Ouchebti momiforme

Serviteur funéraire en bois

Égypte > Provenance inconnue
Nouvel Empire > époque ramesside d’après le style
H. 15,9 cm ; L. 3,6 cm ; P. 2,8 cm
Bois de jujubier
Co. 2408
 

Commentaire

Etat de conservation

Bon état général, même si la polychromie est usée et  par endroits, pulvérulente, notamment au niveau de la perruque. Le bois présente de grandes fentes de dessiccation dans le sens du fil. La base – et avec elle, une partie des pieds – est manquante.

Description

Ce serviteur funéraire, sculpté dans du bois de jujubier, possède un aspect particulièrement élancé et fin, bien que la tête soit plus volumineuse. Certains détails sont peints en noir, au même titre que les inscriptions hiéroglyphiques.
 
Le défunt, représenté sous l’aspect d’un serviteur funéraire, est coiffé d’une perruque tripartite qui retombe de part et d’autre du corps avec un léger biseau. Le visage, modelé, est bien détaillé. Cependant, seuls les yeux et les sourcils ont été rehaussés de la peinture noire, contrairement au nez et à la bouche. Un large collier est encore visible sous la perruque, signifié par quatre traits noirs rappelant les rangs de perles.
La taille, bien marquée, est accentuée par la position croisée des bras. Signifiés grâce à une simple saillie, ces membres ne sont pas détaillés. Les mains, et les outils agricoles – des houes – qu’elles tiennent, ont simplement été peints. Les jambes, longues et non marquées, servent de support à une colonne de hiéroglyphes. 
À l’arrière, un sac de graines est flanqué dans le dos du serviteur. Celui-ci, comme les autres outils agricoles, n’est pas détaillé et fut simplement peint sommairement par l’artiste.
 
Dans l’au-delà égyptien antique, comme sur terre, de nombreux travaux devaient être menés afin de rendre cultivables les parcelles présentes dans les « champs des offrandes ». De telles besognes, nécessaires à la survie des défunts, pouvaient alors être réalisées par des serviteurs funéraires – nommés chaouabti ou ouchebti –, des substituts au mort qu’ils représentaient.
Les premiers serviteurs funéraires apparaissent à l’extrême fin du Moyen Empire, à partir de la XIIIe dynastie. Néanmoins, ce n’est qu’à partir du Nouvel empire que la production de ces figurines se normalise et se généralise. Jusqu’à la XXe dynastie, les serviteurs funéraires sont désignés dans les textes égyptiens sous l’appellation chaoubti, un terme qui pourrait être dérivé du vocable chaouab qui sert à désigner le bois constituant une statuette. Une autre explication serait que chabou désignerait des offrandes alimentaires, dont le serviteur funéraire, grâce à ses travaux, est pourvoyeur. À partir de la XXIe dynastie, la désignation des serviteurs funéraires évolue. En effet, sur les figurines de Pinedjem I ou II (Louvre E766), c’est le mot ouchebti qui est employé. Construit sur le verbe oucheb pour signifier « celui qui répond », ce changement de mot témoigne d’une évolution de la conception du statut de ces statuettes funéraires. Longtemps considérées comme des substituts au mort, à partir de la Troisième Période intermédiaire – et de manière plus systémique à partir de la Basse Époque –, ces figurines deviennent des serviteurs dont on achète le travail.
 
Quelle-que-soit la période, les serviteurs funéraires ont pour vocation de suppléer le défunt. Ce rôle est bien décrit dans les textes funéraires, notamment dans la formule 472 des Textes des sarcophages qui s’intitule « Formule pour permettre que des chaouabti fassent le travail de leur maître dans la nécropole ». Après avoir énuméré les activités auxquelles les serviteurs funéraires devaient participer – enlèvement de briques vers les confins du plateau désertique, enregistrement des rives, ameublissement de nouvelles marges humides pour le roi régnant –, le défunt s’adresse aux figurines et les enjoint à saisir leurs outils agricoles. Au Nouvel Empire, ce rôle conféré aux serviteurs funéraires est mentionné dans le chapitre 6 du Livre pour sortir au jour (mieux connu sous l’appellation « Livre des morts »). C’est généralement ce texte qui est inscrit directement sur les statuettes.
 
À partir du début du Nouvel Empire, les serviteurs funéraires arborent deux outils agricoles, placés conte leur poitrine : une houe à soc large et une houe à pic. Dans leur dos, un sac de semence est généralement figuré. Mais, comme le suggère la formule des Textes des sarcophages, l’utilisation de ces différents outils ne se limite pas aux travaux agricoles, puisqu’ils sont également en lien avec l’artisanat des briques ou des travaux des berges, soit avec le travail de la terre en général. 
 
Au cours du Nouvel Empire, la production des serviteurs funéraires se diversifie. On remarque alors une certaine richesse dans les matériaux employés (pierre, faïence égyptienne, terre cuite, bois), mais aussi des postures, des coiffures et des vêtements représentés. Certaines statuettes, notamment celles des rois et des reines, sont fabriquées dans des matériaux nobles et sont particulièrement bien détaillés et soignés (Louvre E11105 ;  Louvre N2247 ; Louvre N438).
Durant l’époque ramesside, certains serviteurs funéraires sont produits entièrement en bois d’acacia ou de jujubier de façon relativement sommaire. Peu détaillés, les objets sont généralement grossiers et les éléments indispensables, comme les mains et les outils agricoles, ne sont signifiés que par la peinture (BM EA71280 ). Par la suite, la production de serviteurs funéraires en bois semble se raréfier, au profit de statuettes sommaires en faïence égyptienne.
 
L’objet Co. 2408 conservé au musée Rodin est donc un chaouabti, un substitut du défunt chargé de réaliser à sa place les travaux en lien avec la terre dans l’au-delà. Sculpté dans du bois de jujubier et peint, il est tout à fait caractéristique de l’époque ramesside.
 

 

Inscription

Une colonne de hiéroglyphes peints sur la face antérieure.

Historique

Acquis par Rodin entre 1893 et 1913.

BOREUX 1913 : Meudon/pavillon de l'Alma/vitrines 23 et 24, 539, Petit ushabti en bois peint en jaune. Une ligne verticale d'hiéroglyphes peints en noir. Haut. 16 cent. Estimé trois francs.

Donation Rodin à l’État français en 1916.

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