Modèle de sculpteur – Plaque représentant un roi

Egypte > provenance inconnue

Nouvel Empire à Basse Epoque ou époque ptolémaïque

[VOIR CHRONOLOGIE]

H. 11,6 CM; l. 11, 6 CM ; ép. 3,4 CM

Calcaire gris

Co.3059

Commentaire

Etat de conservation

L’œuvre est cassée sur les côtés. L’épiderme de la pierre est altéré à cause de l’humidité, notamment sur les pleins. De nombreuses griffures s’observent en surface.

 

Description

Modèle de sculpteur destiné à guider l’artisan dans la réalisation de reliefs, ce bloc comporte trois faces décorées. Chacune des faces est différente. Le chant supérieur a été aplani, le chant inférieur laissé brut.

La première face –la face A- correspond au visage d’un homme, vu de profil. La représentation s’arrête net au niveau de la coiffe. L’image correspond très vraisemblablement à celle d’un roi, tourné vers la gauche. La taille du visage est importante (11,6 cm de hauteur) et occupe toute la surface du bloc de calcaire. La coiffe n’est pas identifiable ; il peut s’agir de la base d’une couronne comme celle d’un némès. La ligne sommitale de cette coiffe rejoint en diagonale l’extrémité supérieure de l’oreille. Au-dessus, l’espace a été laissé vierge de tout décor. L’oreille, au modelé détaillé, est travaillée avec soin. L’œil, représenté de face, est profondément gravé ; la pupille a disparu dans un éclat. Il est cerclé d’un long trait de fard qui s’étend jusqu’à la tempe. Le sourcil est épais, aligné sur les traits de l’œil. Il présente des traces de repentirs, non estompés par l’artisan. Le nez et la bouche ont disparu dans une cassure, seule se distingue encore la commissure des lèvres. Les joues semblent pleines, le menton épais. Le modelé des chairs est souple (voir en particulier au niveau de la joue). Des traces d’outils subsistent le long de la nuque. La forme des différents éléments composant le visage suit un modelé net et précis, suggérant un souci pédagogique. De la terre de fouille est conservée dans les creux du visage.

Le profil s’enchâsse parfaitement dans un bloc de remploi (voir infra, descriptif de la face C). Ce fragment de calcaire a été par ailleurs scié à une époque ultérieure dans sa partie supérieure et inférieure (tentative de séparation des deux faces du bloc lors de leur mise sur le marché de l’art à l’époque contemporaine ?).

Sur l’autre face –la face B-, un buste, de profil également, a été gravé en relief sur un fond badigeonné de gris pâle. La surface de la pierre est émoussée, en particulier dans les parties inférieures du visage.

Le tracé précis et le travail délicat de la pierre soulignent l’expérience de l’artisan, maître des techniques du haut-relief. Les dimensions du personnage représenté sont moindres que sur l’autre face et le travail est resté  inachevé. Il s’agit probablement de l’image d’un roi, ou d’une reine, tourné vers la gauche, au front ceint d’un bandeau, au crâne recouvert d’une imposante coiffe qui va en s’arrondissant sur la nuque. Ce renflement suggère qu’elle est composée d’une matière textile. Il s'agit peut-être d'une coiffure-ibès. Le modelé des chairs est délicat, les proportions bien respectées. L’œil, représenté de face, est étiré en amande et cerclé d’un épais trait de fard qui s’allonge jusqu’à la tempe. La ligne de sourcil souligne l’élégance du regard. Le profil du nez est aquilin, la bouche souriante. L’oreille, nettement plus grande que les traits du visage, se détache nettement sur la coiffe. Bien conservée, quoique légèrement émoussée en surface, elle atteste d’un travail de finition abouti. Un trou circulaire représente l’orifice du conduit auditif externe. Profond, il contient de la terre de fouille. Malgré l’état de conservation médiocre de la partie inférieure du bloc, il est possible de comprendre que cette représentation correspond à un buste. Contrairement au visage, le torse a été laissé sans décor et les épaules sont visiblement absentes, remplacée par la ligne courbe du buste dont la partie arrière a disparu dans une large cassure (sur des modèles de sculpteurs sous forme de buste, voir les rondes bosses musée Rodin Co. 786 et Co. 829 (rois), ou Co. 826 (déesse ou reine divinisée). Comme pour le profil du roi de la face A, les courbes du personnage s’ajustent à un fragment de pierre antérieurement taillé. La ligne du sciage contemporain, qui rejoint celle de la partie inférieure de l’œuvre, s’y distingue.

Si les profils des faces A et B suivent l’iconographie du Nouvel Empire, il est vraisemblable d’y voir une œuvre archaïsante de la Basse Epoque.

Dans l’épaisseur du bloc, un troisième décor se distingue à l’arrière des profils royaux. Vestige d’une première gravure, il correspond à une phase antérieure d’utilisation du bloc et atteste de son remploi pour la représentation des profils royaux des faces A et B.

Composé d’écailles légèrement incisées, son orientation est inverse de celle des deux faces royales. Ce décor, que l’on peut appeler face C, semble correspondre soit au plumage d’un oiseau (pour comparaison, voir l’oiseau-ba  de la Glyptothèque Ny Carlsberg de Copenhague Inv. N° ÆIN 1279 acquis en 1911 en Egypte par Carl Jacobsen (JØRGENSEN 2009 a, N° 111 p. 256-257), soit aux écailles d’un reptile ou d’un saurien (pour comparaison, voir la statuette de crocodile de la Glyptothèque Ny Carlsberg de Copenhague Inv. N° ÆIN 274 (JØRGENSEN 1998, N° 147 p. 346-347), voire au pelage d’un bélier comme sur le modèle de sculpteur figurant une statuette de bélier de la Glyptothèque Ny Carlsberg de Copenhague Inv. N° ÆIN 248 (JØRGENSEN 2009 a, N° 144 p. 314).

L’ensemble a été installé à l’époque contemporaine sur un socle en bois. Comme pour l’encadrement du modèle de sculpteur à double-face musée Rodin Co. 5838, il s’agirait vraisemblablement d’une réalisation du sculpteur japonais Kichizo Inagaki, effectué à la demande de Rodin. L’utilisation d’un bois exotique, ainsi qu’une conception légère et peu intrusive, correspondent en effet à la sensibilité qui caractérise son travail. La structure des deux supports est cependant complètement différente. Pour le modèle de sculpteur Co. 5838, elle est pivotante, permettant ainsi de regarder chacune des deux faces, sculptées tête-bêche, dans le bon axe. Elle est au contraire fixe pour le Co. 3059, les deux faces étant taillées recto-verso. D’autre part, contrairement au modèle de sculpteur Co. 5838 qui reste enchâssé dans le support conçu par K. Inagaki, le système du Co. 3059 est composé en trois parties emboîtées qui laissent le bloc de pierre libre de son support.

Le numéro d’inventaire actuel est inscrit à l’encre noire sur pellicule isolante au bas d’une des tranches.

La collection égyptienne du musée Rodin ne possède pas de modèle de sculpteur similaire.

Des plaques à double-faces, utilisées comme modèles de sculpteurs, sont assez fréquentes du Nouvel Empire à la période hellénistique et romaine. Un exemple ptolémaïque est conservé au Metropolitan Museum of Art de New York sous le numéro d’inventaire 07.228.3.

Inscription

Anépigraphe. 

Historique

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

BOREUX 1913 : Hôtel Biron, 43, "Modèle en creux représentant une tête royale tournée vers la gauche, coiffée de [dessin] (cf. le n° 35) le haut de la coiffure manque. Calcaire. Haut. 13 ; Larg. 12. Estimé deux cent cinquante francs."

Donation Rodin à l'État français 1916.

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Relief funéraire en creux

Jeune femme debout, tournée vers la droite

Egypte > provenance inconnue

Fin de l’Ancien Empire à Moyen Empire

H. 19,1 CM : L. 9,7 CM P. 3,2 CM

Grès géologique

Co. 3048

Commentaire

Etat de conservation

L'œuvre est en bon état de conservation. Le fragment est cependant cassé au niveau des chants supérieur et droit. Toute la partie supérieure est brisée. On observe de nombreuses traces d’impacts sur l’ensemble de la surface. Le revers a été retravaillé ainsi que les chants, dont aucun n’est d’origine.

Description

Sur ce fragment de scène gravée en creux, un personnage féminin se tient debout, placé devant la jambe d’un personnage masculin représenté à une échelle très supérieure. Les parties supérieure et droite du décor ont disparu dans une cassure. Les parties gauche et inférieure ont été reprises à l’outil. Les nombreuses petites traces d’outils indiquent que ce relief a été déposé. Il appartenait à une composition murale plus large, située probablement dans une tombe.

 

Les deux personnages sont tournés vers la droite. La femme est coiffée d’une perruque tripartite à longues mèches et est vêtue d’une longue robe-fourreau à bretelle qui laisse apparaître son sein gauche, vu de profil. Elle est parée d’un collier court, placé contre son cou et composé de trois rangs de perles serrées. Ce type de collier ras (appelé parfois « collier de chien » par les élégantes), souvent accompagné de bracelets à rangs multiples, apparait dès le début de l’Ancien Empire et reste très populaire au début du Moyen Empire (voir par exemple les anneaux d’or conservés au musée égyptien du Caire (Inv. N° JE 92655-53, 56 et 70 ; ART EGYPTIEN 1999, Cat. 19 a, b et c p. 164) ainsi que les bracelet en ivoire conservés au British Museum (Inv. N° Ea 68316, 68317 et 68318 ; ART EGYPTIEN 1999, Cat. 20 a, b et C p. 165). Sur un fragment de stèle conservé dans la collection égyptienne du musée Rodin (Inv. N° Co. 908), trois dames, aux perruques et robes proches de celle de la femme du relief Co. 3048, portent aux poignets ces bracelets multiples (http://egypte.musee-rodin.fr/fr/collections/reliefs/co-908). En dépit de son allure juvénile, la robe moulante et la parure seyante indiquent que le personnage féminin représenté sur le fragment Co. 3048 est une jeune femme pubère et non plus une enfant. Son bras droit est allongé le long de son corps. L’état de conservation actuel du fragment ne permet pas de distinguer avec certitude de bracelet au niveau de son poignet. Elle tient son bras gauche replié devant elle. Un éclat a emporté l’objet qu’elle saisissait mais il est fort probable qu’elle tenait originellement une fleur de lotus portée à son visage.

 

La jambe du personnage se tenant derrière elle est de toute évidence masculine. L’homme est vêtu d’un pagne court dont toute la partie supérieure a disparu dans un éclat. L’absence du deuxième pied ainsi que la position générale de la jambe trahit une attitude dynamique. Il est possible que l’homme, propriétaire de la tombe d’où provient ce relief, ait été originellement représenté dans une scène dite de chasse et de pêche dans les marais, lançant un javelot en direction de gibier. Ce genre de scène, apparue à l’Ancien Empire sur les parois des tombes, resta populaire jusqu’au cours du Nouvel Empire. Il est également possible de suggérer que le petit personnage féminin représenté devant lui, membre de sa famille et invité à ce titre à figurer sur les reliefs de sa tombe, serait l’une de ses filles. Personnage secondaire du décor d’origine, elle est à présent placée au premier plan sur le fragment du musée Rodin.

 

Le style général rappelle les canons iconographiques de la fin de l’Ancien Empire ainsi que ceux du début du Moyen Empire.

Inscription

Anépigraphe. 

Historique

Acquis par Rodin auprès de l'antiquaire Joseph Altounian le 11 septembre 1912 ?

Donation Rodin 1916.

Commentaire historique

Ce bas-relief fut probablement acheté auprès de l’antiquaire Joseph Altounian qui l’expédia dans un lot d’objets le 31 août 1912 et le décrivit ainsi :  «  1 Relief en creux en coul femme deb. 100 » (ALT 147, archives musée Rodin).

 

L’antiquaire Joseph Altounian, écrivait à Rodin du Caire le 10 Août 1912 : « Cher Maître, J’ai l’honneur de vous faire savoir que je viens de rentrer aujourd’hui même au Caire après avoir accompli le voyage dans la Haute-Égypte dont voici les principales étapes. Éléphantine, Abydos, Phylae, Héracleopolis, Sakhara, Memphis, etc., ou j’ai séjourné pour recueillir pour votre collection des fragments de bas-reliefs, granit, calcaire, basalte, bref tout ce que j’ai jugé pouvant vous intéresser. Ce lot renferme 24 pièces des bas-reliefs et des reliefs en creux des grands et des petits, le tout appartenant aux différentes dynasties ayant régné dans les régions que j’ai traversées, plus 19 pièces de fragments en ronde bosse le tout présente la sculpture des meilleures dynasties. » J. Altounian était parti du Caire en juillet 1912, et l’on peut suivre son périple sur son agenda (archives Altunian) : Minieh, Mallawi, Assiout, Abou Tig, Assiout, Sohag, Achmim, Abou Tig, Baliana, Abydos, Baliana, Keneh, Kous, Louxor, Sohag, Achmim, Sohag, Mallawi, Le Caire, où il arriva le 7 août.

 

Le 28 Août 1912, Altounian écrit au sculpteur : « Cher Maître J’ai l’honneur de vous annoncer que je suis arrivée à Paris depuis quelques jours. Je me suis présenté 77 rue de Varenne mais on m’a dit que vous étiez absent ; jour cela. Je vous adresse la présente à votre adresse à Paris espérant qu’on vous la faira suivre. Donc je vous prie cher Maître de me dire le jour que vous rentrez à Paris afin que je vienne vous soumettre le bordereau avec la nomenclature des objets que je vous ai expédié du Caire.». Le 6 septembre, Altounian recevait de Rodin « la somme de frs 850 (huit cent cinquante francs) comme prêt pour m’aider à dégager les 6 caisses antiques de la Douane ; Monsieur Rodin n’est pas engagé à acheter ce lot d’antiquités s’ils ne lui plaisent pas. Il achètera que ce qu’il lui plaira.». Rodin choisit un grand nombre d’œuvres de ce lot dont le relief Co.3048 et versa à l’antiquaire 5000 francs le 11 septembre 1912.

 

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Relief – Divinité hiéraconcéphale

Egypte > provenance inconnue

Fin de la Basse Époque ou début de l’époque ptolémaïque

[VOIR CHRONOLOGIE]

H. 12,7 CM : L. 11,9 CM; P. 2,5 CM; Pds 0,38 Kg

Grès silicifié probablement, ou quarzite

Co.03047

Commentaire

Etat de conservation

L’œuvre est en bon état de conservation. Malgré quelques éclats, la surface est dans l’ensemble lisse et les traits ne sont pas altérés. On remarque malgré tout que la pierre, très argileuse, se décompose en nombreuses strates et feuillets rendant le matériau très fragile. Les chants latéraux droit et gauche correspondent à des cassures antiques. Les chants supérieurs et inférieurs ont été nivelés à l’époque contemporaine. Le revers est antique et correspond à un gros éclat de pierre.

Description

Sur un fragment de pierre sombre, possiblement du grès silicifié (voir DE PUTTER Thierry, KARLSHAUSEN Christina, Les pierres utilisées dans la sculpture et l’architecture de l’Égypte pharaonique. Guide pratique illustré, Bruxelles, 1992 pl. 30 «Tête du roi Djedefrê en grès silicifié (4ème dynastie) »), la tête et les épaules d’une divinité hybride, à corps d’homme et à tête de faucon, sont taillées. Le motif est en relief par rapport au fond. La divinité est de profil, tête tournée vers la droite. Une perruque tripartite à mèches longues recouvre l’arrière de son crâne. Il n’est pas impossible qu’un autre élément de coiffure (attribut ou couronne) ait été présent à l’origine. Du collier ornant son cou, seul se détache un rang de perles ; la silhouette d’un pectoral se devine en dessous. Le port de ce bijou était un artifice souvent utilisé par les sculpteurs égyptiens pour masquer la connexion entre un corps humain et la tête et le cou d’un animal.

On remarque l’épaisseur et la rondeur du relief modelé, caractéristiques de la fin de la Basse Époque et de l’époque ptolémaïque, ainsi que la teinte peu commune, brun rosé, de la pierre. Il faut également souligner la qualité de la sculpture, laquelle, en dépit des lacunes et des altérations en surface, met en valeur la physionomie du rapace, notamment le larmier nettement marqué, les appendices oculaires et le bec (voir à ce sujet G. Bénédite, « Faucon ou épervier, à propos d’une récente acquisition du Musée égyptien du Louvre », Monuments et mémoires de la Fondation Eugène Piot, t. 17, fasc. 1, 1909, p. 20-23). La réalisation des tracés est particulièrement fine et précise. Ainsi, l’œil du dieu est cerclé d’une double paupière protectrice, assurant au rapace un champ de vision décuplé, et surmonté de petites rémiges ; le bec est soigneusement modelé. On note l’ensemble des détails qui rendent le motif très vivant : les triples cercles entourant l’œil indiquent que celui-ci est en mouvement, comme à l’affût, l’œil grand ouvert du rapace conservant une vision faciale.

L’identité du dieu représenté est aujourd’hui hypothétique, l’absence d’inscription et le caractère fragmentaire ne permettant pas de se prononcer avec certitude entre les divers dieux-faucon que compte le panthéon égyptien, au sein duquel Horus et Rê-Horakhty sont les plus fréquemment représentés (sur les divinités faucon en Égypte, voir P. Vernus, « Faucon », dans P. Vernus, J. Yoyotte, Bestiaire des pharaons, 2005, p. 369-377).

Ce monument serait à considérer comme un « modèle de sculpteur » (sur cette dénomination problématique, voir B. v. Bothmer, « Ptolemaic Reliefs. IV. A Votive Tablet », Bulletin of the Museum of Fine Arts, vol. 51, no. 286 (Déc. 1953), p. 80-84) ; certains exemplaires découverts dans des sanctuaires et des cimetières de momies d’animaux sacrés auraient pu cependant constituer des offrandes votives (B. v. Bothmer, ibid., p. 83, n. 17). K. Myśliwiec a par ailleurs suggéré que ces petits reliefs pourraient être des « esquisses en relief », préparatoires aux reliefs décorant les parois des sanctuaires de cette époque (voir K. Myśliwiec, « Towards a Definition of the “Sculptor’s Models” in Egyptian Art », Études et Travaux 6, 1971, p. 71-75). Néanmoins, le contour accidenté et l’absence de contexte archéologique rendent l’interprétation difficile et Co. 3047 peut également être le fragment d’une plaque votive, ou d’un relief issu d’une paroi de temple ou de chapelle. Rappelons encore la couleur brun rosé de la pierre, alors que les plaques votives et « modèles de sculpteur » sont habituellement réalisés dans un calcaire blanc ou légèrement grisé (Voir, pour comparaison les modèles de sculpteur à double face Musée du Caire CGC 33463 (faucon) in TOMOUN 2005, N° 140 p. 236 et pl. 73a) et Musée du Caire CGC 14760 in TOMOUN 2005 N° 156 p. 239 et pl. 79).

Inscription

Anépigraphe. 

Historique

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

Boreux 1913 : Hôtel Biron, 146, Bas-relief fragmentaire en calcaire, représentant le profil tourné vers la droite et le haut de la poitrine d’un Horus hiéracocéphale ayant au cou un collier, les deux angles de gauche manquent ; la tête de l’oiseau est d’une grande finesse Basse Époque. 13 x 12. Estimé cent cinquante francs.

Donation Rodin à l'État français 1916.

 

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Plaque en forme d'Œil-Oudjat

Egypte > provenance inconnue

Nouvel Empire, probablement

[VOIR CHRONOLOGIE]

H. 2,4 CM : L. 2 CM ; P. 5,1 CM

Pierre noire, peut-être obsidienne

Co. 5940

Commentaire

Etat de conservation

L’œuvre est en bon état de conservation. Il n’y a pas de cassure ni d’éclat visible et sa surface est parfaitement lisse. De la terre de fouille est incrustée dans les plis.

Description

Cette amulette en forme d’œil-Oudjat a été réalisée dans une pierre noire de type obsidienne. L’œil-Oudjat, très répandu en Egypte ancienne, est aujourd’hui l’un des symboles les plus connus et représentatifs de cette civilisation. Il s’agit d’un œil humain fardé sous lequel se trouve une « moustache », terme ornithologique désignant les plumes sombres figurant la joue du faucon. Ce symbole trouve son origine dans la légende d’Horus et Seth. Cet œil est en fait celui que Seth avait arraché à Horus lors de leur combat mythique, puis déchiré en six morceaux. L’œil du malheureux Horus fut reconstitué par Thot et rendu à son propriétaire.

 

L’objet n’est pas ajouré et la surface de l’œil-Oudjat Co. 5940 est très lisse. Bien que de très petites dimensions, le choix de la taille permet de mettre en valeur les nuances de la pierre. Sur l’avers, les contours des sourcils et du blanc de l’œil sont légèrement gravés. L’amulette est pourvue d’une bélière, parcourue de deux sillons parallèles. La qualité de la gravure incite à une datation remontant au Nouvel Empire (voir, pour comparaison, les amulettes de l’époque d’Aménophis III). La pierre est de couleur gris foncé, presque translucide à certains endroits et mouchetée de noir. Elle rappelle les caractéristiques de l’obsidienne. L’obsidienne était accessible des Égyptiens via différents gisements asiatiques et africains et ce notamment par l’intermédiaire des routes commerciales. Si aux époques prédynastiques et à l’Ancien Empire elle est principalement utilisée pour la réalisation de petits récipients et de couteaux rituels, son utilisation dans la statuaire apparaît dès le Moyen Empire. C’est surtout à cette époque que l’on observe une production massive de pupilles de statues réalisées en obsidienne. Au Nouvel Empire, on assiste à une intense fabrication de petits objets et surtout d’amulettes en obsidienne. La pierre cessera d’être utilisée à partir de la Basse Époque. Il n’est pas toujours aisé de reconnaître l’obsidienne tant ses variations chromatiques peuvent être importantes. Néanmoins, il est fort probable qu’il s’agisse de la pierre utilisée pour l’amulette Co. 5940 en raison sa brillance, de son aspect vitreux et de ses teintes (voir DE PUTTER, KARLSHAUSEN, 1992, p. 111-113). L’œil-Oudjat est le symbole de l’intégrité, de la santé recouvrée et la plénitude physique. Oudjat signifie d’ailleurs « intact ».

 

La reconstitution de l’œil-Oudjat suivait un rite codifié dont les étapes sont représentées dans différents sanctuaires, notamment les temples ptolémaïques de Philae et de Dendera (voir en particulier Cauville Sylvie, L’offrande aux dieux dans les temples égyptiens (2010 version arabe ; 2011 version française ; 2012 version anglaise). Ces rites avaient pour but de s’assurer du retour de la pleine lune et de garantir le cycle cosmique. L’œil-Oudjat Co. 5940 est une amulette. Ces objets, aux dimensions généralement petites, apparaissent dès le début de l’histoire. Si le mot amulette peut être traduit de différentes façons en égyptien, l’étymologie renvoie toujours à la notion de protection. Les amulettes, réalisées en différentes matières, représentaient des symboles mythologiques, comme par exemple pillier djed, des signes hiéroglyphiques ou bien encore l’image de divinités. Mais il peut aussi s’agir de rouleaux de papyrus contenant des incantations magiques, pliés selon un certain procédé et portés par la personne à protéger. Cette tradition sera notamment très répandue au cours de la période ramesside (voir DONNAT, 2016). Avant le Nouvel Empire, les amulettes ont été généralement retrouvées en contexte funéraire. Ces objets « précieux » étant utilisés aussi bien par les vivants que pour les morts, et ce durant toute l’histoire pharaonique, on en plaçait, parfois en quantités conséquentes, entre les bandelettes des momies afin d’assurer au défunt un voyage paisible dans l’au-delà. Les amulettes sont également portées sur soi, soit en forme de pendentifs, de bracelets ou de bagues ; ce fut notamment le cas à Amarna (STEVENS 2009, p.10). La production des amulettes s’intensifia nettement au cours de la XVIIIème dynastie, aidée en cela par une fabrication quasi industrielle d’objets en faïence. Les amulettes, dont les matières devinrent de plus en plus variées, furent incluses en tant que bijoux dans les colliers ou les bracelets. Les amulettes, élément central de la piété populaire, nous informent sur les rituels ayant lieu au sein du foyer. Il n’est pas exclu que certaines d’entre elles étaient suspendues ou placées à divers endroits de la demeure afin d’assurer la protection de la maisonnée. Malheureusement, la documentation actuelle nous livre peu d’informations concernant les rites de consécration de ces objets. Il existe un nombre incalculable d’amulettes similaires à la Co. 5940 à travers les collections égyptiennes du monde.

 

Les yeux Oudjat pouvait être réalisés dans toutes sortes de matières, des plus simples au plus nobles. Les tailles varient également considérablement. Leur usage se retrouve dans différents contextes notamment mortuaire, funéraire, domestique et médical.

Inscription

Anépigraphe. 

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Sarcophage - Cuve d'Osiris accompagné de son épouse Isis

Égypte > provenance inconnue

Époque hellénistique et romaine

[VOIR CHRONOLOGIE]

H. 12,5 CM L. 5,3CM  P. 4,4 CM

Calcaire gris

Co. 5627

Commentaire

Etat de conservation

L’objet est en très mauvais état de conservation. Brisé en deux fragments jointifs recollés, sa surface est très émoussée. De nombreuses cassures et de nombreux éclats parsèment l’objet. Un fragment manque sur le rebord du sommet droit et à l’orifice inférieur de la cuve. Une cassure sépare le côté gauche du côté droit du sarcophage. Des traces d’outils sont observables dans la cavité. Aucune trace de polychromie n’a été décelée.

 

Description

Cette cuve de petites dimensions (12,5 cm de hauteur), a été taillée dans un calcaire gris, aujourd’hui friable. Elle adopte la forme d’un sarcophage. Au revers, on distingue un haut-relief figurant deux personnages debout, les pieds reposant sur une base. Osiris se tient à gauche, Isis à droite. Toutes les proportions sont exagérément allongées. Osiris, le dieu des morts, est nettement plus grand et domine la scène. Présenté sous son aspect momiforme, il est gainé dans un linceul, bras repliés sur la poitrine, tenant un  sceptre-héqa, regalia pharaonique en forme de crosse. Il est coiffé d’une haute couronne Atef. Isis apparaît à ses côtés, debout, bras allongés le long du corps. Elle semble nue et arbore la coiffe hathorique composée d'un disque solaire encadré par des cornes. L’état de conservation très érodé de sa représentation ne permet plus de discerner sa robe moulante. Isis est presque deux fois plus petite que son époux Osiris. Cette disproportion est en partie compensée par la hauteur vertigineuse de la couronne de la déesse.

 

Osiris est une des divinités les plus importantes du panthéon égyptien. Au IIe siècle, Plutarque rédige De Iside et Osiride, seul récit presque complet de la légende osirienne. Nous devons aussi notre connaissance du mythe et du culte d’Osiris à d’autres auteurs classiques tels que Hérodote, Strabon, ou encore Diodore de Sicile. Plutarque raconte comment Osiris fut mis au monde par Nout le premier des cinq jours épagomènes et comment il apporta la civilisation au peuple d’Egypte. Mais Seth, son frère jaloux, fit construire un sarcophage à ses dimensions et promit, lors d’un banquet, de l’offrir à celui qui pourrait s’y allonger. Quand ce fut le tour d’Osiris, il referma le couvercle, le fit jeter dans le Nil où il atteignit la mer par la branche tanitique. Sa sœur et épouse, Isis, apprenant qu’il était arrivé à Byblos, parti le rechercher. Une nuit, Seth le retrouva et le découpa à la hache en quatorze morceaux qu’Isis partit ensuite chercher dans les marais du Delta. Elle aurait offert une sépulture à chaque morceau ou bien, selon d’autres, elle aurait fabriqué des simulacres du corps afin que son époux soit adoré dans toutes les villes d’Egypte. Néanmoins, elle ne put retrouver le phallus, dévoré par le pagre, l’oxyrhynque et le lépidote. Plutarque ne mentionne pas la confection d’un faux phallus par Isis et son union au dieu mort, engendrant ce jour-là Horus. Isis est parfois représentée sous la forme d'un milan dans ce contexte.

 

Dès lors, Osiris, tué par son frère Seth, devint le dieu des morts et du jugement des défunts. Dieu ressuscité grâce à Isis, il est également celui de la renaissance et de la végétation. Il est presque toujours représenté de façon momiforme, portant la couronne-atef, la couronne-henou, le némès, le disque solaire ou lunaire, des sceptres, un uraeus ou parfois ayant le corps remplacé par un pilier-djed. Le dieu est également reconnu dans la constellation d’Orion tandis qu’Isis se manifeste en Sothis, l’étoile annonçant l’inondation. L'étymologie de son Wsjr reste énigmatique.

 

Au premier millénaire, Osiris fut l’objet d’un culte plus prestigieux que celui d’Isis. En effet, lors des périodes de troubles et de déclins politiques, Osiris, dieu ressuscité, polarisait les espoirs d’une population et son besoin d’une religion de salut. Sa personnalité et ses rites se démultiplièrent alors, les rituels variant en fonction des localités ; certaines formes du dieu sont d’envergure nationale tel qu’Osiris d’Abydos. Si peu de temples lui furent consacrés, chaque grand sanctuaire se vit doté d’une chapelle dédiée à son culte. Sous les Ptolémée, un temple lui fut construit ainsi qu’à la déesse Opet dans l’enceinte sacrée de Karnak. A l’époque impériale, un temple lui fut dédié ainsi qu’à Isis dans l’oasis de Kharga, à Douch.

 

Élaborée à l’origine à Abydos et à Bousiris, la fête de Khoïak était une des fêtes osiriennes les plus populaires. Les textes de Dendera nous rapportent qu’elle avait lieu le 4e mois de la saison des crues et Hérodote nous indique que les cérémonies, nocturnes, commémoraient la quête d’Isis partie recueillir les différentes parties du corps d’Osiris. Elle illustre également un aspect secondaire d’Osiris, l’aspect agricole, ainsi que son association à Népri, dieu des moissons. Des figurines du dieu étaient façonnées en terre ainsi que des « jardins d’Osiris », nom donné à des cuves qui prenaient la forme du dieu gainé, emplies de terre et où des graines étaient semées. Le rituel avait lieu dans les chapelles osiriennes de différents temples. La végétation qui en poussait symbolisait la fertilité, aspect essentiel de la personnalité d’Osiris. Ces cuves pouvaient également avoir l’aspect de sarcophage, sur lequel était gravé la représentation d’Osiris avec ou sans Isis. Le sarcophage symbolise le ventre de Nout, permettant à Osiris de renaître. Le 26e jour des cérémonies correspondait au point culminant du rite, étant celui de la fête de Sokar-Osiris, jour de la renaissance du dieu. Dans la nuit du 30ème jour, les moules étaient enfouis et les végétaux ayant poussé des « jardins d’Osiris » jetés à l’eau. C’était la clôture du cycle des mystères d’Osiris.

 

Co. 5627 serait donc à voir comme l’un de ces sarcophages. La partie interne étant creusée en forme d’obélisque et un orifice circulaire ayant été ménagé dans la partie inférieure de la base sur laquelle les époux divins se tiennent, il lui a peut-être été prévu comme fonction celle d’un « jardin d’Osiris », cuve d’Osiris végétant destinée à participer à la fête de khoïak. C’est par cet orifice que s’écoulaient -virtuellement- les humeurs fertilisantes du dieu momiforme ainsi que les eaux purificatrices versées sur le sarcophage pendant les libations.

 

La collection égyptienne du musée Rodin ne possède pas d’objet similaire. La plupart des cuves d’Osiris végétant retrouvées sont en terre cuite à l’instar de celle conservée sous le numéro d’inventaire 20.2.30 au Metropolitan Museum of Art de New York.

 

Inscription

Anépigraphe.

Historique

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

BOREUX 1913 : Meudon / pavillon de l'Alma / vitrines 23 et 24, 520, "Un sujet phallique en calcaire (9 x 5), partie supérieure d'une statuette osiriforme en bois (long. 20 cent.), un petit sarcophage en calcaire portant en relief sur sa partie supérieure Osiris et Isis (Haut. 12 cent. 1/2 ; objet faux). En tout trois objets. Sans valeur."

Donation Rodin à l’État français en 1916.

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Fragment de groupe royal ou divin

déesse ou reine déifiée

Égypte > Provenance inconnue

Époque romaine probablement > 30 avant J. C. – 395 après J. C.

Granodiorite

[voir chronologie]

H. : 48 cm ; L. : 39,6 cm ; P. : 33 cm 

Co. 5900 

Commentaire

Etat de conservation

Le fragment appartient sans doute à un groupe statuaire dont la majeure partie a disparu. En effet, la trace d’arrachement latérale visible à la gauche du personnage féminin du musée Rodin et la grande plaque sur laquelle il s’adosse permettent de restituer qu’un second personnage se tenait à ses côtés. Seule la partie supérieure du personnage féminin, conservé jusqu’au-dessous de la poitrine, est parvenue jusqu’à nous. L’amorce de ses bras est encore perceptible. Un important fragment est manquant au niveau de la partie gauche de sa tête : la cassure est oblique et assez nette, témoignant peut-être d’un débitage ancien de la pierre. De même, l’arrière de la tête et le dos du fragment conservé sont très lacunaires ; l’appui dorsal est très abîmé en surface et son polissage semble n’avoir jamais été achevé. Ailleurs, toute la surface de la statue est en bon état malgré des épaufrures et rayures nombreuses. Quelques concrétions de terre sont localisées dans les interstices des gravures. Un trait rouge, situé sous le sourcil droit, constitue l’unique trace conservée de la polychromie antique. Des vestiges de matière plâtreuse au niveau du nez et dans la partie basse de la statue indiquent une restauration, contemporaine de son arrivée sur le marché de l’art. Ces éléments parasites ont été dissimulés à l’aquarelle lors de la campagne de restauration de 2016.

Description

Ce fragment a été décrit antérieurement comme provenant d’un couvercle de sarcophage en pierre, ce qui paraît peu probable compte tenu de son caractère particulièrement massif et de l’aspect de la partie arrière, qui semble bien correspondre à un pilier dorsal. Le fragment de statue Co. 5900 serait plus vraisemblablement la partie droite d’un groupe statuaire monumental, peut-être une dyade royale ou divine. L’image est celle d’une femme, comme l’indiquent sa silhouette et sa coiffe de déesse ou de reine déifiée. Un second personnage - au moins - devait se tenir à sa gauche, comme le suggère le large appui dorsal qui se continue vers la gauche. L’attitude des deux personnages est aujourd’hui perdue et il est impossible de préciser si ceux-ceux-ci étaient figurés debout et/ou assis. L’amorce des bras du personnage féminin est conservée mais reste difficile à interpréter. Il peut être envisagé qu’elle tenait son bras droit le long du corps ou bien le posait sur sa jambe droite dans le cas d’une attitude assise, alors qu’il semble qu’elle avance son bras gauche vers le côté gauche, pour enlacer un second personnage aujourd’hui disparu. Cette restitution présumée incite à voir dans la statue Co. 5900 l’élément d’une dyade représentant un couple, réel ou symbolique, royal, divin, ou bien les deux tout à la fois. 

 

Le personnage conservé est coiffé d’une longue perruque tripartite enveloppante, couvrant les épaules et cachant les oreilles, surmontée d’une dépouille de vautour dont les ailes encadrent le visage. Malgré la cassure, il est possible de suggérer que la perruque était dotée d’une raie médiane. Les détails incisés de la coiffe – mèches bouclées de la perruque et plumes du vautour - sont nombreux, précis et de bonne qualité. En plus de cette coiffure complexe, lourde et spectaculaire, la femme est vêtue d’une robe à bretelles et à décolleté trapézoïdal, couvrant une poitrine menue sous laquelle on peut observer une ligne de couture du vêtement. Ornant son cou, les lignes de démarcations d’un large collier large sont observables entre les pans de la perruque. Il s’agit d’un pectoral laissé vide, mais aux détails peut-être peints à l’origine. Le visage, ovale et aux joues pleines, semble engoncé dans la perruque et paraît légèrement disproportionné, en retrait. Les yeux sont singulièrement petits, soulignés par un trait de fard relativement large et court qui s’étend vers les tempes, maquillage légèrement asymétrique puisqu’il s’étire plus brusquement vers le haut sur l’œil droit que sur l’œil gauche. Les sourcils, traités en léger relief, sont presque horizontaux. Le nez est droit et fin ; la bouche petite, fine et  charnue, esquisse un sourire en demi-lune très discret. En l’absence d’inscription, l’identification du personnage représenté et la datation de l’œuvre ne peut être envisagée qu’à l’aide de critères stylistiques ou iconographiques. 

 

La perruque enveloppante est une coiffure féminine qui apparaît dans l’art égyptien au cours de la XVIIIdynastie. Au Nouvel Empire, elle est fréquemment associée au vautour déployé dans la statuaire des reines - motif dit de « dépouille de vautour » -, puis de certaines déesses. Le rapace est pour sa part présent dans les coiffures des épouses royales depuis l’Ancien Empire et plus précisément la IVe dynastie (ZIEGLER Christiane (éd.), Reines d’Égypte : d’Hetephérès à Cléopâtre, catalogue d’exposition, Forum Grimaldi, Monaco, 12 juillet - 10 septembre 2008, Monaco, 2008, p. 118-121, 311, n° 137). On a voulu longtemps faire de ce vautour un attribut exclusif de la reine-mère, c’est-à-dire ayant enfanté l’héritier du trône, par le biais d’un jeu de mot impliquant le hiéroglyphe du vautour qui sert à écrire le nom commun « mère » en égyptien ancien en raison de sa valeur phonétique (Gardiner Sign-List G14). Quoi qu’il en soit le vautour , d’abord associé à la déesse Nekhbet, protectrice de la royauté, est un attribut fréquent de la déesse Mout, épouse d’Amon, le dieu dynastique, dont il sert aussi à écrire le nom. Cet attribut sera emprunté ensuite par d’autres déesses, au premier rang desquelles figure Isis, l’épouse d’Osiris. Dans le cas présent, il paraît difficile de trancher sur l’identité du personnage représenté : il pourrait s’agir d’une reine ou d’une déesse, Isis semblant une bonne candidate eût égard au nombre d’images connues de cette divinité à la période présumée de cette statue.

 

La datation de l’œuvre est problématique. La robe portée par le personnage est très proche de celle dont sont vêtues les quelques reines du Moyen Empire dont des statues nous sont parvenues, mais elle est attestée également aux époques suivantes. La perruque enveloppante suggèrerait une date postérieure à la XVIIIe dynastie, ce que semble confirmer le style du visage, qui reste néanmoins très atypique : sa forme ovale, le nez droit et les petits yeux surmontés de sourcils horizontaux, les joues pleines, sont autant d’éléments qui suggèrent une datation très tardive, d’époque ptolémaïque voire même plutôt romaine, avec toute la prudence qui s’impose. La combinaison entre ce visage tardif et le vêtement et la coiffure archaïques pourrait indiquer que la tête de la statue aurait été retaillée à l’époque gréco-romaine, à partir d’une œuvre plus ancienne d’époque pharaonique. Cette hypothèse, formulée là encore avec de grandes précautions, aurait le mérite d’expliquer à la fois le mélange de styles observé, de même que le retrait et la légère disproportion de la tête, enfoncée dans la perruque et dont les côtés sont bordés d’un curieux et trop large espace qui les sépare de la coiffe.

Œuvres associées

Le musée Rodin ne conserve aucune oeuvre similaire. 

Inscription

Anépigraphe. 

Historique

Ancienne collection Giovanni Dattari.

Acquis par Rodin entre 1912 et 1913.

BOREUX 1913 : Hôtel Biron, 77, "Partie supérieure d'un couvercle de sarcophage de femme en basalte noir (granit gris) assez abimé. La partie gauche de la coiffure manque et le granit est très abimé. Epoque romaine. Haut. 52 cent. Larg. 40 cent. Estimé mille francs. N° 298 de la vente Lambros Dattari 1912."

Donation à l’État français en 1916.

Commentaire historique

L’œuvre provient de l’ancienne collection d’antiquités égyptiennes de Giovanni Dattari (1853-1923), collectionneur italien resté surtout célèbre en tant que numismate (DAWSON 2012, p. 143 ; SAVIO 2008, p. 275-285).

Elle figurait à la vente Lambros-Dattari, qui s'est tenu à l'hôtel Drouot du 17 au 19 juin 1912 et portait le numéro 298 : « Buste d’Isis en basalte noir ; elle est coiffée du calft finement sculpté, la partie supérieure simulant les ailes du vautour. Jolie sculpture égypto-romaine. Cassure sur le haut de la tête. H. 50 cent (planche XXXI). Sur l’illustration du catalogue, on remarque que le nez est entier ainsi qu’il y a un bouchage sur le front, éléments qui ont aujourd’hui en partie disparus, ne laissant que des traces de plâtre de scellement. D'après le procès-verbal de la vente, l'oeuvre fut alors achetée par l'antiquaire Brimo pour 450 francs, puis revendue à Rodin par lui-même ou par un autre antiquaire avant l'été 1913, date de l'inventaire de Charles Boreux (Archives de Paris).

 

La tête fut exposée du vivant de Rodin à l’hôtel Biron, parmi les chefs-d’œuvre de la collection égyptienne, là où Charles Boreux la décrivit à l’été 1913 dans l’inventaire qu’il fit en vue de la donation à l’État français.

 

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Sarcophage - Fragment de couvercle anthropoïde

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE

FIN ÉPOQUE TARDIVE OU DÉBUT ÉPOQUE PTOLÉMAÏQUE > XXVI– XXXIdynastie > 656 - 30 AVANT J.-C.

[voir chronologie]

CALCAIRE POLYCHROMÉ

H. : 27,4 cm ; L. : 27 cm ; P. : 14,7 cm 

Co. 967

Commentaire

Etat de conservation

L’œuvre est un fragment du couvercle d’un sarcophage anthropoïde en pierre, dont seul le visage est conservé au musée Rodin ; le reste du couvercle et la cuve associée ont disparu. La majeure partie de la perruque, des oreilles et du menton ont disparu. La polychromie d’origine est encore partiellement conservée : les sourcils et l’iris des yeux sont peints en noir, alors que la ligne de démarcation entre la perruque et le front est peinte en rouge, couleur utilisée également pour rehausser la bouche. Des pointes de rouge-rosé soulignent l’intérieur de chaque extrémité du contour des yeux. L’œuvre comporte de nombreuses éraflures et épaufrures en surface, conséquences probables de manipulations récentes. Une tache de rouille, dont l’origine n’est pas identifiée, macule le coté droit de la perruque ; sur la joue droite, à proximité de la narine, une tache verte épaisse correspondrait à des résidus de corrosion du cuivre, dont l’origine est également inconnue. Quelques éclaboussures de peinture orangée sont perceptibles sur la joue droite et sous la lèvre inférieure, du côté droit. Le revers, laissé brut, est parsemé de traces d’outils de taille de pierre. Enfin, une étiquette octogonale blanche et bleue, ancienne et sans inscription lisible, est collée sur la cassure, au niveau de la partie supérieure du crâne.

Description

L’état de conservation de l’œuvre ne permet qu’une description limitée. L’aspect général de l’œuvre, son style et surtout la partie arrière, laissée brute et légèrement incurvée, ne laissent aucun doute quant à sa nature : il s’agit du fragment du visage d’un couvercle de sarcophage anthropoïde en pierre. Les détails du visage sont peu nombreux à commenter mais il faut noter le départ d’une perruque lisse - sans doute tripartite - et des joues pleines. De par l’état fragmentaire de l’objet, les yeux du personnage sont particulièrement mis en valeur. Grands et rapprochés, la pointe lacrimale de l'oeil descend légèrement, l'autre extrémité remonte vers les tempes, et les paupières sont soulignés d’un trait de fard qui se prolonge jusqu’aux tempes en suivant la courbure de la paupière supérieure ; le tout est traité en léger relief. Les sourcils, d’abord horizontaux, se courbent très légèrement vers les tempes.

 

Au regard de son état fragmentaire, il est impossible de savoir si le sarcophage était destiné à accueillir une femme ou un homme.

 

Quelques détails stylistiques incitent néanmoins à dater ce visage de la fin de la Basse Époque ou de la première moitié de l’époque ptolémaïque. Les joues pleines et l’expression sereine du visage, le rendu des yeux et la bouche fine largement badigeonnée d’ocre rouge rappellent des parallèles tardifs (Type E, b, cf. BUHL Marie-Louise, The Late Egyptian Anthropoid Stone Sarcophagi, Arkæologisk-Historisk Række VI, 1959, p. 18-19, 69-91 ; LEITZ Christian, MAHROUS Zeinab, TAWFIK Tarek (éd.), Catalogue of Late and Ptolemaic Period Anthropoid Sarcophagi in the Grand Egyptian Museum, GEMP I, 2018 (passim). Bien que comparable à un autre fragment de sarcophage conservé au Musée Rodin (Co. 5781), celui-ci est sans doute un peu plus tardif.

Œuvres associées

Le musée Rodin conserve un fragment de sarcophage comparable, Co. 5781, bien que celui-ci soit un peu plus tardif. 

Inscription

Anépigraphe. 

Historique

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

BOREUX 1913 : Meudon / Objets non en vitrine / salle des antiques, 541, "Masque en calcaire compact ?, provenant sans doute d'un sarcophage. La coiffure manque. Une main moderne a rehaussé de couleur le bandeau du kleft, les yeux et la bouche. Haut. 29 cent. Environ. Estimé dix huit cents francs."

Donation Rodin à l'État français 1916.

Commentaire historique

L’œuvre était exposée en 1913, dans la salle des antiques à Meudon. Elle fut déposée au Département des Antiquités égyptiennes du musée du Louvre en 1933, où elle fut inventoriée sous le numéro E. 15551, « Face d’un cercueil anthropoïde en calcaire, menton mutilé. Epoque ptolémaïque, Haut. 0,28 » dépôt auquel le musée Rodin a mis fin en 1967 pour sa présentation dans l’exposition Rodin collectionneur.

 

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Sarcophage - visage

Égypte > Provenance inconnue

Basse Époque ou première moitié de l’époque ptolémaïque > XXV– XXXIdynastie > 656 – 30 avant J.-C. 

[voir chronologie]

H. : 40 cm ; L. : 49 cm ; P. : 29 cm 

Calcaire peint

Co. 5781 (= Louvre E 15550)

Commentaire

Etat de conservation

Cet élément correspond à la partie supérieure du couvercle d’un grand sarcophage anthropoïde en pierre, plus particulièrement à la tête d’un personnage et le départ de son épaule gauche ; le reste du couvercle et la cuve associée ont disparu. Le couvercle a été violemment fracturé, à une époque ancienne, au niveau du cou. La perruque est fissurée et l’extrémité des pans est manquante. L’arrondi de l’épaule droite a complètement disparu ; le départ de l’épaule gauche est conservé. Le nez est presque totalement perdu, mutilé par un violent éclat, mais le reste du visage est bien conservé. Des traces de polychromie sont encore visibles : la ligne de démarcation du front et de la perruque, les sourcils, les paupières et l’iris des yeux sont rehaussés de noir. Sur les deux côtés de l’œuvre, la surface est abîmée par endroits et présente de nombreuses éraflures ou épaufrures. Le revers offre un poli moins abouti que la partie extérieure du couvercle, la seule destinée à être visible. 

Description

Le personnage porte une perruque tripartite, volumineuse et lisse, qui laisse les oreilles dégagées. L’extrémité des deux pans avant de cette coiffure est perdue.  Le visage est trapézoïdal, les joues sont pleines et le menton en galoche. Les yeux sont grands ouverts, avec la pointe lacrymale allongée presque horizontale qui touche le nez. La distance nabionasale est courte, avec le canal indiqué. La bouche est petite aux lèvres charnues, esquissant un léger sourire.

La perruque, le visage, la forme des yeux, des sourcils et de la bouche, le menton en galoche impliquent une datation après la fin de la XXVIe dyn. et le début de l'époque ptolémaïque, ce que confirme la typologie.

La typologie des sarcophages anthropoïdes en pierre de la Basse Époque, établie par M.-L. BUHL, confirme cette datation tardive. Elle fournit quelques parallèles (Type E, b, cf. BUHL Marie-Louise, The Late Egyptian Anthropoid Stone Sarcophagi, Arkæologisk-Historisk Række VI, 1959, p. 18-19, 69-91) auxquels il faut ajouter notamment un fragment conservé au Musée Royal de Mariemont à Bruxelles (DERRICKS Claire, in Cl. DERRICKS, L. DELVAUX (éd.), Antiquités égyptiennes au Musée Royal de Mariemont, Bruxelles, 2009, p. 356-357, inv. B. 1). Le fragment de Mariemont a été lui-même mis en relation avec plusieurs œuvres, qui présentent également des affinités stylistiques et typologiques avec le fragment du musée Rodin (KAKOSY Laszlo, « Ein Sarkophag aus der Ptolemäerzeit im Berliner ägyptischen Museum », in Festschrift zum 150 jährigen Bestehen des Berliner Ägyptischen Museums, Staatliche Museen zu Berlin, Mitteilungen aus der ägyptischen Sammlung VIII, Berlin, 1974, p. 113-150, pl. 13-15 ; JØRGENSEN Mogens, Catalogue Egypt, III : Coffins, Mummy Adornments and Mummies from the Third Intermediate, Late, Ptolemaic and the Roman Periods (1080 BC-AD 400), Copenhague, 2001, p. 248-285 ; D’AURIA Sue H., VAN DIJK Jacobus (éd.), Objects for Eternity. Egyptian Antiquities from the W. Arnold Meijer Collection, catalogue d’exposition, Amsterdam, Allard Pierson Museum, 17 novembre 2006 - 25 mars 2007, Mayence, 2006, p. 248-250, n° 3.58 ; Boston Museum of Fine Arts inv. 12.1511, cf. D’AURIA Sue H., LACOVARA Peter, ROEHRIG Catherine H. (éd.), Mummies and Magic. The Funerary Arts of Ancient Egypt, catalogue d’exposition, Boston, Museum of Fine Arts, 14 septembre - 11 décembre 1988, Boston, 1988, p. 193, n° 139). On peut ajouter un autre fragment conservé à Boston, daté de la XXVIedynastie ou plus tard (MFA inv. 05.109) ainsi que quelques exemples conservés au Grand Musée Égyptien de Giza récemment publiés (LEITZ Christian, MAHROUS Zeinab, TAWFIK Tarek (éd.), Catalogue of Late and Ptolemaic Period Anthropoid Sarcophagi in the Grand Egyptian Museum, GEMP I, 2018, passim). 

Inscription

Anépigraphe. 

Historique

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

BOREUX 1913 : Meudon, Objets non en vitrine, salle des antiques, 542, "Partie inférieure (tête coiffure et naissance de l'épaule gauche) d'un couvercle de sarcophage, en calcaire compact, le nez manque ; les sourcils et l'entourage des yeux sont en léger relief. Haut. 45 cent. Larg. 50 Epaisseur 30. Estimé douze cents francs."

Donation Rodin à l'État français 1916.

Commentaire historique

L’œuvre était exposée en 1913 à Meudon, dans la salle des antiques, hors vitrine, avec le Co. 967.

Elle fut déposée au musée du Louvre en 1933-1934 et inventoriée sous le n° E. 15550 « Tête d’un cercueil anthropoïde en calcaire, époque ptolémaïque, nez mutilé. Haut. 0,40 » dépôt auquel le musée Rodin mis fin en 1967 pour sa présentation au musée Rodin dans l’exposition Rodin collectionneur.

 

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Osiris

Égypte > Provenance inconnue

Basse Époque > XXVI- XXXdynastie > 656 – 332 avant J.-C.

[voir chronologie]

Pierre dure noire (basalte ?)

H. : 44,5 cm ; L. : 10 cm ; P. : 24 cm

Co. 5765

Commentaire

Etat de conservation

La statuette, qui se présentait en plusieurs fragments, a été recollée par le passé, comme en attestent les longues fissures encore visibles, remplies d’un matériau de comblement noir ou rougeâtre par endroits, légèrement plus brillant que la pierre d’origine. Une importante lacune au niveau du bas-ventre est remplie du même matériau. L’arrière du pilier dorsal présente des traces de collage bien visibles et renseigne sur l’état très mauvais de la statue avant remontage. La partie arrière gauche de la base rectangulaire est perdue, de même que le haut de la couronne blanche qui orne la tête du personnage et le fragment de pilier dorsal associé, ainsi que l’oreille droite ; la partie arrière droite de la base est également très abîmée. Quelques traces à la base du cou, au niveau du front mais aussi sur le corps de l’uraeus et sur le pilier dorsal indiquent que la statuette était dorée (entièrement ou partiellement). 

Description

Le personnage représenté est le dieu Osiris, qui se tient debout les pieds joints, gainé dans un linceul. Il repose sur une base rectangulaire et s’appuie à un pilier dorsal légèrement penché vers la droite et dont les bords semblent converger dans la partie supérieure, malheureusement presqu’entièrement manquante : ceux-ci formaient peut-être un triangle, conférant ainsi au pilier l’aspect d’un obélisque auquel Osiris était adossé. Le dieu a les deux bras croisés sur la poitrine et tient dans la main droite un sceptre heqa et dans la main gauche un fouet nekhakha, insignes de la royauté pharaonique et attributs très fréquents d’Osiris, le premier roi d’Égypte, qui fut, après sa résurrection, amené à gouverner le royaume des morts. Le menton du dieu est orné de la barbe postiche recourbée dont les détails du tressage sont incisés. Cet attribut souligne de par sa courbure sa nature divine. La barbe est maintenue par une jugulaire, elle aussi incisée dans la pierre. Osiris porte encore un autre marqueur de la royauté : la couronne blanche de Haute-Égypte, très bombée sur les côtés, ornée d’un uraeus frontal, dressé, dont la queue remontait très haut sur la couronne et se perd aujourd’hui dans la lacune.

 

Le visage de la divinité est sculpté avec une grande finesse. Les yeux présentent un aspect très proche du signe hiéroglyphique associé, leur coin interne plongeant vers le bas et l’autre remontant vers le haut. Ils sont doublés d’un liseré de fard qui se prolonge jusqu’au départ des tempes. Les sourcils en suivent la forme. Presque horizontaux, ils vont en s’inclinant sur les côtés et se redressent légèrement à leurs extrémités. Les oreilles sont sculptées avec soin, le lobe se détachant particulièrement. Le nez est très légèrement busqué, le front court, la bouche peu charnue mais aux commissures marquées et esquissant un léger sourire qui rappelle la statuaire saïte. 

 

En l’absence d’inscription, il est possible de proposer une datation pour cette œuvre essentiellement sur des bases stylistiques, mais celle-ci s’avère difficile, faute de critères suffisants. L’époque saïte paraît probable. Le visage d’Osiris présente des caractéristiques proches de la statuaire thoutmoside, mais ceci pourrait s’interpréter comme un trait archaïsant, hommage au passé fréquent à la fin de la XXVet au début de la XXVIdynastie. Osiris, divinité très ancienne du panthéon pharaonique, connut un engouement particulier au premier millénaire avant J.-C., qui se traduisit notamment par une production massive de statuettes en métal mais aussi en pierre. La statuette du musée Rodin en serait vraisemblablement un témoignage. La XXVet la XXVIdynastie correspondent à l’âge d’or de la production des statuettes d’Osiris en pierre, souvent dorées, dont on a retrouvé plusieurs exemplaires notamment dans la Cachette de Karnak (COULON Laurent, « Les statues d’Osiris en pierre provenant de la Cachette de Karnak et leur contribution à l’étude des cultes et des formes locales du dieu », in L. COULON (éd.), La Cachette de Karnak. Nouvelles perspectives sur les découvertes de Georges Legrain, BdE 161, 2016, p. 505-563). La statuette du musée Rodin est donc probablement à dater de cette époque et à rapprocher de ce corpus : du point de vue du style, une comparaison avec la statuette Caire JE 37010 paraît ainsi pertinente, cette dernière étant datée du règne de Psammétique Ier.

 

Les traces de dorure encore observables suggèrent que celle-ci ne se limitait pas aux carnations du dieu et à ses parures, mais devait être généralisée, une pratique attestée par ailleurs. Destinée à être déposée dans un temple ou dans une tombe, il n’est pas certain que cette statuette ait été achevée malgré le soin porté à sa réalisation, compte tenu de l’absence d’inscriptions.

Inscription

Anépigraphe. 

Historique

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

BOREUX 1913 : Hôtel Biron, 62, "Osiris debout sur une base adossé à un pilier. Il est coiffé de la couronne blanche et tient les attributs habitueles. Le haut de la coiffure manque, ainsi qu'un des angles de la base. Le monument est anépigraphe, il est cassé en un très grand nombre de morceaux qui ont été réassemblés. Basalte. haut. 45 cent. Estimé quatre cent francs."

Donation à l’État français en 1916.

Commentaire historique

La statuette fut exposée à l’hôtel Biron, parmi les chefs-d’œuvre de la collection égyptienne, là où Charles Boreux le décrivit à l’été 1913 dans l’inventaire qu’il fit en vue de la donation à l’État français.

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Homme - tête

Égypte > Provenance inconnue

Fin Troisième Période intermédiaire ou début Basse Époque  > XXVe - XXVIe dynastie > 750 – 525 avant J.-C.

[voir chronologie]

Basalte

H. : 12 cm ; L. : 13 cm ; P. : 8,3 cm

Co. 821

Commentaire

Etat de conservation

Seule la tête et le départ de l’épaule gauche de la statuette sont conservés. Des traces de cassures – peut-être intentionnelles ? - sont observables au niveau du nez, de la bouche et du sourcil gauche, formant une sorte de large balafre qui défigure le personnage. Présentant un aspect noirci, il se pourrait qu’elle résulte de l’action du feu, sans certitude toutefois. Seuls vestiges de la bouche, les commissures des lèvres comportent de petites traces jaunes sur lesquelles il est difficile d’en dire plus. Au revers, une dépression de forme circulaire témoigne d’un impact. Placée au même niveau que l’éclat de la face, il peut également s’agir d’une usure, dont la cause n’est pas connue. Au niveau de l’épaule gauche, la statuette est brisée à l’avant. Toute la surface de la pierre est parsemée de traces terreuses et blanches, incrustées notamment dans les stries de la perruque. Enfin, la matière semble friable en surface par endroit, avec de légers décollements de la pierre, notamment au niveau de la balafre centrale du visage.

Description

L’état fragmentaire de la statuette ne permet pas de restituer l’attitude du personnage. Celui-ci porte une perruque évasée mi-longue sans raie médiane et striée, laissant les oreilles apparentes. Ces dernières sont larges et relativement haut placées. Bien que très abîmé - ce qui lui confère un aspect sévère - le visage présente quelques caractéristiques notables : des pommettes assez hautes, des yeux haut mais petits, légèrement inclinés vers le nez, ornés d’un double trait de fard traité en relief au niveau de la paupière supérieure, auquel répond le sourcil, lui aussi en relief et épousant la forme du fard à paupière. En l’absence d’inscriptions et compte tenu de l’état de conservation de la statuette, la datation de l’œuvre repose sur des critères stylistiques et iconographiques. 

 

La perruque évasée sans raie médiane - ici striée - est attestée dans l’art égyptien dès le Moyen Empire, puis au Nouvel Empire - plus rarement à l’époque ramesside - et surtout pendant la Troisième Période intermédiaire (BRANDL Helmut, Untersuchungen zur steinernen Privatplastik der Dritten Zwischenzeit: Typologie - Ikonographie - Stilistik, II, Berlin, 2008, p. 354-355 ; PERDU Olivier, Les statues privées de la fin de l’Égypte pharaonique (1069 av. J.-C.-395 apr. J.-C.), Tome I : Hommes, catalogue du musée du Louvre, Paris, 2012, p. 41) ; elle a presque disparu au début de l’époque lagide. Les chevrons que forment les stries à l’arrière trouvent de bons parallèles, en V inversé très pointu, à la fin de la Troisième Période intermédiaire (BRANDL, op. cit., p. 354, fig. 37; II, pl. 52). Cette date, qui pourrait convenir à cette statuette, ne peut être avancée qu’avec une grande prudence. La forme du visage se retrouve d’ailleurs dans une statue provenant de la Cachette de Karnak. Datée de la Troisième Période intermédiaire ou de la XXVIe dynastie, elle appartient à un certain Neschoutefnout (Caire JE 37849 = CK 517, cf. la notice en ligne sur la Base Cachette IFAO), et présente quelques aspects archaïsants. Il est possible que la statuette du musée Rodin soit elle aussi une œuvre inspirée par des modèles plus anciens, du Moyen ou du Nouvel Empire. Cette tendance archaïsante dans l’art, qui commence dès la fin de l’époque libyenne, est surtout en vogue sous la XXVe et durant la première moitié de la XXVIe dynastie, ce qui inciterait à proposer pour la tête Co. 821 une datation un peu plus tardive (PAYRAUDEAU Frédéric, « Les prémices du mouvement archaïsant à Thèbes et la statue Caire JE 37382 du quatrième prophètre Djedkhonsouiouefânkh », BIFAO 107, 2007, p. 141-156, et en particulier p. 151, n° 39 à propos du parallèle provenant de la Cachette de Karnak). Les oreilles du personnage, larges et bien visibles, pourraient être un emprunt à l’art du Moyen Empire ; la perruque peut également constituer une référence archaïsante. Cependant, hors contexte et sans la partie inférieure de cette statuette (vraisemblablement inscrite), on ne peut exclure l’hypothèse d’une œuvre remontant en fait à une plus haute époque que la première moitié du Ier millénaire avant J.-C.

Inscription

Anépigraphe. 

Historique

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

Donation à l’État français en 1916.

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