Reliquaire

Horus sous sa forme de faucon

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE

ÉPOQUE TARDIVE OU ÉPOQUE PTOLÉMAÏQUE > XXVIe– XXXdynastie > 715 - 30 AVANT J.-C.

[voir chronologie]

H. : 8,5 cm ; L. : 6,7 cm ; Pr. : 20,3 cm 

Co. 801

Commentaire

Etat de conservation

L’œuvre est fragmentaire. Les pattes, qui étaient rapportées, manquent ainsi que les incrustations des yeux, des larmiers et du contour des joues. L’extrémité de la queue est raccourcie, conséquence supposée d’un enfouissement prolongé. Un des emplacements pour l’insertion des pattes est percé alors que l’autre est rempli d’une résine brune. On observe une fissuration autour de cet emplacement. Utilisant l’emplacement d’une trappe d’insertion ménagée dans la partie sous-caudale, un système de suspension a été installé à l’époque moderne. 

L’œuvre présente une couche de carbonates verts (malachite) sur des oxydes rougeâtres (cuprite). Des chlorures sont disséminés sur la surface mais il n’est pas certain qu’ils ne soient plus actifs. La face de l’œuvre a été nettoyée par lissage. Le dessous de l’œuvre présente des traces d’arrachement et d’abrasion. L’avant de l’aile gauche est abîmé. Sous la queue, des traces de gangue d’enfouissement blanchâtre sont encore visibles.

Description

La statuette Co. 801 figure un faucon aux ailes repliées, originellement dressé sur ses pattes. Les pattes, qui étaient rapportées, sont aujourd’hui manquantes ; seules les cuisses sont conservées. La représentation de ce rapace suit des proportions naturelles. Ainsi, galbe de la gorge et de la nuque sont figurés de façon naturaliste. D’autre part, les épaules, très rentrées, soulignent le mouvement de repli des ailes, aux extrémités anguleuses. La tête de l’oiseau présente plusieurs sillons arqués. Le premier entoure l’œil allant des fosses nasales à la région parotique, sculptant ainsi un sourcil (pour le vocabulaire descriptif utilisé, voir le site Cosmovision sur l’anatomie des oiseaux). Un autre, plus large et plus profond, constitue les joues, rendant le volume du plumage de l’oiseau. Les incrustations des yeux, des larmiers et du contour des joues, réalisés en pierre semi-précieuse ou pâte de verre, ont disparu. Une comparaison peut être établie avec le reliquaire de faucon du musée gréco-romain du Vatican n° 18512 (voir GRENIER Jean-Claude, Les bronzes du Museo Gregoriano Egizio, Vatican, 2002, p. 151, n° 314 et pl. XXXVIII). Pour retrouver ce type de réalisation, voir par exemple les œuvres du Metropolitan Museum of Art de New York 25.2.11 et 30.8.233, celle du Penn Museum à Philadelphie, E14287 ou les figurines du Walter Art Museum de Baltimore, 54.2120 et 54-547.

Le bec du faucon Co. 801, petit et crochu, est enrichi d’une fine ligne marquant son ouverture. Le front du faucon particulièrement plat se prolonge sur un vertex et un occiput arrondis, puis vers le dos où est encore visible un décor de plumes. Son front, particulièrement plat, se prolonge sur un vertex et un occiput arrondis, puis vers le dos où est encore visible un décor de plumes. Ses ailes se croisent au niveau de la queue. Sur la face inférieure de l’oiseau, le cou, la poitrine, le ventre et la région anale se succèdent avec naturel. Seul le dessous de la queue a été travaillé en léger sur-creux. 

 

Une trappe a été ménagée dans la partie sous-caudale, destinée à permettre l’insertion d’éléments votifs (dans le cas de ce reliquaire, le plus probablement un paquetage de momie, réelle ou fictive, de faucon). En utilisant cet emplacement, un système de suspension moderne a été installé, vraisemblablement dans le cadre de la préparation de l’exposition Rodin collectionneur (1967-1968). En dépit des accidents dont il porte les stigmates, la pureté des lignes de cet objet dénote une grande qualité d’exécution. 

 

Le faucon est l’animal sacré du dieu Horus, lui-même représenté hiéracocéphale dans les reliefs. Horus est un dieu solaire majeur en Égypte et peut prendre plusieurs formes. Dans la cosmogonie Héliopolitaine, Osiris a été assassiné par son frère Seth, par jalousie. Après sa mort, Isis, sœur et épouse d’Osiris, réanima son mari le temps de la conception d’Horus. Afin de le tenir éloigné des fureurs de Seth, celui-ci fut élevé caché dans les marais de Chemnis. En tant que fils, donc héritier d’Osiris, Horus affronta Seth. Sa victoire lui permit de maintenir la création en rétablissant l’équilibre et d’obtenir la royauté terrestre, son père obtenant la royauté dans l’Au-delà. A ce titre, Horus représente le modèle divin du roi, premier de la lignée royale. Il est protecteur de la royauté, tout en s’incarnant en la personne même du roi, son représentant terrestre qui doit maintenir la cohésion du pays en détruisant les ennemis de l’Égypte, de la même manière qu’Horus a détruit l’ennemi de son héritage, son oncle Seth. L’enfance d’Horus donna lieu à de nombreux épisodes mythologiques, notamment concernant la guérison de diverses maladies, piqûres et morsures d’animaux dangereux, hôtes des zones marécageuses. Cette caractéristique suscita l’apparition d’un autre dieu, homonyme. Il s’agit d’Harpocrate ou Horus l’Enfant, divinité appelée à rester un enfant, icône protectrice de cet âge fragile et personnalité distincte d’Horus fils d’Isis et d’Osiris.

 

Le faucon prête également son apparence à Montou, dieu guerrier dont la tête est surmontée du disque solaire orné d’un double uraeus et de deux hautes plumes, à Rê, dieu soleil hiéracocéphale, et à Sokar, faucon momifié associé à Osiris. Il serait tentant de proposer comme provenance d’origine le site de Saqqâra, ou la ville de Bouto où d’autres bronzes comparables ont été retrouvés, et où Horus était particulièrement vénéré.

 

La figure de faucon Co. 801 est un reliquaire (ou sarcophage votif). Les reliquaires de l’Antiquité égyptienne sont des objets archéologiques bien connus, les cimetières d’animaux sacrés étant nombreux sur le territoire égyptien. Ils comprenaient deux types d’animaux, les « uniques » et les « multiples » (cf. CHARRON Alain (dir.), La mort n’est pas une fin, Pratiques funéraires en Égypte d’Alexandre à Cléopâtre, Catalogue d’exposition, 28 septembre 2002 - 5 janvier 2003, Musée de l’Arles antique, Arles, 2002, p. 176). La catégorie des « uniques » regroupe des animaux choisis par les prêtres pour représenter de son vivant une divinité particulière. Les « uniques » les plus connus sont les taureaux Mnévis et Apis, dont la plus ancienne attestation d’inhumation remonte au règne d’Amenhotep III. L’Horus en bronze Co. 801 correspondrait au reliquaire d’un « multiple ». Ces « multiples » n’étaient pas sélectionnés pour leur caractère sacré mais c’est par les rites et les récitations accompagnant leur mise à mort et leur momification que leur était conféréun caractère divin. Les animaux les plus représentés sont les serpents, les chats, les chiens, les ibis, les crocodiles, les musaraignes ou les scarabées. Ils n’avaient pas de pouvoir à part entière, c’était le dieu qu’ils représentaient à leur mort qui était encensé. Ils devenaient alors un ba de la divinité, acquéraient un rôle de médiateur et devenaient capables de transmettre les doléances de la population. Les reliquaires étaient créés sur demande des dévots et les prêtres se chargeaient d’y insérer l’animal entièrement momifié, soit une partie de sa momie, voire même un paquetage imitant la forme de l’animal. Au fil du temps, les commandes devenant de plus en plus nombreuses, l’organisation de l’élevage de ces animaux, objets de dévotion après leur mort, monta en puissance et le choix des espèces se structura. Il est à noter que c’est grâce à l’évolution des techniques de momification qu’il devint progressivement possible de momifier des animaux de grandes tailles, l’une des difficultés à vaincre ayant été la dessiccation de leurs humeurs.

Œuvres associées

L’œuvre Co. 3035 est également un faucon en bronze. Bien que ce dernier ait encore ses pattes, la figurine Co. 801 est de meilleure qualité de par la présence de décor de plumes incrusté. Le reliquaire Co. 793 figure aussi un faucon. 

Inscription

Anépigraphe. 

Historique

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913. 

BOREUX 1913 : Meudon / atelier  de peinture / vitrine 11, 408, "Faucon en bronze assez abimé. La queue est détachée du corps, les pattes  manquent, l'animal a été emmanché de la façon la plus maladroite sur deux énormes étais en bronze. Haut. (y compris la partie restaurée) 16 cent. Estimé cinquante francs."

Donation à l’État français en 1916.

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