Italie ?
IIe siècle av. J.-C. - début du Ier siècle ap. J.-C.
H. 5,85 cm ; L. 5,1 cm ; P. 4,15 cm
Os, tibia gauche de bœuf
Co. 2090
Italie ?
IIe siècle av. J.-C. - début du Ier siècle ap. J.-C.
H. 5,85 cm ; L. 5,1 cm ; P. 4,15 cm
Os, tibia gauche de bœuf
Co. 2090
La pièce de mobilier est conservée dans son intégralité. Sa teinte ivoirine est ternie par de nombreux sédiments présents surtout dans les creux et à l’intérieur de la cavité médullaire. Le revers offre une patine plus jaune et des taches brunes étendues. Une fente longitudinale fragilise le dos dans la cavité médullaire, et un petit éclat vient mordre sur le chant supérieur. Deux éclats endommagent le bord dextre dont le coloris crayeux témoigne d’un certain délitement de la matière osseuse.
Cet élément de mobilier tubulaire constitue la partie centrale d’une tête de lynx, plus précisément son museau. Deux grands yeux en amande entourent un nez de forme oblongue. L’appendice surmonte des moustaches stylisées, rendues par quatre traits disposés en chevron. En-dessous se trouve la gueule ouverte de l’animal, qui est suggérée par des échancrures rectangulaires sur les côtés et des incisions courbes suggérant des crocs acérés. Le travail en grandes masses schématiques dénote une vision assez synthétique de la face du félin.
Cette applique trouve beaucoup d’analogies au sein du mobilier funéraire mis au jour en Italie. On peut citer notamment les trois pièces présentes dans la collection Carand à Florence (GRAEVEN 1903, p. 26, pl. 14), et l’exemplaire provenant du décor de deux lits funéraires de la région des Abruzzes, conservé au Museo nazionale romano à Rome (50355/b : GIULIANO 1994, n° II, 24 p. 56-57). La pièce formait le couronnement d’un accotoir de lit funéraire ou fulcrum. Un grand nombre de lits enrichis de décors en os ont été découverts, essentiellement en Italie Centrale, avec quelques occurrences dans d’autres régions, au sud de la péninsule italienne ou au nord des Alpes (BIANCHI 2020, p. 45-47, pour une liste exhaustive des lits funéraires répondant à ces typologie).
Les protomés de lynx semblent être spécifiques aux lits à décor en os puisque les spécimens en métal ne révèlent pas ce type d’ornementation. C. Letta a proposé de reconnaître cet animal, après que les hypothèses du lion ou de la panthère ont été avancées (LETTA 1984, p. 81). Le choix de ce félin sur les fulcra pourrait se rapporter à la sphère dionysiaque et au croyances symboliques en lien avec le monde de l’au-delà (GIULIANO 1994, p. 57). Les éléments des lits d’Ancône, d’Amplero (LETTA 2014, fig. 1-2 p. 6-7), de Gioia dei Marsi, de Norcia (COSTAMAGNA 2014, fig. 8 p. 118), de Penne et de l’épave du San Stefano (musée archéologique de Ventotene), permettent d’avoir une vision plus complète de notre tête de lynx. La face assez étroite se trouvait dans le prolongement d’un poitrail épousant la forme courbe du fulcrum. D’autre éléments en os formaient le dessus de la tête, les côtés et surtout de longues oreilles pointues. Les reconstitutions de lits comme celui d’Amplero montrent l’intégration de ces têtes de lynx dans un programme ambitieux. La production de ces modèles de lits en os, d’après C. Bianchi, parvient à son apogée entre le IIe siècle av. J.-C. et l’époque augustéenne (BIANCHI 2010 p. 44).
Comparaisons
-Ancône, musée archéologique national des Marches, lit funéraire.
-Chieti, musée archéologique national des Abbruzes, lit funéraire d’Amplero.
-Florence, collection Carand. -Gioia dei Marsi, éléments de lit funéraire.
-Norcia, Museo della Castellina, éléments de lit funéraire.
-Penne, éléments de lit funéraire.
-Rome, Museo nazionale romano, 50355/b.
-Ventotene, musée archéologique, éléments de lit funéraire de l’épave du San Stefano.
Acquis par A. Rodin entre 1893 et 1917. Donation A. Rodin à l’État français en 1916.