Isis

Partie supérieure d'une statuette

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE

ÉPOQUE PTOLÉMAÏQUE OU ÉPOQUE ROMAINE > Ier SIÈCLE AVANT J.-C. – Ier SIÈCLE APRÈS J.-C.

[voir chronologie]

BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)

H. : 12,6 cm ; L. : 7,4 cm ; P. : 4,3 cm 

Co. 1442

Commentaire

Etat de conservation

L’œuvre est en très mauvais état de conservation. 

Très fragmentaire, la statuette se compose aujourd’hui de cinq morceaux distincts dont trois s’assemblent encore, le buste, l’arrière du crâne et une partie du visage. L’état très détérioré du quatrième morceau ne permet pas de le rattacher à l’ensemble. Nous savons toutefois qu’il s’agit de la partie droite du visage, notamment l’oreille. 

Le métal est très oxydé et corrodé, les détails sont patinés. 

Description

Cette statuette est une représentation gréco-romaine de la déesse Isis, identifiable bien que très fragmentaire grâce au nœud isiaque visible entre les seins. 

La déesse est coiffée d’une perruque tripartite faite de larges mèches inégalement striées et séparées en registres. Les pans de la chevelure s’arrêtent au niveau des clavicules. Une dépouille de vautour surmonte la coiffe. La tête de l’oiseau surplombe le front de la divinité, sur lequel on remarque un bandeau. Aujourd’hui très abîmée, on note encore sur la tête du rapace les cavités oculaires et l’arrondi du bec. Les ailes et la queue sont déployées de chaque côté du visage recouvrant presque entièrement le crâne. Les détails des plumes, toutes striées, sont différents selon l’espacement. Les plumes du corps de l’oiseau sont courtes, larges et rondes ; celles des ailes et de la queue sont longues, fines et rectilignes. Entre les ailes et la queue sont visibles les pattes. Un modius fait de plusieurs uraei dressés surmonte la dépouille du vautour. Très détérioré et en partie brisé, il est toutefois encore possible d’imaginer que ce modiussupportait à l’origine une couronne se développant en hauteur (voir, pour comparaison, les deux œuvres conservées au Walter Art Museum et celle exposée au Brooklyn Museum, respectivement 54.201654.497, où une couronne atef surmonte le modius).

Isis est vêtue d’une robe souple plissée. La poitrine s’y démarque, soulignée par le motif en spirale du vêtement la recouvrant. Un châle plissé, posé sur les épaules, est maintenue par le nœud isiaque (voir par exemple la statue du Staatliche Museen zu Berlin ÄM 8285. Costume féminin lagide par excellence, il était très régulièrement utilisé pour les représentations divines, notamment celles d’Isis, à laquelle les reines ptolémaïques s’identifiaient. La statue d’Isis debout en diorite de Mariemont, datée de la fin de l’époque ptolémaïque et du début de l’époque romaine, acquise à Paris en 1904, permet de restituer le vêtement porté par la déesse (Inv. B. 130, DERRIKS Claire, « Isis debout », in Cl. DERRICKS, L. DELVAUX (éd.), Antiquités Égyptiennes au Musée royal de Mariemont, Morlanwelz, 2009, p. 92-99).

 

Le visage de la déesse est extrêmement détérioré. Les deux petits fragments encore conservés laissent entrevoir un visage aux joues rondes et potelées, un nez long et fin, une petite bouche pulpeuse et de petites oreilles aux lobes ornés de grosses boucles en forme de goutte. 

 

L’état de conservation actuel ne permet pas de déterminer la position d’origine de la déesse. La posture la plus fréquente pour ce type de représentation d’Isis est debout, la jambe gauche en avant, le bras droit déployé vers l’avant, avec souvent un cobra enroulé sur l’avant-bras (voir notamment la statue du Brooklyn Museum 05.395, ou celle du Walter Art Museum 54.2016. Le bras gauche peut également présenter un cobra comme c’est le cas pour l’œuvre du Walter Art Museum 54.497. La seconde possibilité serait d’y voir une Isis debout les jambes jointes, les bras le long du corps, tenant un attribut ou non. (voir par exemple l’œuvre du Musée du Louvre E11197 ou celle du Brooklyn Museum 74.220. L’état de conservation actuel ne permet pas de déterminer quelle position présentait Co. 1442.

 

Sœur-épouse d’Osiris et mère d’Horus (ou Harpocrate), Isis est une divinité aussi ancienne que l’est la civilisation égyptienne. Bien que ses origines restent floues, elle est la dernière divinité à avoir été vénérée non seulement sur le territoire égyptien mais bien au-delà, notamment à travers l’Empire romain. Isis est avant tout « mère du dieu » conçu grâce à ses dons de magicienne. En effet, Horus est issu d’une union posthume avec Osiris, démembré par Seth après un combat fratricide. Isis, après avoir rassemblé toutes les parties du corps de son mari grâce à des bandelettes, se transforma en milan à tête humaine pour ranimer la virilité d’Osiris et procréer un héritier, Horus. 

Isis est effectivement une déesse rusée et la Légende d’Isis et de Rê en apporte le témoignage. Prenant l’apparence d’une vieille femme, venue pour soigner Rê d’une morsure de serpent qu’elle avait elle-même créé, elle parvint à lui faire révéler son nom secret. 

À la Basse-Époque, Isis obtient un culte propre qui la démarque peu à peu du mythe osirien et par conséquent des cultes funéraires. Dans la pensée populaire, elle est étroitement associée à Hathor, déesse vache incarnant la prospérité par son image nourricière. Isis reprend ainsi symbolisme et attributs d’Hathor, notamment les cornes de vache flanquant le disque solaire de la couronne. Elle devient par la suite l’emblème de la féminité en tant qu’épouse et mère. Bien que vénérée durant toute la période pharaonique, elle obtient un culte d’une importance majeure à l’époque ptolémaïque. Les rois grecs lui font construire un grand temple à Philae où on y souligne son aspect cosmique et sa supériorité sur les autres dieux. 

Son iconographie est extrêmement variée. Elle peut être totalement anthropomorphe, sous forme de milan, de vache, de lionne et même parfois d’hippopotame, de scorpion ou de cobra. 

Isis forme avec Osiris et Horus la triade d’Abydos, et à l’époque gréco-romaine, la triade isiaque aux côtés de Sérapis, qui a supplanté Osiris, et d’Harpocrate. 

Voir les notices des statuettes conservées au musée Rodin pour plus d’informations sur ces divinités : Co. 687 (Harpocrate), Co. 772 (Osiris) et Co. 1230 (Sérapis). 


Pour une présentation générale d’Isis, voir DUNAND Françoise, Isis, mère des dieux, Paris, 2000, réédition Arles, 2008 et le catalogue d’exposition à Milan, ARSLAN Ermanno A. (dir.), Iside. Il mito, il misterio, la magia, catalogue d’exposition, Palazzo Reale, 22 février - 1er juin 1997, Milan, Electa, Milan, 1997. 

Œuvres associées

Les collections du musée Rodin ne conservent aucune autre œuvre similaire à Co. 1442.

Inscription

Anépigraphe. 

Historique

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

Donation à l’État français en 1916.

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Isis-Tyché

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE

ÉPOQUE ROMAINE > 30 AVANT J.-C. – 395 APRÈS J.-C.

[voir chronologie]

BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)

H. : 7,3 cm ; L. : 4 cm ; P. : 1,8 cm 

Co. 1333

Commentaire

Etat de conservation

L’œuvre est en assez mauvais état de conservation. 

La statuette est complète à l’exception du socle sur lequel elle reposait, mais du fait de son oxydation avancée, le métal est partiellement desquamé et concrétionné, ce qui atténue la finesse originelle des détails iconographiques.

Description

La déesse Isis est ici figurée selon les canons hellénistiques et romains : debout en léger contrapposto, déhanchée vers la gauche et tête tournée vers la droite. Elle est vêtue d’un long vêtement plissé tombant jusqu’aux pieds et capuchonnant la tête, ne laissant à découvert que le visage et les avant-bras. Le voile laisse visibles les cheveux naturels de la déesse, qui couronnent avec élégance son front en deux bandeaux. Malgré le mauvais état de conservation général, il semble que la cape s’ouvre sous les genoux, laissant apparaître un deuxième tissu, également visible au niveau du col.

 

La déesse tient contre son épaule gauche une imposante corne d’abondance (ou cornucopia),  débordant de fruits et de fleurs. Sur une  statuette similaire du Walters Art Museum (Inv. N° 54.943), le poids de cette corne d'abondance nécessite même l'ajout d'une colonnette de support. Sa main droite tient un gouvernail de navire, dont l’extrémité inférieure a été, dans un souci de solidité, reliée au bas de sa robe. Si les détails en sont très mal conservés, les œuvres du British Museum Inv. N°1867,0508.761 et 1955,1215.1 et du Walters Museum (Inv. N° 54.751), en donnent un aperçu. 

 

Gouvernail et corne d’abondance font écho aux attributions de Fortuna, déesse de la destinée et de la chance. Cette iconographie d'Isis-Fortuna a été le type le plus répandu dans les territoires de diffusion des cultes isiaques. Si le gouvernail peut être attribut de Pélagie, une épiclèse de Vénus patronne de la navigation, il est surtout la métaphore d’une vie guidée par la bonne fortune. Dans le monde hellénistique, une divinité équivalente existe depuis le IVème siècle sous le nom de Tyché. Elle pouvait être protectrice des villes ou incarnation du destin glorieux d’un souverain, comme sur la statuette personnifiant la Tychè de la ville d’Antioche conservée au Louvre (Inv. N° Br. 4453). 

 

Quant à la corne d’abondance, elle évoque la richesse et la fertilité et c’est ce dernier aspect qui fait la liaison avec Isis. Sœur-épouse d’Osiris et déesse magicienne puissante, elle est, très tôt dans l’histoire égyptienne et particulièrement dès le Nouvel Empire, surtout célébrée comme déesse-mère par excellence. Son fils Horus esten effet issu de l’union posthume qu'elle concrétisa avec Osiris, démembré par son frère Seth. Isis, après avoir rassemblé toutes les parties du corps de son époux grâce à des bandelettes, se transforma en milan pour ranimer la virilité d’Osiris et rendre ainsi possible la conception de leur héritier : Horus. A la Basse-Epoque, son culte propre gagne en puissance (BRICAULT 2013 ; pour une présentation générale d’Isis, voir DUNAND Françoise, Isis, mère des dieux, Paris, 2000, réédition Arles, 2008) et elle se démarque peu à peu du mythe osirien et de ses aspects funéraires. Dans la dévotion populaire, elle est de plus en plus étroitement associée à Hathor, déesse-vache nourricière dont elle était déjà souvent rapprochée par le passé, et dont elle reprend les attributs, notamment les cornes de vache flanquant le disque solaire que l’on retrouve sur la couronne de la statuette Co. 1333. Symbole de la féminité par excellence, c’est également son lien avec la notion de fertilité en général qui justifie, après la conquête grecque, son assimilation tantôt à Aphrodite, tantôt à Tyché.

 

Cette identité syncrétique est aussi apparente dans la couronne portée par la déesse, nommée basileion, et mêlant iconographies hellène et égyptienne. En son centre, un petit disque solaire encadré de deux hautes plumes (voir Malaise, 1976) et de deux cornes de vache lyriformes surmonte un croissant de lune à l’horizontale. La forme de la couronne est ici altérée par la corrosion du métal, mais est bien plus clairement identifiable sur une statuette conservée à la Bibliothèque nationale de France (bronze Inv. N° 632), ou encore une trouvaille similaire provenant de Pompéi (Naples, National Archaeological Museum, Inv. N° 125.709 (Amoroso 2017). Témoignage de l'immense succès du culte d'Isis à l'époque romaine, ce type de figurine votive réalisée en bronze était en effet diffusé dans l'ensemble du bassin méditerranéen (en témoignent les différents objets exposés à Milan en 1997, in Iside 1997). Comme il était en général associé à de petits autels situés dans les demeures privées, on peut voir en la figurine Co. 1333 un exemple d'ex-voto. En contrepartie des offrandes déposées chaque jour, les divinités de ces autels domestiques apportaient aux membres de la maisonnée protection, chance et bonheur.

Œuvres associées

Les collections du musée Rodin conservent d’autres œuvres en bronze de la déesse Isis, notamment Co. 214,  mais aucune de même type que la figurine Co. 1333.

Inscription

Anépigraphe. 

Historique

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

 

BOREUX 1913 : 209.

 

Donation à l’État français en 1916.

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Socle quadripode

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE

ÉPOQUE PTOLÉMAÏQUE 

[voir chronologie]

BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)

H. : 6,5 cm ; L. : 11,4 cm ; P. : 11,2 cm 

Co. 6284

Commentaire

Etat de conservation

L’œuvre est en mauvais état de conservation. Le métal est très oxydé. De nombreuses concrétions mélangées à de la terre d’enfouissement parsèment le socle, notamment dans les coins sous celui-ci. Le métal est boursouflé et un trou perce un des coins de la face supérieure. Enfin, Il manque l’extrémité d’un des quatre pieds.  

Description

L’objet est un socle quadripode, pour lequel les pieds finissent par une goutte. La face supérieure carrée est plane, alors que la face inférieure est totalement évidée rendant l’objet très fin. Les quatre faces latérales sont décorées de la même manière. Chaque face est compartimentée en trois espaces délimités par une fine bordure. Les deux espaces extérieurs prennent approximativement la forme d’un triangle rectangle. Les angles droit de chaque triangle se rencontrent sous les coins de la face supérieure qui supportait la statue. La pointe du triangle rejoint les pieds. La zone centrale, encadrée des triangles, finit en pointe et a été légèrement excavée verticalement en son milieu. La partie supérieure plane présente une ligne qui fait le tour des arêtes. Au centre de cette surface, on note le négatif ovale de la statue qui la surmontait. Remarquons également d’une empreinte similaire dans un des quatre coins. Il pourrait y avoir eu une seconde statue placée sur le socle.

 

Ce type de socle est assez typique de l’époque ptolémaïque. Une statue d’Aphrodite anadyomène, conservée au musée Rodin, Co. 1418, a sans doute été placée sur ce socle. Au musée du Louvre, plusieurs œuvres similaires y sont exposées, Br4420, Br4481. Sur celle-ci, Aphrodite est accompagnée d’un petit Éros qui, selon le musée du Louvre, serait un ajout moderne. Quoiqu’il en soit, les deux empreintes sur la face supérieure du socle Co. 6284 favorisent l’hypothèse de deux figures.

 

Ajouter l’Aphrodite (Roeder 1956, band II, §315e, p. 260, pl. 37 (f)) : Socle avec 4 pieds de lion, à chacun un tenon qui s’emboîte dans le socle.

 

À l'époque romaine, un culte important est rendu à Aphrodite en Égypte et en Syrie grâce, entre autres, aux conquêtes d’Alexandre le Grand. Les récits mythologiques la font naître de l’écume de la mer devenue fertile grâce au phallus d’Ouranos, dieu du ciel, tranché suite à une dispute avec son fils le titan Cronos. Aphrodite est donc fille du Ciel et de la Mer. Elle symbolise l’âme sortant purifiée des eaux. Les chrétiens d’Égypte, les Coptes, y voyant un précurseur du baptême adoptent rapidement ce rite. De même, les égyptiens suivant encore l’ancienne religion, rapprochent Aphrodite, ou Vénus pour les romains, des dieux démiurges émergeant des eaux primordiales.
 

Certains contrats de mariage des premiers siècles de notre ère trouvés en Égypte, comprennent dans la liste des parapherna, objets qui accompagnaient la dot et étaient destinés à l'usage quotidien de l'épouse, une statuette en bronze, plus rarement en argent, de la déesse. Les laraires placés à l'intérieur des maisons pouvaient également contenir une effigie d'Aphrodite. Divinité protectrice des femmes et du mariage, elle y est présentée comme la forme hellénisée des déesses indigènes, Isis-Hathor et Astarté.
Produites dans des ateliers locaux, ces figurines sont généralement adaptées de célèbres statues de la déesse à sa toilette rituelle. Les mêmes types iconographiques se retrouvent dans le domaine de la terre cuite. L’image de la déesse sortant du bain, essorant ses cheveux de l’eau de mer, a été fixée par un artiste grec du IIIe siècle avant notre ère, Doïdalses. L’une des plus vielles figurations connues d’Aphrodite anadyomène en Égypte est un relief copte conservé au Musée du Louvre, E14280. De nombreux artistes antiques et postérieurs reprendront ce schéma, l’un des plus connus restera le peintre Botticelli en 1485 et sa « Naissance de Vénus ».

Œuvres associées

Il s’agit du seul socle de ce type conservé au musée Rodin. 

Inscription

Anépigraphe. 

Historique

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

 

BOREUX 1913 : 

 

Donation à l’État français en 1916.

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Cuiller d'offrandes en forme d'Oryx

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE

NOUVEL EMPIRE à ÉPOQUES TARDIVES 

[voir chronologie]

BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)

H. : 6,5 cm ; L. : 13,2 cm ; P. : 1,6 cm 

Co. 5784

Commentaire

Etat de conservation

L’œuvre est en assez mauvais état de conservation. 

Bien que complète, le métal est très oxydé et la surface corrodée présente des lacunes en écailles. De la terre d’enfouissement est encore incrustée entre les pattes de l’animal et au niveau des cornes. 

Description

Cette cuiller à offrande en alliage cuivreux prend la forme d’un oryx aux pattes ligotées. La tête et le cou de l’animal servent de poignée à l’ustensile tandis que le corps, concave, permet d’accueillir un contenu, qu’il soit de type cosmétique ou alimentaire dans le cadre des offrandes destinées à un défunt. Une petite zone orangée se remarque dans le récipient ; il serait possible d’y voir les vestiges du contenu. Ce type de cuillers ouvragées était produit surtout au Nouvel Empire, avec une très forte popularité à la XVIIIe dynastie, mais également jusqu’à la Basse Époque. Ces ustensiles soignés, appelés cuiller à offrande ou à fard, étaient plus fréquemment réalisés en bois ou en pierre, mais aussi occasionnellement en métal, ce qui est le cas de la cuiller Co. 5784. 

Le bovidé est ligoté, ses quatre pattes maintenues ensemble par une corde enroulée à trois reprises, ses longues cornes annelées plaquées le long de l’échine. L’espace entre le cou est les cornes a été laissé plein dans un souci de solidité. La queue, à peine visible aujourd’hui, crée le rebord arrière de la cuiller et on peut encore en distinguer la touffe de poils finale sur la face concave. L’état de conservation de l’œuvre ne permet plus d’observer un niveau de détail qui devait être élevé, à en juger par la finesse des anneaux des cornes ou du rendu de l’oreille et des yeux.

L’animal ligoté représente un type très fréquent pour cette catégorie d’artefacts, qu’il soit utilitaire, funéraire ou bien votif (voir les Inv. N° E3217 ou E3678 du musée du Louvre ; N° EA26817, N° EA14231 et N° EA55275 du British Museum ; N° 44.4.15 du Metropolitan Museum of Art de New York et N° 49.54 et N°  82.226.16 du Brooklyn Museum.

 

L’oryx, encore présent à l’état sauvage en Afrique subsaharienne, est en général considéré comme une antilope quoiqu’il n’appartienne pas strictement au genre Antilopinae. Il est caractérisé par ses très longues cornes droites et est, avec la gazelle dorcas et le bouquetin, l’un des animaux emblématiques du milieu désertique dans la pensée égyptienne (sur l’oryx, voir VERNUS YOYOTTE 2005). Ces espèces constituant un gibier de choix et une viande privilégiée pour les offrandes funéraires égyptiennes, l’animal sauvage est ici représenté en tant que proie par excellence.

 

Le statut de l’oryx sur ce type d’objet reste extrêmement ambigu (Bulté 2012). Les gazelles, les bouquetins et les oryx, qui apparaissent très fréquemment à la XVIIIe dynastie – période où sont également produites la majeure partie de ces cuillers décorées (Wallert 1967) –, étaient des symboles très positifs, associés à la jeunesse, à la fécondité et à la renaissance. Ainsi, ils sont notamment l’un des motifs favoris de l’iconographie du Nouvel An, qui fête en Egypte ancienne le retour de la crue du Nil (Quaegebeur 1999). C’est seulement plus tard que l’oryx fut assimilé aux forces maléfiques. Représentant l’animal chassé par excellence, il était destiné à être tué, à l’instar des ennemis. Cette connotation maléfique de l’animal ne semble pas exister avant l’extrême fin du Nouvel Empire (Derchain 1962). Aux époques tardives, cet animal en vint même à être considéré comme un ennemi d’Horus et d’Osiris, au point d’être régulièrement sacrifié dans les temples ptolémaïques au cours de rites pour repousser le chaos. 

 

Les objets réunis dans le cadre de l’exposition du Louvre consacrée au règne animal dans l’Égypte ancienne sous la direction d’Hélène GUICHARD (Des animaux et des pharaons 2014) illustrent cette ambiguïté (comparer en particulier les cuillers d’offrande en forme d’oryx du musée du Louvre Inv. N° E 3678 (cat N° 7b p. 30 (notice de Geneviève PIERRAT-BONNEFOIS), objet réalisé en grauwacke et daté du Nouvel Empire) et Inv. N° E 3217 (cat N° 99b p. 118-119 (notice id. ib.), objet réalisée en bleu égyptien et daté de la Troisième Période intermédiaire avec la figurine d’officiant à genoux effectuant le sacrifice d’un oryx ligoté musée du Louvre Inv. N° E 3347 (cat. N° 108 p. 125 (notice de Fanny HAMONIC), objet réalisé en alliage cuivreux et daté de la Basse Époque).

 

Néanmoins, plutôt qu’y voir un symbole de l’annihilation des forces du chaos, ou une manifestation du dieu Seth déposée comme ex-voto dans un sanctuaire d’époque tardive (voir supra musée du Louvre E 3347), l’oryx formant le corps de la cuiller zoomorphe Co. 5784 serait un symbole de jouvence et de régénération, destiné à figurer dans un trousseau funéraire, en accord avec le contenu cosmétique qu’il offrait, ainsi que comme la représentation métonymique des plaisirs de la chasse pratiquée par les élites. Cette image de gibier capturé ferait référence à son statut de viande de luxe, très prisée par la noblesse pour les offrandes funéraires depuis l’Ancien Empire, et donc à des symboliques liées à la renaissance après la mort. 

Œuvres associées

Aucune autre œuvre n’est similaire à Co. 5784 dans les collections du musée Rodin. En revanche, l’objet Co. 1489 fait également partie d’un ensemble lié aux cosmétiques. Il s’agit d’un petit couvercle originellement associé à un récipient qui contenait probablement du parfum, de l’onguent ou du khôl. 

Inscription

Anépigraphe. 

Historique

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

BOREUX 1913 : Meudon / pavillon de l'Alma / vitrine 6, 325, "Partie supérieure d'une statuette de Ptah en basalte gris, le Dieu tient le sceptre [dessin]. Anépigraphe.Haut. 9 cent. Estimée trente francs."

Donation à l’État français en 1916.

Commentaire historique

L'objet était exposé dans une vitrine du pavillon de l'Alma à Meudon, du vivant de Rodin.

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Égide de Sekhmet ou Bastet

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE

ÉPOQUE TARDIVE > XXVI– XXXdynastie > 656 - 332 AVANT J.-C.

[voir chronologie]

BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)

H. : 7,6 cm ; L. : 7 cm ; P. : 1,9 cm 

Co. 2443

Commentaire

Etat de conservation

L’œuvre présente un mauvais état de conservation. 

Le métal est très oxydé, en particulier sur la face arrière où de nombreuses piqures sont visibles. Les détails du décor ont presque entièrement disparu. Les bords de l’égide sont érodés, et l’une des images de faucon a disparu. Une grande partie de la crinière de la lionne est brisée à l’arrière, ainsi que le disque solaire. Le contrepoids dorsal est manquant ainsi que l’élément rapporté central. Une ouverture ronde est visible sous la tête de lionne.

Description

L’œuvre Co. 2443 se compose d’un collier ousekh surmonté d’une tête de divinité, ici une divinité féline. Objet rituel appelé « égide », il pouvait être accompagné d’un contrepoids de collier menat qui pendait dans le dos pour contrebalancer le poids du collier sur la poitrine. Un bel exemple de cette combinaison est visible au Walters Art Museum sous le numéro 54.1515. Ce contrepoids est manquant. 

 

La tête de lionne est traitée en relief. Elle est coiffée d’une perruque tripartite dont les deux pans de cheveux tombent sur l’avant du collier, et surmontée d’un large disque solaire orné d’un uraeus. Malgré l’état de conservation très mauvais de l’œuvre, on discerne encore deux légers creusements en triangle créant les cavités oculaires. La face est entourée d’une crinière ronde d’où s’échappent les oreilles. Celles-ci supportent le disque solaire. La crinière était probablement striée avec soin à l’origine. La tête de la lionne est flanquée de part et d’autre d’une tête de faucon placé de profil, le faucon de gauche étant manquant aujourd’hui. Cette présentation se retrouve sur les œuvres du Walters Art Museum 57.540 et sur celle du Musée du Louvre E7167. La tête de faucon est surmontée d’une épaisse tige rejoignant le côté du disque solaire. Il pourrait s’agir d’un renfort ou d’une couronne. Les faucons protégeaient souvent la poitrine des dieux, des rois ou des particuliers. 

 

Le collier est un large pectoral, dit collier ousekh, dont le bord supérieur aurait été découpé en escalier (voir, pour comparaison le collier conservé au British Museum EA23431, ou celui au Walters Art Museum 57.1429. La face arrière a été laissée brute alors que la face avant présente des décors, aujourd’hui très détériorés. La première rangée est trop émoussée pour proposer une ornementation. Il est possible de restituer que la deuxième rangée est constituée d’une succession de perles rondes (voir pour comparaison l’œuvre conservée au Musée du Louvre E22861. La troisième rangée présente une composition utilisant des perles allongées en forme de goutte. La quatrième et dernière rangée est très abîmée. 

Au centre du collier, un percement circulaire a été ménagé à l’aplomb des pans de la perruque de la déesse. L’élément qui y était rapporté est perdu. Si on compare l’égide à tête de lionne du musée Rodin à celle, assez similaire, conservée à la Glyptothèque Ny Carlsberg de Copenhague ÆIN 195, où la lionne a conservé les incrustations figurant ses yeux, une fleur de lotus pourrait y avoir été insérée (cf. JØRGENSEN Mogens, Catalogue Egypt V. Egyptian Bronzes Ny Carlsberg Glyptotek, s. l., Ny Carlsberg Glyptotek, 2009, p. 290-293, n° 100.2). Le décor du collier de ces égides est souvent inspiré de motifs floraux en lien avec la flore nilotique (cf.GOMBERT-MEURICE Florence, PAYRAUDEAU Frédéric (dir.), Servir les dieux d’Égypte. Divines adoratrices, chanteuses et prêtres d’Amon à Thèbes, Catalogue d’exposition, Musée de Grenoble, 25 octobre 2018 – 27 janvier 2019, Paris, 2018, p. 397). La partie entourant ce percement pourrait également avoir été décorée comme on peut le voir sur la double égide du Musée du Louvre N4302

 

Placée derrière le disque solaire, une bélière assure à l’objet un système de suspension. Les égides de petites tailles pouvaient être portées en amulettes, le contrepoids dorsal étant placé verticalement dans ce cas. Utilisée comme objet votif au cours de cérémonies, le contrepoids dorsal de l’égide était placé horizontalement afin de la brandir. Voir les trois bronzes de la déesse Bastet conservés à la Glyptothèque Ny Carlsberg de Copenhague ÆIN 202 et ÆIN 204 et ÆIN 203 (cf. JØRGENSEN, op. cit., p. 156-159, n° 52.2, 52.3 et 52,4). 

 

L’égide égyptienne est une représentation de la divinité dans ses prérogatives protectrices. Les déesses, associées à la protection des rois et des particuliers grâce à l’allaitement ou leur fureur face à l’ennemi, y sont le plus souvent figurées. Celle de l’égide Co. 2443 serait le plus probablement à identifier à la déesse Sekhmet (voir les notices Co. 773 et Co. 788) ou à la déesse Bastet (voir la notice Co. 814). Les Égyptiens ont également conçu des égides associant deux divinités (voir celle conservée au Musée du Louvre N4302.

On retrouve des égides portées sur la poitrine par la déesse Bastet dans la petite statuaire de la Basse-Époque (voir par exemple la statuette du Musée Rodin Co. 814). L’égide apparaît aussi au cou de certaines statuettes de chat (voir l’œuvre Co. 804 du Musée Rodin), ou encore à la proue et à la poupe des barques des processions divines, généralement à l’effigie du dieu dont la statue est portée en procession (voir l’œuvre E2430 du Musée du Louvre). 

Œuvres associées

L’œuvre Co. 2443 est unique dans les collections du Musée Rodin. 

Inscription

Anépigraphe. 

Historique

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

 

Donation à l’État français en 1916.

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Manche de couteau

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE

ÉPOQUE ROMAINE > 30 AVANT J.-C. – 395 APRÈS J.-C.

[voir chronologie]

BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)

H. : 9,7 cm ; L. : 3,4 cm ; P. : 2,1 cm 

Co. 2420

Commentaire

Etat de conservation

Le manche est en mauvais état de conservation. 

Le métal est très oxydé et les détails sont patinés. Les formes se deviennent plus qu’elles ne se voient. L’œuvre présente une surface composée de carbonates de cuivre vert pâle avec des traces de sulfates. La surface est assez lisse. De petites traces de terre d’enfouissement sont encore visibles au niveau de la garde où était enserrée une lame probablement en bronze. Des chlorures sont disséminés sur la surface mais il n’est pas certain qu’ils soient encore en activité. 

Description

Ce manche de couteau historié, dont la lame n’a pas été conservée, est de grande taille. Il se compose de deux parties, le manche proprement dit et la garde, tous deux séparés par un resserrement du métal. 

L’image d’une panthère y est figurée, complètement allongée et le dos cambré. Ses pattes avant s’étirent vers le corbain arrondi, l’extrémité d’un manche qui, en forme de bec, assure une bonne prise en main. Elles rebiquent largement avec l’extrémité du manche. Les pattes arrière sont repliées de chaque côté des flancs. La queue du félin s’enroule avec grâce sur le flanc droit, la touffe de poils figurée en relief sur son dos accentuant l’illusion de mouvement. De cette panthère ne sont actuellement visibles que le contour des yeux, le dessin des oreilles et les formes générales rendues sans détail anatomique, absence sans doute due à l’état de conservation. L’animal se tient allongée sur une corde, une branche ou un décor végétal tressé, rendu avec ondulations. 

La garde, de forme approximativement triangulaire, représente une fleur de lotus flanquée de deux volutes. Un petit triangle a été creusé au centre de la fleur pour donner du relief. La partie supérieure de la garde est excavée pour permettre l’insertion de la soie, prolongement de la lame dans le manche qui est invisible. Ici, l’excavation étant peu profonde, la soie est dite postiche, c’est-à-dire qu’elle était de petite taille et donc que le montage ne devait pas être très résistant. Cependant, on note que l’oxydation du métal est différente au centre de ce creusement. Une zone orangée ronde est en effet visible. Il semblerait qu’il s’agisse d’un ancien trou, aujourd’hui bouché de concrétions, qui permettait d’insérer une soie plus longue et donc plus solide.

 

La figure de la panthère ou du chien sauvage se retrouve plus souvent durant l’époque romaine en Égypte. Nous avons cependant quelques exemples datant du Nouvel Empire, notamment les cuillers à fard du Musée du Louvre N1732, ou encore du Metropolitan Museum of Art 11.215.715. En revanche, ces exemples de manches de couteau sont respectivement en bois et en albâtre égyptien. La panthère véhicule également l’image du triomphe de l’Homme sur les forces maléfiques, citons pour l’exemple le couteau du British Museum 1814,0704.1017 datant de l’époque romaine, sur laquelle une panthère attaque une antilope. Au British Museum, un autre couteau d’époque romaine, 1814,0704.1016, se rapproche du manche musée Rodin Co. 2420. Un chien sauvage y est allongé sur le manche, vraisemblablement représenté en train de courir, arborant une hure de sanglier dans sa gueule. La garde du couteau se trouve au niveau de ses pattes arrière. De par leur manufacture et leur iconographie soignées, on peut supposer que ces armes de prestige étaient également destinées à des cérémonies officielles ou liturgiques.

Œuvres associées

Il s’agit du seul manche de couteau conservé au musée Rodin. 

Inscription

Anépigraphe. 

Historique

Acquis par Rodin entre 1893 et 1917.

Donation à l’État français en 1916.

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Situle miniature

Scène mythologique

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE

ÉPOQUE TARDIVE OU ÉPOQUE PTOLÉMAÏQUE > XXVI– XXXIdynastie > 656 - 30 AVANT J.-C.

[voir chronologie]

BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)

H. : 8 cm ; D. : 2,8  cm 

Co. 1980

Commentaire

Etat de conservation

L’œuvre présente un mauvais état de conservation. 

Complet à l’exception de l’anse, le récipient est percé plusieurs fois sur la panse, au niveau de l’image féminine. Le métal est oxydé, les détails des scènes figurées sont patinés.  

Description

L’œuvre Co. 1980 est une situle, du latin situla, « petit seau », type de vase dont le plus ancien exemplaire connu à ce jour date de la XIIdynastie (CORTEGGIANI Jean-Pierre, L’Égypte ancienne et ses dieux : dictionnaire illustré, Paris, 2007, p. 507-508). Servant d’abord à contenir du lait destiné à nourrir les défunts dans leur vie dans l’Au-delà, la situle voit son usage se diversifier à la Basse-Époque. Liée au départ uniquement aux rituels funéraires et déposée dans les tombes, elle accueille par la suite aussi bien de l’eau que des libations utilisées dans le service religieux et funéraire.

 

De forme longue et étroite, la base de Co. 1980 se finit en pointe, parfois interprétée comme un tenon (cf. LICHTHEIM Miriam, « Situla No. 11395 and Some Remarks on Egyptian Situlae », JNES 6, 1947, p. 169-179). Panse resserrée vers le haut, son col est marqué par un léger évasement. Un bourrelet extérieur constitue la lèvre. Deux anneaux s’en dégagent. Destinés à accueillir une anse, leur partie supérieure s’achève en pointe, pour assurer très vraisemblablement une meilleure accroche (voir la situle du British Museum 116126. Disparue aujourd’hui, l’anse était très vraisemblablement confectionnée dans alliage similaire à celui du vase (voir la situle du Musée du Louvre E3841

 

Le corps du vase présente un décor plus original. L’image d’une divinité anthropomorphe, très patinée, occupe le centre de deux tableaux encadrés. Dans l’un des tableaux, une figure masculine, couronnée d’une coiffe basse rectangulaire de type mortier, est vêtue d’un pagne long. L’attitude du personnage, qui est selon toute vraisemblance un dieu, est difficile à restituer. Penché légèrement vers l’avant, il étire ses bras disproportionnés en direction d’un objet posé sur le sol. Son attitude est à comparer à celle du personnage masculin figuré sur la situle proche-orientale du British Museum 116188 (côté droit). La figure féminine de l’autre tableau, placée debout sur un piédestal arrondi, se tient droite, les jambes serrées. Élancée, le bas-ventre renflé, elle est habillée d’une longe robe moulante et coiffée d’une perruque s’arrêtant au milieu du dos. Bras pliés en angle droit devant elle, ses mains tiennent un long sceptre retombant jusqu’au sol. 

 

Enfin, sous le bourrelet inférieur, un décor de petits triangles a été figuré. Une comparaison avec une grande situle du Musée royal de Mariemont (B.500, cf. DERRIKS Claire, in Cl. DERRIKS, L. DELVAUX (éd.), Antiquités égyptiennes au Musée Royal de Mariemont, Morlanwelz, 2009, p. 206-209), à la panse allongée richement décorée et dont l’extrémité est en forme de lotus, permet de restituer que le décor de la partie inférieure de la petite situle du musée Rodin suit le même motif, mais en plus schématisé. Il est fréquent de voir cet ornement finir la panse d’une situle, pour l’exemple voir les œuvres conservées au Metropolitan Museum of Art 58.76.504.2.356, ou encore 04.2.357. Ces triangles seraient une représentation simplifiée de l’espace séparant des pétales de lotus, comme c’est le cas sur le vase du Kunst Historisches Museum de Vienne, n° 482. Le fond de la situle du Musée Rodin présente une excroissance courbe, qui peut être vue comme une goutte de liquide, voire un téton d’allaitement ou, dans le cas de la Co. 1980, l’amorce d’une tige (cf. GOMBERT-MEURICE Florence, in Fl. GOMBERT-MEURICE, Fr. PAYRAUDEAU (dir.), Servir les dieux d’Égypte. Divines adoratrices, chanteuses et prêtres d’Amon à Thèbes, Catalogue d’exposition, Musée de Grenoble, 25 octobre 2018 - 27 janvier 2019, Paris, 2018, p. 316, cat. 148). 

 

Ce type de vase liturgique est très fréquemment décoré. En effet, on y retrouve généralement des processions de dieux ainsi que des inscriptions funéraires. Voir par exemple la situle conservée au Musée du Louvre N908A, bien que certaines soient également dénuées de toute ornementation, notamment l’œuvre 5221 du Musée d’archéologie de Marseille. Avec Co. 1980, aucune inscription ne figure. Son attribution à un particulier, probablement prêtre ou prêtresse, reste donc à définir. 

 

De nombreux exemples complètent les collections des musées, les situles ayant été retrouvées en grande quantité. On en compte 337 mises au jour dans les nécropoles animales de Saqqara (cfibid., p. 316, note 3). 

 

Si la petite taille de la situle du Musée Rodin suggère un usage votif, à destination d’offrande, sa datation est plus difficile à affirmer. Il semble probable de proposer une réalisation des époques tardives. 

Œuvres associées

Aucune autre œuvre dans les collections du musée Rodin n’est similaire à Co. 1980. 

Inscription

Anépigraphe. 

Historique

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

 

Donation à l’État français en 1916.

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ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE

ÉPOQUE À DÉTERMINER

[voir chronologie]

BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)

H. : 3 cm ; L. : 2,1 cm ; P. : 2,2 cm 

Co. 1489

Commentaire

Etat de conservation

L’œuvre est en mauvais état de conservation. 

Le métal est oxydé, particulièrement entre les pattes de l’oiseau et entre ses ailes. La  couche de revêtement supérieure a disparu, conséquence supposée d’un nettoyage agressif. Des traces d’abrasion sont visibles sur l’ensemble de l’objet, notamment sur le couvercle et sur les ailes de l’oiseau. Les détails de la figure sont aujourd’hui très détériorés. 

Description

L’œuvre Co. 1489 représente un rapace de très petite taille, très vraisemblablement un faucon, dressé sur ses pattes. Il est placé au centre d’un petit couvercle rond, aux bords abrasés. 

Le traitement de l’oiseau est rudimentaire. Les yeux sont visibles en creux. Le bec est à peine esquissé et son profil est, en son état actuel, arrondi. Les épaules, le profil des ailes et les pattes se démarquent. L’état de conservation de la figure de l’oiseau pénalise son identification. On peut néanmoins y voir soit celle d’un faucon (très habituelle en Egypte ancienne), soit celle d’un aigle si on la compare avec les figurines votives provenant de la région de Césarée de Cappadoce et conservées au musée du Louvre (AM 410, AO 2660 A, AO 2660 B, AO 2660 C, AO 2660 F, A0 2660 H, A0 2660 I, AO 9690, AO 9691, AO 9693, AO 9695, AO 27624, cf. BEL Nicolas et al. (dir.), L’Orient romain et byzantin au Louvre, Arles, Paris, 2012, p. 210 à 213).

L’oiseau et le couvercle sont maintenus ensemble grâce à une vis. Si ce système de fixation est moderne, l’oiseau et le couvercle semblent composés d’un alliage cuivreux identique.

 

Les petites dimensions de cet objet, associées aux matériaux dont il est constitué, suggèrent qu’il servait à obturer un récipient. Ce dernier pouvait être destiné à contenir du collyre, des onguents, du parfum, voire des substances à usage médical s’il s’agit d’un faucon car le dieu Horus, dont la figure de faucon est l’image tutélaire, possédait entre autres des compétences médicales contre les morsures et piqûres d’insectes ou de serpents. Un nombre conséquent de récipients à cosmétiques ont été retrouvés (voir par exemple pour la collection du musée du Louvre, VANDIER D’ABBADIE Jeanne, Catalogue des objets de toilette égyptiens, Paris, 1972) mais peu conservent une figure animale sur leur couvercle. On peut citer pour l’exemple l’œuvre du Penn Museum de Philadelphie E14200B sur laquelle un canard est figuré sur le couvercle. 

 

En l’absence de tout contexte historique de découverte, la datation et l’usage de cet objet (unique dans la collection) demeurent de pures hypothèses.

Œuvres associées

Aucune autre œuvre similaire n’est conservée au musée Rodin. 

Inscription

Anépigraphe. 

Historique

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

 

Donation à l’État français en 1916.

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ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE

ÉPOQUE TARDIVE OU ÉPOQUE PTOLÉMAÏQUE > XXVI– XXXIdynastie > 656 - 30 AVANT J.-C.

[voir chronologie]

BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)

H. : 5,4 cm ; L. : 2 cm ; P. : 1,7 cm 

Co. 1213

Commentaire

Etat de conservation

L’œuvre est en mauvais état de conservation. 

Le métal est oxydé et les détails sont patinés. Il manque l’avant-bras droit. La pointe des orteils est également abîmée. Le socle sur lequel la statuette se tenait a disparu. 

Description

L’œuvre Co. 1213 présente un homme debout les jambes jointes sur un socle conique, la tête légèrement décalée sur le côté droit. Sa main gauche tient contre sa poitrine la figure d’un babouin de face, accroupi sur ses pattes arrière. Le bras droit, plié vers l’avant, devait probablement présenter la paume ouverte vers l’avant en signe d’adoration. 

L’homme a le crâne rasé et porte certainement un vêtement moulant montant jusqu’aux aisselles. Aujourd’hui, aucune trace de tissu n’est visible, pourtant, on note que la démarcation entre les jambes est figurée qu’à partir des mollets ce qui suggère un vêtement long. 

La morphologie de l’homme n’est pas naturaliste. En effet, la tête du personnage, au crâne aplati, est nettement disproportionnée par rapport au reste du corps. Les grandes oreilles décorent un visage ovale. Les yeux fardés sont rendus par deux bourrelets de métal séparés d’une fente. Le nez, large et empâté, surmonte une bouche aux lèvres charnues. Le menton imberbe est rond et la mâchoire est clairement définie. Le cou est trapu et se poursuit sur des épaules larges et horizontales. Les bras, sans détail anatomique, sont fins. Le buste important couronne de petites jambes également dénuées de détails. Les pieds sont très grands et les orteils sont dissociés les uns des autres. 

Les erreurs de proportion morphologiques, ainsi que la légère distorsion de la tête suggèrent une qualité originelle assez pauvre et probablement un travail à la chaine. 

 

La représentation de l’animal qu’il tient respectueusement contre lui est émoussée. Il est néanmoins possible d’identifier un babouin, animal sacré du dieu Thot (sur ce dieu, voir CORTEGGIANI Jean-Pierre, L’Égypte ancienne et ses dieux : dictionnaire illustré, Paris, 2007, p. 543-548). L’animal se tient de face, assis sur ses pattes arrière. 

 

Le crâne rasé recouvert d’une calotte, le visage imberbe associés à la figure du babouin indiquent que la statuette correspond très certainement à l’image d’un prêtre, offrant une figure votive de babouin au dieu (pour une représentation similaire, voir la figurine en bronze ÆIN 784 de la Glyptothèque Ny Carlsberg de Copenhague (cf. JØRGENSEN Mogens, Catalogue Egypt V. Egyptian Bronzes Ny Carlsberg Glyptotek, s. l., Ny Carlsberg Glyptotek, 2009, n° 97.1, p. 282-283). Les statuettes 37.552E du Brooklyn Museum et 7434 du musée égyptien de Berlin présentent toutes deux cet exemple de prêtre de Thot (pour une présentation de ce dieu, voir l’œuvre par exemple conservée au musée Rodin, Co. 795). D’autres exemples, assez rares cependant, ont été retrouvés serrant une autre figure divine, notamment l’œuvre 30.8.98 du Metropolitan Museum of Art sur laquelle il s’agit d’une déesse. 

Roeder évoque la possibilité que ces petites statuettes faisaient parties d’un ensemble plus grand, peut-être accompagnés d’un dieu (cf. ROEDER Günther, Ägyptische Bronzewerke, Glückstadt, 1937, p. 40, § 169). Leur fonction pour autant n’est pas encore définie. L’absence de bélière sous-entend qu’il ne s’agit pas d’une amulette portée autour du cou des prêtres signifiant leurs prérogatives. 

Œuvres associées

Les collections du musée Rodin conservent une autre œuvre en bronze qui représente un prêtre tenant une figurine de babouin sur la poitrine, Co. 2367

Inscription

Anépigraphe. 

Historique

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

 

BOREUX 1913 : 375.

 

Donation à l’État français en 1916.

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Reliquaire ?

Tête de Thot sous sa forme d'Ibis

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE

NOUVEL EMPIRE OU TROISIÈME PÉRIODE INTERMÉDIAIRE > XVIII– XXVdynastie > 1550 - 656 AVANT J.-C.

[voir chronologie]

BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)

H. : 16 cm ; L. : 4 cm ; P. : 14,8 cm 

Co. 802

Commentaire

Etat de conservation

L’œuvre fragmentaire présente un bon état de conservation. Bien que le métal soit oxydé et ait par conséquent pris une teinte rouge vif, tous les détails anatomiques sont encore bien visibles. On note cependant quelques piqûres sur le sommet du crâne, conséquence d’un refroidissement trop rapide de l’alliage lors de sa coulée. De petites bulles d’air se sont insérées dans le moule et ont éclaté pendant le démoulage, créant ces trous.  Élément destiné à être enserré dans un ensemble aujourd’hui disparu, la tête est complète.

Description

L’œuvre Co. 802 figure une tête d’ibis sur laquelle un large tenon s’échappe de la base du cou. Ce tenon permettait d’insérer ce fragment dans un corps d’ibis en bronze ou en bois. La tête aplatie au niveau du front est prolongée d’un bec élancé à la cambrure naturelle où sont visibles de nombreux sillons et arêtes rendant avec réalisme les détails anatomiques. La pointe du bec est arrondie. Sur celui-ci, de fines lignes continues entourent l’arête supérieure du bec traitée en relief. Ces lignes se séparent en deux pour encadrer les yeux. Elles créent alors les arcades sourcilières épaisses et façonnent les joues. Les yeux sont rendus par deux cavités rondes dans lesquelles était placée une incrustation de pâte de verre ou d’une pierre. On y voit encore une matière jaunâtre dans l’œil gauche qui aurait servi d’adhésif. Un autre sillon marque l’ouverture du bec. Il est encadré un petit bourrelet créant ce qu’on pourrait appelé les lèvres. Le dessous du bec est concave et met en évidence les mâchoires modelées en relief, particulièrement sous l’œil où elles se séparent en deux bourrelets distincts. Le cou présente une courbure et une épaisseur naturelles. La base du cou est cependant assez large. Peut-être l’artisan a-t-il voulu représenter l’animal repu. On note enfin les traces de la coulée du bronze le long du cou. En effet, une arête allant de sous la gorge jusqu’à la base du cou est encore visible. La qualité d’exécution de l’œuvre, ainsi que sa teinte rouge, laissent supposer qu’il s’agit ici d’un bronze noir. Le bronze noir est un alliage particulier qui mêle or et argent au cuivre et à l’étain. Il est spécifique du Nouvel Empire et de la Troisième Période intermédiaire. La tête d’ibis Co. 800, très similaire, ayant également été coulée dans cet alliage et présentant les mêmes coulures de matière le long du cou, on peut alors supposer que les deux éléments ont été façonnés dans le même atelier. 

 

L’œuvre présente une attitude et un traitement  naturaliste et détaillé qui mettent encore en évidence les qualités d’observation du peuple pharaonique. L’expression générale de cet ibis est particulièrement réaliste. 

 

Il existait deux sortes d’ibis en Égypte, l’« ibis blanc » ou Ibis sacré (threskiornis aethiopica) et l’« ibis noir » (ibis falcinellus), auxquels Hérodote consacre son chapitre 76. Le premier affiche un plumage entièrement blanc et un bec rose, alors que le second a le cou, la tête, le bec, les pattes et la queue noirs.

L’ibis était considéré comme un ami des hommes car il détruisait les chenilles et les sauterelles qui menaçaient les récoltent, mais aussi d’après Hérodote, les serpents ailés venus d’Arabie et les scorpions. Il est étroitement et uniquement associé au dieu Thot, dieu lunaire, maître des « paroles divines » et seigneur d’Hermopolis. Thot, forme divinisée de Djéhouty identifié à Hermès par les Grecs, est le plus important des dieux lunaires. Il possède une personnalité complexe comprenant de nombreuses facettes. Il est à la fois la personnification de la Lune, mais aussi son protecteur, son gardien et parfois son adversaire. L’association à l’ibis se fait ici par la forme de son bec qui évoque le croissant de Lune, ainsi que par son plumage bicolore. Dans le Livre de la Vache céleste, Rê en fait son vizir et son substitut en déclarant : « Tu seras à ma place, mon remplaçant. On dira de toi : Thot, le remplaçant de Rê ». En tant que gardien et protecteur de la Lune, elle-même assimilée à l’œil d’Horus, Thot est « Celui-qui-compte-les-parties-[de-l’œil] » dans ses phases croissante et décroissante. Il possède ainsi des dons de calculateur et de mesureur. Les égyptiens ayant avancé que le pas de l’ibis faisait exactement une coudée, il est alors utilisé comme étalon type et Thot devient « maître de la coudée ». On retrouve souvent des statuettes en bronze d’ibis couchés pour que les pattes représentent le signe du bras qui était utilisé pour écrire une coudée. Les collections du musée Rodin conservent un exemple l’illustrant, Co. 5977.

De par l’observation rigoureuse et minutieuse des phases de la Lune, Thot devient le « savant » par excellence qui fait de lui le maître des écrits et du calame et le patron des scribes. Il établit le cadastre général de l’Égypte, inscrit le nom des rois sur l’arbre iched, légitimant leur accession au trône, et enregistre les résultats de la pesée du cœur. Enfin, il est juge et arbitre entre les dieux, notamment en prenant le rôle de médiateur dans le conflit qui oppose Seth et Horus. 

 

Les innombrables représentations de Thot se limitent à quatre types différents. Le plus souvent, le dieu est ibiocéphale. Il peut être également zoomorphe en prenant l’aspect d’un ibis ou d’un babouin assis, second animal sacré du dieu. Il est rare de le rencontrer entièrement anthropomorphe, ou cynocéphale bien que quelques exemples peuvent être cités, notamment dans la sixième heure du Livre de l’Amdouat, face à Nectanébo Ier dans les catacombes de Touna el-Gebel, ou sur la façade du tombeau de Pétosiris sur ce même site. 

Touna el-Gebel est connu pour être le centre culturel de Thot où la cosmogonie hermopolitaine s’est mise en place. On y trouve un ibiotapheion, immense nécropole animale où ibis et babouins étaient momifiés et inhumés dans des jarres en terre cuite ou dans des cercueils en bois ou en calcaire. L’œuvre Co. 802 représentant peut-être une figure de reliquaire, il est possible qu’elle provienne de ce site. 

 

Les reliquaires de l’Antiquité égyptienne sont des objets archéologiques bien connus, les cimetières d’animaux sacrés étant nombreux sur le territoire égyptien. Ils comprenaient un type d'animal, les « multiples ». L’œuvre Co. 802 pourrait être un reliquaire d’un « multiple ». Ces « multiples » n’étaient pas choisis pour leur caractère sacré mais c’est par les rites de leur mise à mort, leur momification et les prières récitées à cet instant que leur était conféréun caractère divin. Les animaux les plus représentés sont les serpents, les chats, les chiens, les ibis, les rapaces, les musaraignes, les scarabées et les crocodiles. Ils n’avaient pas de pouvoir à part entière, c’était le dieu qu’ils représentaient à leur mort qui était vénéré. Ils devenaient alors un ba de la divinité, acquéraient un rôle de médiateur et devenaient capables de transmettre les doléances de la population. Les reliquaires étaient créés sur demande des dévots et les prêtres se chargeaient d’y insérer l’animal entièrement momifié, soit une partie de sa momie, voire même un paquetage imitant la forme de l’animal. Ils étaient courants afin de subvenir aux besoins des commanditaires. Au fil du temps, les commandes devenant de plus en plus nombreuses, certaines bêtes étaient ainsi élevées dans le seul but de servir à leur mort d’objet de dévotion.

 

Les figures d’ibis sont des objets très nombreux. Les simples têtes d’ibis à insérer dans un corps sont en revanche moins représentées. On citera pour l’exemple les œuvres du Metropolitan Museum of Art, New York : 53.185a et 90.6.59. Celles du Penn Museum de Philadelphie : E12550 et E12577. Et enfin, les statuettes du Brooklyn Museum : 37.385Eb37.385Ea08.480.7116.580.156 et 39.94.

Œuvres associées

Les collections du musée Rodin conservent plusieurs statuettes d’ibis en bronze, Co. 211Co. 776Co. 800Co. 2425Co. 2380 et Co. 5785. Aucune de ces œuvres n’est complète. 

Les têtes d’ibis Co. 800 et Co. 802 sont similaires, produites très vraisemblablement dans le même atelier.

Inscription

Anépigraphe. 

Historique

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

BOREUX 1913 : Hôtel Biron, 238, "Tête d'Ibis en bronze, hauteur 15 cent. Estimée quarante francs."

Donation à l’État français en 1916.

Commentaire historique

L'objet fut exposé à l’hôtel Biron, parmi les chefs-d’œuvre de la collection égyptienne, là où Charles Boreux le décrivit à l’été 1913 dans l’inventaire qu’il fit en vue de la donation à l’État français.

 

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