Ptah en nain "Patèque"

Tête provenant d'une statue

Égypte > provenance inconnue

Basse Époque ou Époque ptolémaïque

[VOIR CHRONOLOGIE]

Faïence siliceuse de couleur verte

H. 3,1 CM ; L. 2,9 CM ; P. 2,8 CM

Co. 2353

Commentaire

Etat de conservation

Hormis la couleur d’origine, qui a bruni sur une grande partie de la surface, le fragment de statuette est en bon état. La figurine a été cassée horizontalement à la base du cou et seule la tête est présente dans la collection. La bélière (anneau) qui se trouvait sur la nuque est cassée, seules les attaches sont conservées.

Description

L’objet Co. 2353 est une tête d’homme chauve qui présente un crâne difforme, plat et volumineux, et des traits du visage saillants. La vue de profil révèle un visage enfoncé au niveau de la racine du nez, avec un front proéminent et un nez rond. Les lèvres sont épaisses et le menton en galoche. Sous des sourcils longs et fins, les grands yeux sont très ouverts. Les paupières sont rendues en relief. Leur épaisseur conséquente et l’étirement vers les tempes suggèrent qu’elles étaient fardées. La vue de face est marquée par un nez épaté dont les narines sont indiquées par deux trous bien marqués et écartés. La bouche est légèrement souriante, la lèvre inférieure plus petite que la lèvre supérieure. Les commissures sont exagérément creusées. En dépit d’un crâne volontairement difforme, les attaches du cou sont fines.

 

Les oreilles, décollées du crâne, sont très détaillées (bord externe, pavillon et conduit auditif). L’oreille droite est légèrement différente de l’oreille gauche : elle est pointue en son sommet et l’anthélix (bourrelet interne) est représenté.

 

Les caractéristiques évidentes de cette tête permettent de l’identifier à Ptah-Patèque, une divinité égyptienne généralement représentée sous la forme d’un nain difforme et entièrement nu. Les figurines plus complètes que nous connaissions, comme celle du musée du Louvre (AF 1667) et celle du musée Barbier-Mueller de Genève (Inv. 203-131) présentent, outre un crâne difforme et un visage similaire à celui de Co. 2353, des traits propres aux représentations de nains dans l’Égypte ancienne : un corps disproportionné, un ventre bedonnant et des jambes courtes et arquées vers l’extérieur. Les poings fermés sont généralement placés sur les hanches. Ces figurines mesurent une dizaine de centimètres environ.

 

« Patèque » (Pataikoi) est un terme utilisé par l’historien grec Hérodote (Ve s. avant J.-C.) pour décrire les figures de proue des navires phéniciens, en forme de nain protecteur. Il les compare à la statue d’Héphaïstos (Ptah) à Memphis. Dans la culture égyptienne, les nains sont généralement associés à Ptah, dieu créateur et patron des artisans, car ils sont considérés comme des ouvriers experts en métallurgie. Plusieurs bas-reliefs peints dans les tombes de l’Ancien Empire nous montrent des nains orfèvres, comme dans le mastaba du vizir Mérérouka à Saqqâra (chambre A3, mur est, registre du bas).

 

Selon Pierre Montet (MONTET 1952, p. 73-74), le dieu Ptah, protecteur des orfèvres et orfèvre lui-même, être parfois représenté comme un nain. Toujours d’après P. Montet, les orfèvres égyptiens auraient donc été recrutés parmi des Pygmées vivant en Égypte à l’époque des pyramides, qui se considéraient comme les protégés et les descendants de Ptah.

 

Ptah-Patèque était exclusivement représenté sous la forme d’amulettes en faïence (rappelons que Co. 2353 avait un anneau sur la nuque). Elles étaient destinées à protéger leur porteur contre les forces maléfiques. Elles jouaient donc un rôle apotropaïque semblable à celui des statuettes de Bès (génie protecteur du foyer et des femmes enceintes, représenté sous la forme d’un nain nu tirant parfois la langue pour effrayer les esprits malfaisants) et du dieu Harpocrate (« Horus-l’enfant », divinité juvénile portant le doigt à la bouche, censée guérir et protéger des piqûres et des morsures).

 

Aucune autre représentation de Ptah-Patèque ne se trouve dans la collection du musée Rodin. Elle comporte cependant huit objets à l’effigie du dieu Bès, dont une amulette en faïence bleue (Co. 2736) et plusieurs statuettes du dieu Harpocrate, en pierre (cf. Co. 2341) et en bronze (cf. Co. 789). Le type d’objet, le matériau et le style autorisent pour Co. 2353 une datation de la Basse Époque (750-332 av. J.-C.) ou de l’Époque ptolémaïque (332-30 av. J.‑C.)

Inscription

Anépigraphe.

Historique

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

BOREUX 1913 : Hôtel Biron, 243, "Tête de Ptah patèque, avec bélière. Terre émaillée verte. Haut. 3 cent. Estimé cinq francs."

Donation Rodin à l’État français 1916.

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