire dont seule émerge la tête. Il arbore une perruque tripartite et une longue barbe postiche. Aucun enduit préparatoire ni aucune couche de polychromie ne semblent subsister en surface. Malgré l’altération de la statuette, on distingue un long visage ovale, des yeux étirés et peu ouverts, l’esquisse d’un nez droit et une bouche qui semble large et plutôt fine. On remarque également le contour de deux grandes oreilles placées devant la perruque. La forme du chaouabti dénote l’absence de bras. L’état de conservation de l’œuvre du musée Rodin ne permet pas de déterminer si le personnage tenait entre ses mains des outils agricoles ou portait un sac de grains suspendu dans le dos (Chaouabtis 2003, p. 28 et 31).  

 

Également appelés ouchebtis ou chabtis («  répondants  ») à partir de la Troisième Période intermédiaire et plus spécifiquement aux alentours de la XXIème dynastie, les chaouabtis  -des mots shaouabty «  statuette en bois  », ou/et shebi «  remplacer  » (Chaouabtis 2003, p. 11)-, sont en effet des serviteurs funéraires déposés dans les tombes, destinés à travailler pour le défunt dans l’au-delà et à assurer les corvées à sa place. Leur existence est attestée à partir de la fin du Moyen Empire. Néanmoins, au cours de cette période, ce sont plus généralement des «  modèles  » majoritairement en bois, petites figurines de travailleurs masculins ou féminins représentés en activité, que l’on retrouve dans les tombes. Il s’agit en particulier de brasseurs, de boulangers, de bouchers, figurines dont la présence dans les tombeaux est attesté dès l’Ancien Empire (pour un exemple de cuisinier en calcaire de la fin de l’Ancien Empire ou de la Première Période intermédiaire, voir la statuette du musée Rodin Co. 6434). Si dans les deux cas (chaouabtis ou modèles), ces figurines représentent des travailleurs affairés pour un membre de l’élite, les «  modèles  » font plutôt référence au défunt en tant que fonctionnaire zélé, capable de veiller à l’approvisionnement de son culte funéraire tandis que dans le cas du chaouabti, l’accent porte bien plus sur la possibilité qu’il bénéficie, dans l’au-delà, de serviteurs destinés à l’assister. En effet, au terme d’un parcours difficile et semé de dangers, le défunt est confronté à une vie en miroir de l’existence terrestre, où il lui est demandé d’assurer sa subsistance en cultivant des champs. Les chaouabtis permettent aux membres de l’élite de se soustraire à cette obligation, en se faisant remplacer par autant de doubles ou «  substituts  » que nécessite leur statut social, chargés par la magie des textes inscrits sur la figurine d’exécuter les corvées en leur nom. L’état actuel de la figurine Co. 2389 ne permet pas de déterminer si elle était inscrite ou non d’un texte, comportant le nom de son propriétaire et une formule magique succincte, tirée du Livre des Morts, et destinée à l’animer.  

 

Ce qui est conservé de la silhouette générale de ce chaouabti permet de le rapprocher de la catégorie des «  stick shabtis » ou «  ouchebtis-bâtons  » de la XVIIème et du début de la XVIIIème dynasties. De tels objets présentent en général peu de couleurs, seuls les traits du visage ou les lignes de textes étant peints en noir, ce qui s’accorderait avec la statuette du musée Rodin. Il est possible de la comparer avec d’autres chaouabtis mieux datés, celui du fonctionnaire Ipu daté de la XVIIe dynastie et exposé au Pelizaeus Museum d’Hildesheim (Inv. N° 6014 http://www.globalegyptianmuseum.org/record.aspx?id=11516), au chaouabti de Sapair, daté de la XVIIème ou de la XVIIIème dynastie et conservé au British Museum (Inv. N° EA 54835, https://www.britishmuseum.org/collection/object/Y_EA54835). La figurine du musée Rodin était peut-être déposée dans un cercueil, comme le chaouabti daté des XVIIème à XVIIIème dynasties retrouvé dans la tombe CC 43 par lord Carnavon et H. Carter à Thèbes (Assassif, Dra Abou el-Nagga) n° 14-10-10a-c, conservé au Metropolitan Museum of Arts de New York (https://www.metmuseum.org/art/collection/search/552366) ou, conservé dans le même musée, le chaouabti Inv. N° 90.6.93a-c, daté du règne de Thoutmosis III ((https://www.metmuseum.org/search-results#!/search?q=shabti%2090.6.93a-c%20). 

 

Outre l’allure générale et l’iconographie de la figurine, d’autres indices font également pencher vers une datation comprise entre l’extrême fin de la Deuxième Période intermédiaire et le début du Nouvel Empire. Ainsi, le matériau employé (un morceau de sycomore) indique la période comprise entre la XVIIème dynastie et la fin du Nouvel Empire, pendant laquelle le bois est particulièrement prisé, essentiellement les espèces indigènes à l’Egypte (tamaris, l’acacia et figuier sycomore).  

 

En conclusion, la figurine funéraire Co. 2389 daterait très probablement du Nouvel Empire, peut-être plus particulièrement des tout débuts de cette période (XVIIème-XVIIIème dynasties). Elle était vraisemblablement associée à d’autres chaouabtis réunis dans un coffret, et peut-être même issue d’un trousseau funéraire royal ou princier comme le suggère la présence d’une longue barbe postiche osirienne, attribut généralisé aux particuliers plus tardivement. 

Inscription

Anépigraphe. 

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