Homme enveloppé dans un manteau

Partie supérieure d'une statue avec pilier dorsal

Égypte > provenance inconnue

Fin du Moyen Empire > 2033-1710 avant J.-C.

[VOIR CHRONOLOGIE]

Calcaire

H.  10 cm ; L. 6,5 cm ; P. 6,3 cm 

Co. 785

 

Commentaire

Etat de conservation

L’objet est en assez bon état de conservation. Cependant, la statuette est fragmentaire  : il manque toute la partie inférieure du corps, brisée en biais à partir du bassin. Quelques impacts sont visibles, notamment sur la tête, le nez, le menton, à l’arrière de la perruque, les bras et le pilier dorsal inscrit.  

Description

Cette statuette figure un homme enveloppé dans un manteau souple. Dans son dos, un pilier dorsal, mince, va en s’évasant vers le bas. Ce pilier comporte une inscription hiéroglyphique, incisée en une colonne. La partie inférieure du texte est manquante, disparue dans la cassure de l’objet. 

 

L’homme est enveloppé dans un manteau gainant, au col échancré en forme de V. Ce vêtement est constitué de deux pans rabattus l’un sur l’autre, ne laissant apparaître que les mains. Souple et enveloppant, il a été confectionné dans un tissu simple, sans ornement apparent ni bordure. Sa tête est recouverte d’une perruque lisse et épaisse, très aplatie en son sommet. Cette coiffure, couvrante, descend en s’évasant jusqu’au niveau de ses épaules (à rapprocher de celle de la statuette en serpentinite de Nebaouy, fils de Sat-Sebek, datée de la fin du Moyen Empire et achetée en 1912 au Caire (maison Nahman), inv. n° B.497 du musée royal de Mariemont, voir la notice de Luc Delvaux, in DERRIKS, DELVAUX 2009, p. 59-63). Un pilier dorsal démarre au bas de la perruque, à l’arrière de la statue. Relativement mince, mais s’évasant vers le bas, il renforçait le support de la statuette. Une inscription, fragmentaire, y est incisée, demandant «  qu'il accorde tout ce qui sort [de sa table d'offrande…]  ». Ce texte se réfère, par métonymie, aux offrandes alimentaires destinées au ka du défunt  : Co. 785 appartient donc aux petites statuaires funéraires de particuliers du Moyen Empire.  

 

Le visage de l’homme, aux formes ouvertes et arrondies, possède des traits fins. Le travail de l’artisan a très certainement été facilité par l’emploi d’un calcaire tendre. Les yeux, grands ouverts et étirés vers les tempes, sont soulignés par des sourcils légèrement incisés. Ils surmontent un nez aux narines bien marquées et au profil aquilin bien dessiné. La bouche est petite mais charnue et les oreilles, subtilement sculptées, émergent de l’épaisseur de la perruque. L’homme possède des pommettes hautes, soigneusement modelées. L’aspect massif de la perruque, le cou épais et le manteau enveloppant à la manière des images gainées d’Osiris, accordent à cette représentation funéraire une allure solide, acte volontaire de la part de l’artisan qui l’a sculptée. Ce type de statuaire correspond à une variante de la forme de la «  statue-cube  », apparue au Moyen Empire. 

 

Si la perruque, l’attitude et le vêtement qu’arbore la statuette de Rodin sont typiques du Moyen Empire, la datation peut être affinée par comparaison avec d’autres statuettes. La statuette en gabbro d’un certain Iabou, conservée au Musée du Louvre et datant de la fin de la XIIème ou de la XIIIème dynastie (ancienne collection Nahman Inv. N° E 10974 in DELANGE 1987, p. 131-132), représente un homme assis en tailleur sur un socle rectangulaire inscrit. Il porte une perruque massive, lisse, et mi-longue, qui dégage les oreilles. Il est drapé dans un long manteau échancré, dont émergent seulement les mains, placées dans une attitude identique à la statuette de Rodin : la main gauche posée à plat sur la poitrine, la main droite, poing serré à l’exception du pouce, tenant fermement le tissu. La statue de Rodin étant fragmentaire, il est difficile d’en restituer la position d’origine. L’amorce des jambes, que l’on peut entrevoir sous la main droite, laisse à penser que le personnage était possiblement assis, en tailleur comme la statuette Louvre N° E 10974 (voir supra), ou bien sur un siège, telle la statuette en pierre noire conservée à la Ny Carlsberg Glyptotek de Copenhague, datant de la même période (Inv. N° ÆIN 932 in JØRGENSEN 1996, p. 180-181 n° 74). Portant une perruque et un manteau similaires au Co. 785, le personnage de Copenhague est assis, pieds joints, sur un siège cubique placé sur un socle, et ses mains adoptent la même attitude que la statuette du musée Rodin. Autre comparaison possible, celle de la position des mains de la statuette musée du Louvre Inv. N° E 20171 (in DELANGE 1987, p. 185), identique à celle de Rodin. Réalisée en calcaire (lithographique) et portant des traces de polychromie, la statuette du Louvre est datée de la fin du Moyen Empire. La main gauche est posée à plat contre le torse, plaquée sur le rabat inférieur du manteau. Sa main droite, comme celle de Co. 785 plus grande que la gauche, se referme sur le rabat supérieur du vêtement, les doigts étant serrés à l’exception du pouce (laissé bien visible comme pour Co. 785), et agrippant l’étoffe dans un geste réaliste. Néanmoins aucune des trois représentations citées ci-dessus n’ont de pilier dorsal, contrairement à Co. 785. 

 

La statuette Co. 785 est à voir comme la représentation d’un homme de classe moyennement aisée, provenant d’une tombe ou d’une petite chapelle privée placée sur un parcours processionnel divin. Si le visage rond, au front bas, correspond aux représentations du milieu de la XIIème dynastie, la perruque enveloppante et très aplatie sur son sommet rapproche la statuette de Rodin des exemplaires datés de la fin de la XIIème dynastie ou du début de la XIIIème dynastie. Par comparaison avec d’autres statuettes, Co. 785 serait plus précisément à situer à la fin de la XIIème dynastie.  

Inscription

Une inscription est incisée sur le pilier dorsal, en une colonne. Le sens de lecture des hiéroglyphes s’effectue de droite à gauche.

Historique

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

BOREUX 1913 : Hôtel Biron, 68, Partie supérieure d'un personnage tenant les mains croisées sur la poitrine. Style des figures abydéniennes de la douzième dynastie, sur le pilier dorsal, on lit [hiéroglyphes] (écrit tourné vers la droite). Haut. 10 cent. Estimé cent cinquante francs.

Donation Rodin à l’État français 1916.

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