Reliquaire

Uraeus dressé

ÉGYPTE > PROVENANCE INCONNUE

ÉPOQUE TARDIVE OU ÉPOQUE PTOLÉMAÏQUE > XXVIe - XXXIe dynastie > 656 - 30 AVANT J.-C.

[voir chronologie]

BRONZE (ALLIAGE CUIVREUX)

H. : 4,1 cm ; L. : 2,1 cm ; P. : 3,7 cm 

Co. 2403

Commentaire

Etat de conservation

L'oeuvre présente un bon état de conservation. L’œuvre est complète à l’exception de ce que contenait le reliquaire. Le travail d’ornementation, bien que toujours discernable, est érodé. Le scellement de la cavité intérieure, situé sur la face arrière du réceptacle servant de sarcophage, a disparu. La cavité est large et de forme arrondie et ses contours, irréguliers, sont très oxydés. Sur la face avant, on note une fine fissure horizontale traversant le réceptacle de part en part. Une fissure coupe la queue transversalement derrière la bélière. On remarque également que le bronze sur toutes les arêtes est moins oxydé que sur le reste du parallélépipède. Il semble donc que le métal au niveau des arêtes soit plus épais qu’ailleurs. 

Description

L’œuvre figure un uraeus dressé avec élégance sur une base creuse rectangulaire. La fine queue du reptile s’enroule délicatement sur elle-même formant un 8. Elle est d’épaisseur égale sur toute sa longueur et finit en pointe. Elle est décorée de fines entailles rendant les écailles. La partie antérieure du reptile, c’est-à-dire le ventre déployé et la tête de l’animal, dessine une gracieuse ondulation. Le ventre est décoré de plusieurs entailles horizontales et d’une unique verticale centrale, découpant ainsi le corps en deux parties asymétriques. Deux sillons de chaque côté de la tête, légèrement décalée sur la gauche, mettent en valeur les yeux globuleux. Ces encoches se prolongent, de façon moins accentuée, sur les pans de peau flanquant le ventre et encadrant la colonne vertébrale. Une unique bélière est présente dans le dos du reptile, lui donnant ainsi deux utilités : permettre le maintien du reliquaire en hauteur grâce à des ficelles probablement ; et servir de renfort au corps dressé.  

On note quelques erreurs morphologiques dans le rendu de l’uraeus. La queue de l’animal qui est censée allonger la partie dressée, prend son départ trop haut dans le dos. En effet, elle n’est pas dans son prolongement mais semble collée au corps sous la bélière. La partie du corps dressée est quant à elle directement dans le prolongement d’une des boucles de la queue à l’avant de l’ensemble.

L’œuvre Co. 2403 devait être d’une grande finesse à l’époque de sa création.

 

Les reliquaires de l’Antiquité égyptienne sont des objets archéologiques assez bien connus, les cimetières d’animaux sacrés étant nombreux sur le territoire égyptien. Ils comprenaient deux types d’animaux, les « uniques » et les « multiples » (cf. CHARRON Alain (dir.), La mort n’est pas une fin, Pratiques funéraires en Égypte d’Alexandre à Cléopâtre, Catalogue d’exposition 28 septembre 2002-5 janvier 2003, Musée de l’Arles antique, Arles, 2002, p. 176). La première catégorie regroupe des animaux choisis, parmi leurs congénères par les prêtres grâce à une statue divine qu’ils manipulaient, pour représenter de son vivant une divinité particulière. Les « uniques » les plus connus sont les taureaux Mnévis et Apis dont la plus ancienne attestation d’inhumation date du règne d’Amenhotep III. Ici, avec l’œuvre Co. 2403 il s’agit du reliquaire d’un « multiple ». Ces « multiples » n’étaient pas choisis pour leur caractère sacré mais c’est par les rites de leur mise à mort, leur momification et les prières récitées à cet instant que leur était conféré un caractère divin. Les animaux les plus représentés sont les serpents, les chats, les chiens, les ibis et les crocodiles. Ils n’avaient pas de pouvoir à part entière, c’était le dieu qu’ils représentaient à leur mort qui était encensé. Ils devenaient alors un ba de la divinité, acquéraient un rôle de médiateur et devenaient capables de transmettre les doléances de la population. Les reliquaires étaient créés sur demande des dévots et les prêtres se chargeaient d’y insérer l’animal entièrement momifié, soit une partie de sa momie, voire même un paquetage imitant la forme de l’animal. Ces « meurtres » étaient pratiqués cachés au regard de la population car la loi égyptienne condamnait à mort toute personne ayant tué même accidentellement un animal. Quoiqu’il en soit, ils étaient courants afin de subvenir aux besoins des commanditaires. Au fil du temps, les commandes devenant de plus en plus nombreuses, certaines bêtes étaient ainsi élevées dans le seul but de servir à leur mort d’objet de dévotion.

Sur le reliquaire Co. 2403 est représenté un cobra dressé. Ce reptile est l’animal sacré de plusieurs divinités, notamment Atoum, Ouaset ou Renenoutet entre autres. Ici, sans inscription ni attribut spécifique, nous ne pouvons déterminer quel dieu est vénéré. Le serpent avait une symbolique très forte dans la mythologie égyptienne. Les forces dangereuses étaient vénérées soit pour gagner leurs bonnes grâces, soit pour vaincre les ennemis. Il s’agit alors probablement d’une commande privée afin de se protéger ou de prévenir un futur malheur.

 

D’après la petite taille du reliquaire, il ne devait seulement contenir qu’une partie du reptile momifié. 

 

Au British Museum, quelques œuvres semblent correspondre à l’iconographie et au style de l’objet Co. 2403 bien qu’il y ait quelques nuances, notamment dans le développement de la queue ou la présence d’une couronne : EA 6879, EA 71439, EA 36161, EA 36168, EA 49139 (la queue est allongée), EA 49140 (la queue est allongée) et EA 71425 (l’uraeus est couronné).

Au Penn Museum de Philadelphie, plusieurs uraei en bronze sont répertoriés, malheureusement aucune information n’est donnée quant à leur attitude sur le reliquaire ou leurs attributs : 29-70-840, 29-70-842, E 1000 et E 529. Ce dernier exemple correspond à la statuette Co. 2403 à la différence que la bélière est remplacée par un renfort métallique simple. 

 

Acquis à la vente de la collection Hilton-Price à Londres en 1911, le reliquaire de la Glyptothèque Ny Carlsberg de Copenhague ÆIN 1361, de dimensions légèrement plus importantes, présente une longueur tronquée similaire au reliquaire Co. 2403, accordant ainsi au reptile lové sur lui-même une position ramassée. La cavité de l’exemplaire de Copenhague possède encore son scellement en bronze. 

Œuvres associées

Dans les collections du Musée Rodin, l’œuvre Co. 2403 est unique. Les reliquaires Co. 5786 et Co. 5643 figurent également des reptiles toutefois, sur le premier il s’agit de deux cobras et sur le second, d’un unique serpent d’espèce indéterminé lové sur lui-même.

Inscription

Anépigraphe.

Historique

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

BOREUX 1913, Meudon, pavillon de l’Alma, vitrine 8, 357, "Uraeus dressé sur une boîte rectangulaire ayant servi de sarcophage. Bronze. Haut. 5 cent. Estimé vingt francs."

Donation à l’État français en 1916.

Commentaire historique

L'objet était exposé du vivant de Rodin dans une vitrine du pavillon de l'Alma à Meudon.

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